La fête de l’Épiphanie évoque un triple mystère : les Mages venus d’Orient se prosternent et adorent le Seigneur ; l’eau est changée en vin à Cana et Jean baptise Jésus dans le Jourdain. La fête de l’Épiphanie est donc remplie de lumière. Or la lumière fait découvrir la vérité. Le Christ est précisément lumière des Nations parce qu’il est la Vérité même.
L’étoile ranime en l’homme la flamme de l’espérance qui ne doit jamais lui faire défaut, quelles que soient les difficultés de sa marche. Et c’est précisément pour cela que nous sommes tous invités à regarder l’étoile et à adorer le Sauveur qu’elle nous a indiqué. Et c’est donc tout naturellement que le Pape nous présente l’adoration comme le premier point important de la fête.
Pourtant, il n’est pas facile d’adorer, car l’adoration, fruit de la contemplation, exige une maturité spirituelle qu’il est rare de trouver chez les débutants. Il y faut souvent un très long cheminement spirituel. Mais me direz-vous : l’adoration n’est-elle pas comme le désir de voir Dieu, naturel à l’homme ? Certes, l’attitude d’adoration devrait être spontanée à l’homme, mais notre nature a été viciée par le péché originel et l’homme peut aisément se tromper en adorant non pas le vrai Dieu mais des idoles. Et le Pape de citer la phrase de Léon Bloy qu’il avait déjà citée aux cardinaux le lendemain de son élection à la chaire de Pierre : « Celui qui n’adore pas Dieu, adore le diable ». Effectivement en adorant les idoles, l’homme adore le diable à l’instar d’Hérode ; notre monde moderne qui gît en grande partie sous l’emprise de son prince maléfique, multiplie les idoles fallacieuses. Alors, pour nous apprendre à bien adorer, le Pape commente trois expressions tirées de la liturgie.
Tout d’abord « lever les yeux », comme l’enseigne Isaïe. C’est une invitation à sortir de son égoïsme en repoussant le plus loin possible la dictature du moi, qui nous pousse au murmure, à l’impatience ou à la colère voire au découragement qui conduit au désespoir. Levons donc les yeux vers les choses d’en haut, selon le sage conseil de saint Paul repris par la liturgie du 15 août. Ainsi, ne nous laisserons-nous pas emprisonner par les fantasmes de notre imagination ou de notre mémoire. Cela ne veut pas dire qu’il faille faire table rase de tout, comme si tout était faux. Mais il s’agit de regarder en face notre égoïsme et surtout de le regarder de façon nouvelle en regardant d’abord Dieu. Ce vrai regard nous donnera confiance et nous poussera à l’action de grâces envers Dieu.
Ensuite, comme les mages, nous devons nous « mettre en voyage » vers Bethléem, la « maison du pain ». Le voyage implique transformation intérieure et renouvellement. Il nous enseigne à prendre les échecs, les erreurs et crises comme expériences instructives pour faire désormais ce que nous aurions dû faire. On ne peut devenir adorateur en esprit et en vérité qu’à la suite d’un cheminement graduel. Nous devons donc nous mettre en voyage dans un véritable pèlerinage vers la vraie Terre Sainte, le Ciel. Mais nous ne pourrons jamais accomplir ce voyage sans l’humilité qui nous permettra de reconnaître nos erreurs et péchés, sans pourtant jamais nous décourager. L’humilité, c’est être ce que nous sommes sans fard, devant Dieu et devant les hommes.
Enfin dernière expression et qui ressemble à la première : « voir », voir au-delà du visible qui reste trompeur et voir ce qui vaut la peine d’être vu. Pour cela, il faut non seulement lever les yeux, mais aussi conserver le cœur pur, à l’exemple de Marie qui « conservait toutes choses dans son cœur. »