L’histoire, la géographie et le christianisme ont modelé, au carrefour de l’Europe et de l’Asie, une nation minuscule et vaillante, malmenée par ses voisins depuis des siècles mais toujours vivante. Tableau de la naissance d’un peuple à la résistance peu commune.
Perchée sur les hauts plateaux du Petit Caucase, l’Arménie se révèle comme un lieu de passage entre deux continents et trois empires. Au sud du Caucase, cette forteresse naturelle domine les plateaux anatoliens tout en gardant un œil sur la vallée de l’Araxe et la plaine d’Ararat. Les montagnes offrent un refuge aux caravanes venant du Levant. À l’est de l’ancien Pont-Euxin, l’Arménie réalise la passerelle entre l’Orient et l’Occident. Peuple de marchands de par sa situation géographique, l’Arménie a trouvé son autonomie de différentes manières.
Christianisée au IIIe siècle
Sous l’influence des Empires romain et perse, l’Arménie développe un paganisme proche du zoroastrisme, religion de Zarathoustra. Cependant, durant le IIIe siècle, le christianisme se développe à travers l’Empire romain et arrive jusqu’à elle. Ainsi, en 311, le christianisme devient religion officielle. La légende raconte qu’à la suite des querelles entre la famille du roi Tiridate IV et celle de saint Grégoire l’Illuminateur, ce dernier fut enfermé pendant treize ans dans une fosse, à Khor Virap, après des supplices qui ne vinrent pas à bout de lui. Un jour, le roi Tiridate s’en vint à la chasse et fut blessé ; il tomba malade et on dit même qu’il prit l’apparence d’un sanglier. Alors sa cousine chrétienne alla chercher le saint prisonnier qui croupissait dans la fosse afin de sauver le roi. Ce qu’il fit, et c’est ainsi que le roi Tiridate IV se convertit et déclara le christianisme religion officielle de l’Arménie, deux ans avant l’édit de Milan. Cette déclaration trouve une fin politique car l’Arménie est alors sous l’emprise du peuple voisin, les Perses. Avec une religion différente, elle s’émancipe de ses voisins et trouve un élément fédérateur autre que la guerre dans son peuple. Cependant, un siècle plus tard, en arpentant l’Arménie, le moine Mesrop Machtots découvre la difficulté pour la population illettrée d’accéder aux Saintes Écritures. En effet, à ce moment, l’arménien n’est qu’un dialecte parlé et la Bible n’est accessible qu’en grec ou en syriaque. Beaucoup ne la comprennent pas, pas plus que les prêches. Une grande partie de la population n’a donc qu’une foi de surface ou reste tout simplement païenne. Le problème…