Le samedi 14 octobre a eu lieu à Compiègne, sous la présidence d’honneur de sir Michael Edwards, de l’Académie française, une journée d’hommage à Evelyn Waugh. L’un des intervenants, Benoît Le Roux, auteur de la seule biographie en français du célèbre romancier anglais, parue chez L’Harmattan, nous brosse un tableau de ce destin littéraire original.
Pourquoi avoir choisi Compiègne pour célébrer le 120e anniversaire de la naissance d’Evelyn Waugh ?
Quelques-uns de ses admirateurs français, et l’académicien Michael Edwards, ont accueilli avec joie la proposition que fit monsieur Éric Georgin, universitaire parisien mais amoureux de Compiègne, où il réside : organiser cet anniversaire avec l’aide de son club des Avenues de Compiègne, et de la municipalité. Cela tombait bien : Evelyn Waugh est venu trois fois dans l’Oise (1949, 1951, 1953), au château de Saint-Firmin près de Chantilly, résidence d’été de l’ambassadeur d’Angleterre et de son épouse lady Cooper, une de ses grandes amies, dont il a fait le personnage de Mrs Stitch (dans Scoop et dans Officiers et Gentlemen). Il est des lieux où souffle l’inspiration. C’est à Chantilly, à l’Hôtel du Château, qu’il a trouvé le début de sa trilogie L’Épée d’Honneur. Restons donc dans l’Oise.
Waugh a-t-il été reconnu en France de son vivant comme grand romancier ?
Oui, il a eu son heure de gloire, ou du moins de célébrité, en France. Morand dès 1933 (dans son Londres), puis Giraudoux (préfacier du premier de ses romans traduits en français, Diablerie) l’ont lancé chez nous : Mitterrand avait Diablerie dans son paquetage en 39-40 ! En 1946-1947, avec Retour à Brideshead, il fut qualifié dans la presse parisienne de « Mauriac anglais », à cause d’un rapprochement très superficiel avec la conversion finale du vieux patriarche dans Le Nœud de vipères. Dans les années quatre-vingt, il a trouvé un public fidèle quand presque tous ses romans ont été réédités dans la collection de poche 10/18. Mais dès la fin du XXe siècle, la chape de plomb du politiquement correct est tombée, en France comme en Angleterre, et l’on n’ose plus trop citer ce « réac », catholique romain par surcroît ! Graham Greene disait pourtant, parlant des romanciers de sa génération : « Evelyn Waugh est le plus grand d’entre nous. »
Waugh a beaucoup voyagé. L’a-t-il fait par goût ou pour fournir un matériau à ses romans ?
Les deux ! Il y a même une troisième raison. Il y avait toujours une revue ou un…