Juger un évêque ?

Publié le 24 Nov 2022
Les révélations faites à Lourdes pendant la dernière assemblée générale de la conférence des évêques de France ont mis en lumière le flou qui entoure la procédure à suivre pour le jugement d’un évêque impliqué dans une affaire d’abus sexuel. Éclairage d’un canoniste émérite sur une situation complexe.
Le droit canon est-il adapté et suffisant lorsque des affaires comme les abus sexuels concernent des évêques ?

Il faut d’abord dire que le droit pénal ecclésiastique sort d’un long purgatoire. Lorsque j’ai fait mes études de droit canonique, à la fin des années quatre-vingt-dix, l’étude du livre VI du Code de droit canonique sur les sanctions dans l’Église comme l’étude de la procédure pénale (quatrième partie du livre VII, « Les procès ») nous étaient enseignées parce que cela faisait partie de la matière et du programme, mais tous s’accordaient alors à en affirmer le caractère marginal. Bien entendu, les confesseurs devaient tout de même connaître les péchés dont l’absolution était réservée au Saint-Siège (c’est-à-dire à la Sacrée Pénitencerie), mais il s’agissait alors d’une question de for interne, entre le pénitent et le confesseur, ce dernier devant demander la délégation pour donner l’absolution, tout en conservant bien entendu le secret absolu sur l’identité du pécheur. Il existait aussi des procédures de renvoi de l’état clérical, suite à des crimes ou des délits commis par des clercs (dans l’immense majorité des cas, des prêtres), mais l’Église s’en remettait aux pouvoirs publics pour enquêter, réprimer, juger et condamner ceux de ses ministres qui se rendaient coupables de manquements graves à leurs devoirs. Malheureusement, il y a eu aussi bien des cas où les autorités ecclésiastiques, étant informées des délits et des crimes commis par des clercs soumis à leur autorité, ont préféré ne rien dire, ne pas avertir l’autorité judiciaire, et se sont contentées de transférer les coupables à un office moins exposé. Certains ont aussi péché par omission, par négligence, ou ont traité ces affaires avec une désinvolture coupable. Le scandale provoqué par les abus sexuels perpétrés par des prêtres sur des mineurs a manifesté l’impérieux besoin de rompre avec la loi du silence et a permis de revaloriser la dimension punitive et répressive du droit ecclésiastique. Se pose aussi la question de la responsabilité judiciaire de ces évêques qui ont été négligents ou qui se sont rendus coupables de complicité passive avec le mal. Enfin il y a aussi le cas…

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