Lettre n°30 de Reconstruire (novembre 2023) — Edito
Ce numéro 30 de Reconstruire est une nouvelle fois et en partie consacré à la subsidiarité, à travers notre rubrique « Questions de principe ». Dans ce cadre, nous présentons depuis quelque temps l’encyclique du pape Pie XI Quadragesimo anno qui, quarante ans après Rerum novarum, rappelait les principes chrétiens et les appliquait à la nouvelle situation sociale et politique née de la Première Guerre mondiale, de la révolution bolchevique et de la crise financière de 1929. C’est dans cette encyclique que Pie XI fut amené à définir clairement le principe de subsidiarité qui allait prendre une place déterminante dans la doctrine sociale de l’Église.
L’idée de subsidiarité
Pourtant, le mot même ne figure pas dans l’énoncé donné par Pie XI (n. 86) mais l’idée apparaît un peu plus loin (n. 88) : « plus parfaitement sera réalisé l’ordre hiérarchique des divers groupements selon ce principe de la fonction supplétive de toute collectivité, plus grandes seront l’autorité et la puissance sociale, plus heureux et plus prospère l’état des affaires publiques » (traduction de l’Action populaire de 1932). Depuis, le texte français donné par le Centre de recherche et d’action sociale (Ceras) des Jésuites (1), héritier de l’Action populaire, a légèrement corrigé cette traduction et évoque désormais le « principe de la fonction de subsidiarité ». Sur le site du Vatican, il n’existe pas de traduction française. En revanche, on retrouve selon les langues proposées soit l’idée de suppléance soit directement le terme de subsidiarité. Le latin (« subsiarii »), l’espagnol (« de función subsidiaria ») et l’anglais (« the principle of “subsidiary function” ») renvoient directement à la subsidiarité quand l’italien (« funzione suppletiva ») et le portugais (« função “supletiva” ») expriment plutôt l’idée de suppléance. Quoi qu’il en soit des difficultés de traduction, le principe de subsidiarité a été, au fil du temps, de plus en plus isolé, comme s’il représente à lui seul la clef de l’harmonie sociale. Ce faisant, on risque en le découplant du bien commun, d’en faire une interprétation fausse.
Responsabilité et pouvoir
Dans une entreprise, pour le chef d’atelier ou le responsable d’une équipe, la subsidiarité implique qu’on leur laisse, à eux qui ont la responsabilité d’une mission, le pouvoir de s’organiser, selon l’adage qui veut que celui qui tient le clou (la mission à réaliser) doit aussi tenir le marteau (le pouvoir). Reste que l’atelier ou l’équipe en question ne…