À l’approche d’une nouvelle rentrée, faut-il revenir sur les grands faits d’un été particulièrement chargé ? À vrai dire, la question n’est pas seulement rhétorique. Si nous n’y prenons garde, la pesanteur des événements peut, en effet, nous entraîner dans les bas-fonds du désespoir, nous masquant ainsi la réalité dans sa totalité et sa complexité, laissant surtout l’Ennemi triompher en utilisant jusqu’à notre indignation face au scandale du mal. À cet égard, la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques mérite que l’on s’y arrête à nouveau, pour dépasser justement le seul cadre de l’émotion et pour tenter d’en tirer des leçons pour notre proche avenir.
Blasphème or not blasphème ?
Incontestablement, alors qu’elle a été suivie par plus d’un milliard de téléspectateurs à travers le monde, celle-ci n’a pas rencontré l’unanimité attendue devant son « audace », sa « créativité » et son message. La représentation de la reine Marie-Antoinette, décapitée et chantant le Ça ira, a choqué par son outrance et sa provocation. Et qu’ajouter, qui n’ait pas déjà été dit, à propos de la parodie de la dernière Cène dans une version LGBTQ+ ?
De son côté, le monde catholique s’est interrogé pour déterminer s’il s’agissait vraiment d’un blasphème. Certains, les plus nombreux, prenant acte de l’agnosticisme ou de l’athéisme des concepteurs de ce spectacle, en ont conclu à une simple faute de mauvais goût ou à une provocation supplémentaire dans un milieu qui se nourrit habituellement de cette manière de faire.
Or qu’est-ce qu’un blasphème ? Le Dictionnaire de théologie catholique répond clairement à cette question : « on blasphème en attribuant à Dieu des actes ou des imperfections qui répugnent à sa nature, en niant insolemment ses perfections, en parlant avec mépris des choses ou des œuvres divines, en rabaissant la divinité au niveau de la créature ou en élevant celle-ci jusqu’à Dieu. Le blasphème peut être une affirmation ou une négation expresse, ou encore une interrogation insolente, ou une simple épithète outrageante associée en quelque manière au nom divin. »
Le même dictionnaire précise que le blasphème « est un péché contre la vertu de religion qui nous commande de rendre à Dieu le culte et l’honneur dont il est digne ». Il est ainsi contraire à la loi naturelle, qui vaut pour tout homme, catholique ou non.
Dépasser l’indignation
J’ai parlé d’indignation. Celle-ci est certes normale mais elle contient aussi sa propre dérive. Identifier le mal comme mal et le dénoncer est assurément une nécessité. Y répondre de manière adéquate, également !
Le danger consiste à être submergé intérieurement par celui-ci, en se laissant envahir par une réaction permanente, à fleur de peau et qui empêche de recourir aux armes surnaturelles face à de tels événements. On finit par croire ainsi à la victoire du mal, ce qui conduit immanquablement au désespoir. « C’est le propre du mauvais esprit, explique saint Ignace dans ses Exercices, de leur [c’est-à-dire aux âmes des chrétiens conséquents] causer de la tristesse et des tourments de conscience, d’élever devant elles des obstacles, de les troubler par des raisonnements faux, afin d’arrêter leurs progrès dans le chemin de la vertu. »
Notre rapport au réel
Un des moyens naturels de ne pas se laisser emporter sur une telle pente fatale consiste à replacer l’événement en question dans un contexte plus général. Malgré la permanence des compétitions entre nations et des exploits sportifs impressionnants, les actuels Jeux olympiques ont pris un caractère mondialiste que l’édition de 2024 a particulièrement montré. Ils entrent en fait dans la perspective plus large de la paix universelle de Kant ou de « l’État homogène universel » de Fukuyama. Le wokisme militant n’est lui-même qu’un rejeton parmi d’autres, terriblement efficace il est vrai, de la prétention moderne à ne dépendre d’aucunes données objectives qui ne découlent de la volonté humaine.
Ultimement se pose ainsi la question de notre rapport et de notre acceptation du réel. Et c’est peut-être ce à quoi nous devons réfléchir à partir des événements de cet été 2024.
En cette période de rentrée, il n’y a donc rien de plus urgent que de reprendre à notre compte l’exigence de la vérité portée naguère par Alexandre Soljenitsyne. Le refus du mensonge en nous passe par bien des aspects, passifs et actifs. Il n’en nécessite pas moins l’effort intellectuel de connaître le réel tel qu’il est, c’est-à-dire tel que le Créateur l’a voulu. Nous n’aurons pas trop d’une année pour réaffirmer en nous ce goût du vrai et le refus, concomitant, du mensonge.
>> à lire également : Les martyrs chrétiens de Damas enfin canonisés