> Lettre Reconstruire n° 41 | Éditorial
Le 11 décembre 1925, le pape Pie XI publiait Quas primas, une encyclique consacrée au Christ-Roi. Il y précisait la doctrine de l’Église à ce sujet et instituait une fête liturgique, fixée le dernier dimanche d’octobre. Importante liturgiquement, la royauté du Christ constitue aussi la pierre angulaire de l’enseignement social de l’Église.
Roi par sa double nature et par conquête
Le Christ est roi par sa nature divine mais aussi par sa nature humaine. Saint Thomas d’Aquin l’explicite quand il écrit : « Les autres hommes possèdent certaines grâces particulières, mais le Christ, tête de tous les hommes, a reçu en perfection toutes les grâces. C’est pourquoi, en ce qui regarde les autres hommes, l’un est législateur, l’autre prêtre, l’autre roi ; chez le Christ au contraire, tout cela se rejoint comme chez celui qui est la source de toutes grâces. » (Somme théologique, IIIa, q. 22, 1)
Enfin, le Christ n’est pas seulement roi par nature mais aussi par droit de conquête. Comme le souligne le Catéchisme de l’Église catholique, « le vrai sens de sa Royauté n’est manifesté que du haut de la croix » (n. 440).
Une royauté symbolique ?
Est-ce une royauté symbolique et une manière de parler ? La royauté du Christ n’est en aucune façon un langage adapté aux hommes d’une certaine époque. Elle ne souffre, en fait, aucune limite de temps ou de lieu. Elle « s’étend non seulement aux anges, mais au gouvernement de toute la création » précise saint Thomas à propos du pouvoir judiciaire. Le Christ-Roi détient effectivement les trois pouvoirs : judiciaires, législatif et exécutif. Royauté spirituelle, sa royauté est aussi d’ordre temporel.
Une royauté sociale
Pie XI le souligne clairement dans Quas primas :
« Les États, à leur tour, apprendront par la célébration annuelle de cette fête que les gouvernants et les magistrats ont l’obligation, aussi bien que les particuliers, de rendre au Christ un culte public et d’obéir à ses lois. Les chefs de la société civile se rappelleront, de leur côté, le dernier jugement, où le Christ accusera ceux qui l’ont expulsé de la vie publique, mais aussi ceux qui l’ont dédaigneusement mis de côté ou ignoré, et punira de pareils outrages par les châtiments les plus terribles ; car sa dignité royale exige que l’État tout entier se règle sur les commandements de Dieu et les principes chrétiens dans l’établissement des lois, dans l’administration de la justice, dans la formation intellectuelle et morale de la jeunesse, qui doit respecter la saine doctrine et la pureté des mœurs. » (N. 21)
La royauté du Christ, jusque dans sa dimension sociale, est une donnée de foi. On peut juger pastoralement s’il est nécessaire d’en faire état en toute occasion et de quelle manière. Mais, en tout état de cause, il s’agit d’un point d’ordre dogmatique que non seulement on doit conserver, mais enseigner et faire connaître au titre du témoignage public de la vérité et de la finalité à atteindre politiquement.
D’une certaine manière, réaffirmer la doctrine du Christ-Roi, c’est aussi le premier jalon pour penser hors de la culture dominante.
Lettre Reconstruire n° 41 (novembre 2024)
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