L’affaire Bétharram a ressurgi ces dernières semaines dans la presse et sur le bureau du Premier ministre. Elle révèle une centaine de plaintes pour violence et agressions sexuelles ayant eu lieu entre la fin des années 1950 et les années 2010 à l’institution Notre-Dame de Bétharram, au sud-est de Pau.
L’affaire des abus sexuels et des violences au sein de l’institution Notre-Dame de Bétharram a récemment mis en lumière les actes commis dans cette école catholique. Depuis 2024, plus d’une centaine de plaintes ont été déposées par d’anciens élèves, dénonçant des violences physiques, psychologiques et sexuelles.
Des chiffres à contextualiser
Les violences sexuelles sur mineurs constituent une problématique grave et répandue. Selon la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE), environ 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles chaque année en France. Parmi eux, 80 % subissent ces agressions dans un cadre incestueux, donc familial. En ce qui concerne les cas recensés au sein de l’Église catholique, le rapport de la CIASE estime qu’entre 1950 et 2020, environ 216 000 mineurs ont été victimes d’abus de la part de prêtres ou de religieux en France, un chiffre s’élevant à 330 000 en incluant les laïcs en mission dans l’institution. Sur une période de 70 ans, ces abus représentent environ 2 % des violences sexuelles commises chaque année en France. Depuis la publication du rapport Sauvé en 2021, l’Église de France a voulu prendre des mesures pour reconnaître et réparer les abus. Elle a ainsi versé en moyenne 38 000 euros par personne, contre 13 500 euros dans les autres cadres judiciaires. Cependant, ces commissions considèrent les plaignants comme crédibles a priori. Leur reconnaissance repose sur la vraisemblance des faits plutôt que sur une enquête judiciaire classique, et leur fonctionnement en dehors de tout cadre judiciaire limite à la fois leur efficacité et la fiabilité des chiffres avancés sur le nombre exact d’abus. Loin d’être un cas isolé, l’affaire Bétharram s’inscrit dans un contexte culturel où certaines figures, comme Gabriel Matzneff, ont longtemps été défendues par ceux qui, aujourd’hui, dénoncent les défaillances de l’Église. L’écrivain, qui faisait ouvertement l’apologie des relations avec des mineurs, a bénéficié du soutien d’une partie de l’intelligentsia française. Ce climat de tolérance à l’égard des abus a contribué à la banalisation de comportements criminels dans plusieurs milieux, et il est hypocrite d’ignorer cet arrière-plan idéologique lorsqu’on juge l’institution…