Le Pape évoque la Seigneurie du Christ

Publié le 26 Déc 2011
Le Pape évoque la Seigneurie du Christ L'Homme Nouveau

« O Emmanuel, notre Législateur et notre Roi, espérance et salut des nations, viens, Seigneur, viens nous sauver ! » Veni ad salvandum nos !

Extrait d’une ancienne antienne liturgique, citée par le Saint-Père lors du message (cf. ci-dessous) accompagnant la bénédiction Urbi et Orbidu jour de Noël, ce texte nous rappelle, par la voix même du Pape, l’importance de la Seigneurie du Christ sur l’ensemble des réalités humaines.

En 1925, le Pape Pie XI publiait l’encyclique Quas Primas sur le Christ-Roi, rappelant que la royauté du Christ s’étendait non seulement sur les personnes mais aussi sur les institutions. Après le Concile Vatican II, ce qu’on appelait la royauté sociale du Christ est tombée en désuétude. Elle revient doucement aujourd’hui dans le souci de lutter contre le relativisme et dans une perspective anti-totalitaire qui est bien soulignée dans le Compendium de la doctrine sociale de l’Église. Dans le chapitre qui aborde la question de « la Seigneurie de Dieu » et qui en montre certains fondements bibliques, il est écrit :

« Quand le pouvoir humain sort des limites de l’ordre voulu par Dieu, il s’auto-divinise et demande la soumission absolue; il devient alors la Bête de l’Apocalypse, image du pouvoir impérial persécuteur, ivre « du sang des saints et du sang des martyrs de Jésus » (Ap 17, 6). La Bête a, à son service, le « faux prophète » (Ap 19, 20) qui pousse les hommes à l’adorer grâce à des prodiges qui séduisent. Cette vision désigne prophétiquement tous les pièges utilisés par Satan pour gouverner les hommes, en s’insinuant dans leur esprit par le mensonge. Mais le Christ est l’Agneau Vainqueur de tout pouvoir qui s’absolutise au cours de l’histoire humaine. Face à ce pouvoir, saint Jean recommande la résistance des martyrs: de la sorte, les croyants témoignent que le pouvoir corrompu et satanique est vaincu, car il n’a plus aucun ascendant sur eux. »

Un tel passage mérite assurément d’être médité, à l’aube d’une nouvelle année qui s’insère dans un contexte où le christianisme est parfois attaqué avec virulence. Le Catéchisme de l’Église catholique l’avait souligné également, par exemple, en son numéro 2244 :

« Toute institution s’inspire, même implicitement, d’une vision de l’homme et de sa destinée, d’où elle tire ses références de jugement, sa hiérarchie des valeurs, sa ligne de conduite. La plupart des sociétés ont référé leur institutions à une certaine prééminence de l’homme sur les choses. Seule la Religion divinement révélée a clairement reconnu en Dieu, Créateur et Rédempteur, l’origine et la destinée de l’homme. L’Église invite les pouvoirs politiques à référer leurs jugements et leurs décisions à cette inspiration de la Vérité sur Dieu et sur l’homme :

Les sociétés qui ignorent cette inspiration ou la refusent au nom de leur indépendance par rapport à Dieu, sont amenées à chercher en elles-mêmes ou à emprunter à une idéologie leurs références et leur fin, et, n’admettant pas que l’on défende un critère objectif du bien et du mal, se donnent sur l’homme et sur sa destinée un pouvoir totalitaire, déclaré ou sournois, comme le montre l’histoire (cf. CA 45 ; 46). »

La Seigneurie et la royauté du Christ résume à elles seules tout le paradoxe du christianisme. Le roi que nous devons reconnaître est un humble enfant, né dans une crèche, pauvre parmi les pauvres, fragile de cette fragilité de l’enfance, mais aussi pleinement Dieu. G.K. Chesterton l’a magnifiquement montré dans L’Homme éternel quand il écrit :

« Enfance et divinité, impuissance totale et toute-puissance, ce contraste unique, mille et mille fois répété, ne lasse jamais. Bethléem est par excellence le lieu où les extrêmes se touchent. »

 Message de Noël du Pape Benoît XVI : 

Chers frères et sœurs de Rome et du monde entier !

Le Christ est né pour nous ! Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime. Qu’à tous parvienne l’écho de l’annonce de Bethleem, que l’Église Catholique fait retentir dans tous les continents, au-delà de toute frontière de nationalité, de langue et de culture. Le Fils de la Vierge Marie est né pour tous, il est le Sauveur de tous.

Une antique antienne liturgique l’invoque ainsi : « O Emmanuel, notre Législateur et notre Roi, espérance et salut des nations, viens, Seigneur, viens nous sauver ! » Veni ad salvandum nos ! Viens nous sauver ! C’est le cri de l’homme de tous les temps, qui se sent incapable de surmonter tout seul difficultés et périls. Il a besoin de mettre sa main dans une main plus grande et plus forte, une main qui de là-haut se tende vers lui. Chers frères et sœurs, cette main c’est le Christ, né à Bethléem de la Vierge Marie. Il est la main que Dieu a tendue à l’humanité, pour la faire sortir des sables mouvants du péché et la faire reprendre pied sur le roc, le roc solide de sa Vérité et de son Amour (cf. Ps 39 [40], 3).

Oui, voici le sens du nom de cet Enfant, le nom que, par volonté de Dieu, lui ont donné Marie et Joseph : il s’appelle Jésus, c’est-à-dire « Le-Seigneur-sauve » (cf. Mt1, 21 ; Lc 1, 31). Il a été envoyé par Dieu le Père pour nous sauver surtout du mal profond, enraciné dans l’homme et dans l’histoire : ce mal qui est la séparation d’avec Dieu, l’orgueil et la présomption d’agir par soi-même, de se mettre en concurrence avec Dieu et de se substituer à Lui, de décider ce qui est bien et ce qui est mal, d’être le maître de la vie et de la mort (cf. Gn 3, 1-7). C’est le grand mal, le grand péché, dont nous les hommes, nous ne pouvons pas nous sauver si nous ne nous en remettons pas à l’aide de Dieu, si nous ne crions pas vers Lui : « Veni ad salvandum nos ! – Viens nous sauver ! »

Le fait même d’élever vers le Ciel cette invocation, nous met déjà dans la juste condition, nous met dans la vérité de nous-mêmes : en effet, nous sommes ceux qui ont crié vers Dieu et qui ont été sauvés (cf. Est [grec] 10, 3f). Dieu est le Sauveur, nous sommes ceux qui sont en danger. Il est le médecin, nous sommes les malades. Le reconnaître est le premier pas vers le salut, vers la sortie du labyrinthe dans lequel nous nous enfermons nous-mêmes par notre orgueil. Lever les yeux vers le Ciel, tendre les mains et demander de l’aide c’est la voie de sortie, pourvu qu’il y ait Quelqu’un qui écoute, et qui peut venir à notre secours.

Jésus Christ est la preuve que Dieu a écouté notre cri. Pas seulement ! Dieu nourrit pour nous un amour si fort qu’Il ne peut pas rester en Lui-même, qu’Il sort de Lui-même et vient en nous, partageant au plus profond notre condition (cf. Ex 3, 7-12). La réponse que Dieu a donnée en Jésus au cri de l’homme dépasse infiniment notre attente, atteignant une solidarité telle qu’elle ne peut être seulement humaine, mais divine. Seul le Dieu qui est amour et l’amour qui est Dieu pouvait choisir de nous sauver par cette voie, qui est certainement la plus longue, mais qui est celle qui respecte sa vérité et la nôtre : la voie de la réconciliation, du dialogue, de la collaboration.

C’est pourquoi, chers frères et sœurs de Rome et du monde entier, en ce Noël 2011, tournons-nous vers l’Enfant de Bethléem, vers le Fils de la Vierge Marie, et disons : « Viens nous sauver ! ». Nous le répétons en union spirituelle avec tant de personnes qui vivent des situations particulièrement difficiles, et en nous faisant la voix de celui qui n’a pas de voix.

Ensemble, invoquons l’aide divine pour les populations de la Corne de l’Afrique qui souffrent de la faim et de la famine, souvent aggravées par une situation persistante d’insécurité. Que la Communauté internationale ne prive pas de son aide les nombreux réfugiés provenant de cette Région, durement éprouvés dans leur dignité.

Puisse le Seigneur donner du réconfort aux populations de l’Asie du sud-est, particulièrement de la Thaïlande et des Philippines, qui sont encore dans de graves situations de souffrance à cause des récentes inondations.

Puisse le Seigneur secourir l’humanité blessée par de nombreux conflits qui, aujourd’hui encore, ensanglantent la planète. Lui, qui est le Prince de la Paix, qu’il donne paix et stabilité à la Terre qu’il a choisie pour venir dans le monde, encourageant la reprise du dialogue entre Israéliens et Palestiniens. Qu’il fasse cesser les violences en Syrie, où beaucoup de sang a déjà été versé. Qu’il favorise la pleine réconciliation et la stabilité en Irak et en Afghanistan. Qu’il donne une vigueur renouvelée, pour l’édification du bien commun, à toutes les composantes de la société dans les Pays de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.

Puisse la naissance du Sauveur soutenir les perspectives de dialogue et de collaboration au Myanmar, pour la recherche de solutions partagées. Que la Nativité du Rédempteur garantisse la stabilité politique aux Pays africains de la Région des Grands Lacs et accompagne l’engagement des habitants du Sud-Soudan pour la sauvegarde des droits de tous les citoyens.

Chers frères et sœurs, tournons notre regard vers la Grotte de Bethléem : l’Enfant que nous contemplons est notre salut ! Il a apporté au monde un message universel de réconciliation et de paix. Ouvrons-lui notre cœur, accueillons-le dans notre vie. Répétons-lui avec confiance et espérance : « Vieni ad salvandum nos ! ».

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