Toutes les deux semaines, vous faites sa connaissance mais sans voir son visage. Il vous dit quelque chose de la réalité, mais vous ignorez qui il est. Juste une petite signature, en bas d’une illustration. Pourtant, cela fait 21 ans qu’il dessine pour vous. David Miège est un mystère pour de nombreux lecteurs.
« Mon Europe n’est plus galante, mon Europe n’est plus buissonnière, tout juste vagabonde. […] Mon Europe se conjugue au passé dans des souvenirs qui se dissipent peu à peu dans le brouhaha des glaciales métropoles ». C’est ainsi que Miège s’exprime, dans un poème. Il l’écrit à la suite d’un recueil de ses dessins, l’Europe vagabonde, en 2013.
Une page semble se tourner : la disparition du beau, l’abstraction de l’art, la montée de l’Islam… Tout cela, Miège l’illustre, affirmant que c’est la fin d’un monde : « tu m’as serré très fort, une dernière fois. Dans tes yeux, aucune tristesse, aucun regret… Juste une belle histoire qui se finissait. Les flots nous ont submergé ; c’était une nuit, notre dernière nuit ».
Pourtant, si c’est ce qu’il peut penser, ça ne semble pas être ce qu’il est. Miège ferait presque mentir son œuvre par ses actes. Philippe Maxence, rédacteur en chef de L’Homme Nouveau, pour lequel le dessinateur travaille depuis vingt ans, écrivait dans une préface : « Miège hante mon bureau une fois par semaine, mettant en avant ses camarades dessinateurs, me signalant un article intéressant, nourrissant ma rédaction de pain au chocolat, le tout enveloppé dans un bon bol d’air frais et des rires de bon aloi ».
Les pains au chocolat ont disparu, mais les rires demeurent. Dans la salle de réunion, où il s’assoit plusieurs fois par semaine pour travailler, Miège s’amuse des injonctions amicales de celui qu’il appelle sur un dessin le « glorius redacteurus en chef ». Les locaux de L’Homme Nouveau sont remplis de ses œuvres, tout comme le magazine, qu’il décore depuis 21 ans, avec son œil d’artiste. Deux fois par mois, la page 14 laisse apparaître sa vision du monde. Voici David Miège, dessinateur de presse dans votre journal.
Lorsque son premier dessin apparaît dans notre bimensuel, le 3 février 2002, alors qu’il fête ses 34 ans, Miège connaît déjà le dessin de presse. Formé à l’Institut des Beaux-arts d’Aix et de Versailles, il s’est lancé dans ce travail en 1993, dans le journal Minutes, réputé d’extrême droite.
Deux ans plus tard, remportant un prix de caricature de presse, il se voit traité de fachiste par des concurrents journalistes. Lui n’en a cure. « je ne peux pas mentir », souligne-t-il. Aux Beaux-Arts, il assume ses idées monarchistes. Pour Miège « la gauche ou la droite ; le monarchisme est au-dessus de tout ça. Suivant le dicton, je ne suis pas l’aile gauche, je ne suis pas l’aile droite ; je suis l’oiseau ».
Cette réputation lui ferme quelques portes, ce qui ne l’empêche pas de croiser le chemin de Philippe Maxence. « J’ai découvert quelqu’un qui était spontanément sympathique, simple, et qui avait des dessins amusants et naïfs, qui me semblaient pouvoir coller avec les lecteurs », affirme le directeur de la rédaction de L’Homme Nouveau.
Miège, quant à lui, aime le fond du bimensuel : « Je lisais ce journal avant, et j’aimais bien le regard qu’il portait sur l’Église ». Philippe Maxence souhaitait ajouter à son journal une petite touche humoristique au milieu des décryptages : « Miège, par ses dessins, ne suit pas forcément notre ligne éditoriale qui est de décrypter l’actualité à partir de la doctrine de l’Église. Mais il donne une respiration par son dessin ». C’est ainsi que David Miège intègre les locaux de L’Homme Nouveau.
Aujourd’hui, le dessinateur s’est attaché à ce journal. « C’est celui dans lequel je suis resté le plus longtemps », affirme-t-il. « On me laisse une certaine liberté, cela me plaît beaucoup ». Les dessins s’enchaînent dans les bureaux. Certains sont sélectionnés, d’autres sont offerts.
Blandine Fabre, secrétaire de rédaction, remarque : « Miège est toujours disponible lorsqu’on lui demande un dessin, qu’il fait avec joie. Lorsqu’on lui en demande de nouveau, il se met à l’œuvre sans discuter ». Miège aime son travail. « C’est mon rêve de gamin qui se concrétise ! » s’exclame-t-il. Il aimait le journalisme ; il aimait dessiner ; il a pu lier les deux.
Lorsqu’on lui demande quel message il veut transmettre derrière son dessin, il l’avoue lui-même : « savoir pourquoi on dessine, c’est la question qu’on se pose tout le temps ; mais je n’ai pas de réponse ». C’est un vrai artiste : il dessine sans savoir pourquoi. Il aime donner de la vie aux articles qu’il illustre. « le dessin qui est bien fait, ce n’est pas celui qui va interférer dans l’article mais qui va être son complément, une symbiose ».
C’est cependant un regard nouveau qu’il donne de la société. Selon Blandine Fabre, « Avec ses illustrations, le lecteur comprend vite ce qu’il a souhaité dire. Peut-être plus rapidement qu’en lisant plusieurs colonnes d’un article ! ».
Pour Philippe Maxence, « c’est une manière complémentaire d’aborder l’actualité à travers quelque chose qui doit exprimer une vérité de manière immédiate ». Miège, lui, voit cela d’un regard de foi : « Quand je fais un dessin pour L’Homme Nouveau, j’apporte ma petite touche humoristique à un message chrétien. »
C’est en adéquation avec le journal que David Miège exprime sa vision de la réalité de manière artistique. Et tandis que L’Homme Nouveau consacre son numéro à la Joie chrétienne, notre dessinateur suit cette idée en nous présentant le départ en voyage d’un ménage, en direction de la mer et le soleil. Une manière de dire à nos lecteurs : passez de bonnes vacances !