Retour à Rome : après les Anglicans, les luthériens ?
Le 28 octobre dernier, Margot Kaeßmann, 51 ans et divorcée, « évêque », depuis 1999, de l'Evangelische-Lutherische Landeskirche de Hanovre en Allemagne, était portée à la tête de l'Evangelische Kirche in Deutschland (EKD), la plus grande dénomination protestante en Allemagne, regroupant 23 communautés chrétiennes presque exclusivement luthériennes (l'EKD compterait 24 millions de membres, à peine moins que le nombre de catholiques en Allemagne). Le 8 novembre suivant, l'archevêque d'Uppsala, le chef de l'Église (luthérienne) de Suède (Svenska Kyrkan, qui fut « Église » d'État jusqu'en 2000 et qui compterait 6,9 millions de membres), ordonnait « évêque » de Stockholm Eva Brunne, 55 ans, « pacsée », à la manière suédoise, avec une autre femme également pasteur de cette même « Église ». Comme dans le monde anglican, l'ordination de femmes ou d'homosexuels actifs comme pasteurs ou évêques et les bénédictions d'unions de personnes de même sexe ont évidemment provoqué des déchirements dans le tissu ecclésial luthérien. Ou plutôt, elles les ont précipités.Le schisme luthérien, comme, pourrait-on dire, le schisme anglican, a, dès son origine, entretenu une ambiguïté théologique qui n’a toujours pas cessé. Une majorité de luthériens a, à tous les points de vue, rompu avec Rome d’une manière qui semble irréversible et définitive : ils se veulent et se sentent protestants. Mais une minorité de luthériens se dit encore « catholique ». Ceux-là se déclarent schismatiques « malgré-nous », à cause de la prétendue intransigeance romaine envers la réforme du catholicisme voulue par Martin Luther d’une part, et du fait que la réforme voulue par Luther lui aurait en quelque sorte « échappé » et serait allée bien au-delà de ce qu’il désirait, d’autre part. Il existe, en effet, et la chose est assez singulière pour un catholique « moyen », une...