Dans son dernier livre Sur l’islam, le philosophe Rémi Brague prend à bras le corps les questions posées par l’islam à notre civilisation, jetant la clarté de l’analyse sur les obscurités et les contradictions d’un phénomène déroutant pour les esprits qui s’obstinent à penser qu’il est seulement une religion.
Conscient des ambiguïtés, des malentendus et des contradictions qui caractérisent trop souvent le discours des Européens sur l’islam, Rémi Brague, philosophe médiéviste et arabisant, entreprend dans ce livre érudit et fouillé de remettre à leur juste place les principaux concepts d’une religion-civilisation qui, malgré sa simplicité et son évidence apparente, voire sa proximité avec le christianisme, constitue un système complexe et étranger à notre foi ainsi qu’à la culture qu’elle a engendrée. Dès lors, si l’on veut comprendre l’islam en ce qu’il est réellement, il faut cesser d’en parler en utilisant avec assurance un vocabulaire chrétien alors que des mots identiques n’ont bien souvent pas du tout le même sens. Telle est la conviction de l’auteur et l’on ne peut que la partager en ces temps de confusions généralisées. C’est pourquoi son œuvre mérite la plus grande attention.
Le livre s’ouvre sur une mise au point quant à la manière d’aborder le sujet en vérité : ne pas craindre d’être accusé d’islamophobie, celle-ci fût-elle « savante », étiquette dont Rémi Brague a déjà eu à pâtir, comme il le confie. Soulignant que le terme « islamophobe » ne peut s’appliquer qu’à des personnes, et non à une doctrine, le philosophe explique que cet amalgame revient à pratiquer l’équivalence entre « la science la plus exigeante et le racisme le plus obtus » et à confondre « une religion avec ses adeptes ». Il en souligne un autre inconvénient : « Parler d’islamophobie empêche de porter sur ce dont il s’agit un quelconque jugement de valeur ». Or, pour lui-même, il entend être respecté dans ses convictions. « Je n’ai jusqu’à présent trouvé aucune raison qui me pousse à considérer l’islam comme vrai, Mahomet comme un authentique prophète ou même comme un bon exemple, et le Coran comme un livre divin. » Saluons au passage le courage de cette déclaration.
Pour autant,…