> Dossier : « L’intelligence artificielle : entre innovation et responsabilité »
La trisomie 21 est caractérisée par une déficience intellectuelle mais celle-ci permet de souligner les autres formes d’intelligence – relationnelle, affective, de communication… – que les porteurs de trisomie possèdent souvent à un haut degré, faisant ressortir les pauvretés de l’intelligence artificielle. Entretien avec Grégoire François-Dainville directeur de la Fondation Jérôme Lejeune.
| En quoi est-il essentiel de rappeler que l’homme ne se réduit pas à ses seules performances cognitives ?
L’homme ne peut être défini uniquement par ses capacités intellectuelles ou sa puissance de calcul. Son intelligence ne se limite pas en effet à la raison analytique ou mathématique, mais inclut des dimensions affective, relationnelle et spirituelle. Les enfants porteurs de trisomie 21 illustrent bien cette intelligence relationnelle, exprimant une capacité d’attachement, d’émotion et de communication authentique. Réduire la valeur d’un individu à ses seules performances cognitives reviendrait notamment à adopter une vision utilitariste de l’humanité, où seuls les plus performants seraient valorisés, et conduit à des dérives eugénistes, classant les individus selon leur prétendue « utilité » sociale. Loin de se définir par l’efficacité ou la productivité, l’humanité repose sur la dignité intrinsèque de chaque personne. Il n’y a pas de curseur d’humanité et, comme l’affirmait le professeur Jérôme Lejeune, la manière dont une société traite ses membres les plus fragiles révèle son niveau de civilisation. L’intelligence artificielle, aussi avancée soit-elle, ne pourra jamais reproduire la richesse de l’intelligence humaine, car elle ne fait que simuler mais n’éprouve pas, ne ressent ni amour ni douleur ni désir. Comparer la conscience humaine à une machine est une erreur fondamentale, car l’homme est doté d’un registre de pensée beaucoup plus vaste que la seule pensée calculatoire et sa profondeur réside aussi dans sa vulnérabilité !
| La Fondation Lejeune alerte sur le risque que certaines avancées technologiques renforcent la sélection des personnes en situation de handicap. Quels mécanismes faudrait-il instaurer pour éviter de telles dérives ?
La sélection existe déjà avec le dépistage prénatal systématisé de la trisomie qui aboutit à ce que 97 % des bébés diagnostiqués in utero sont avortés. Les pressions pour l’extension du diagnostic préimplantatoire aux aneuploïdies (DPI-A), dans la PMA, qui vise à n’implanter que les embryons ayant le « bon » nombre de chromosomes, s’inscrit dans cette logique eugénique, présentée de surcroît comme un progrès médical. Face à ces tendances,…