La prophétie de Balzac

Publié le 16 Mai 2023
Balzac

Si le rétrécissement matérialiste de la France fut anticipé par Balzac, ce sont des écrivains bien contemporains et souvent des étrangers qui, frappés par l’indissolubilité du lien entre sa grandeur et le christianisme, secouent la torpeur de notre confort intellectuel et nous parlent de la puissance de nos héros et de la richesse de notre patrimoine.   « Institutions, livres, hommes et doctrines, tout conspire à miner la croyance d’une vie future sur laquelle l’édifice social est appuyé depuis dix-huit cent ans. Maintenant le cercueil est une transition peu redoutée. L’avenir, qui nous attendait par-delà le requiem, a été transposé dans le présent » (1). Ces mots ne sont pas écrits par un auteur contemporain, morigénant à bon droit l’esprit ambiant mais par Honoré de Balzac, en 1833, dans Eugénie Grandet. D’après lui, la grande question posée en son temps au législateur était : « Que payes-tu ? au lieu de dire : Que penses-tu ? Quand cette doctrine aura passé de la bourgeoisie au peuple, que deviendra le pays ? » (2). Aujourd’hui, une longue série d’indices concordants confirme l’inquiétude prophétique de l’illustre romancier. Ce « Que payes-tu ? » peut être décliné avec bien des nuances d’un bout à l’autre de l’éventail des manières de concevoir son existence. « Que payes-tu ? » Je me contrefiche du bien commun et je réagis, je manifeste lorsque mon bien-être matériel est en jeu. « Que payes-tu ? » Je ne soutiens pas les évolutions révolutionnaires dites progressistes, mais je ne bouge pas tant que je peux mener ma vie privée comme je l’entends, cultiver mon jardin et protéger mon patrimoine. J’accepte même, plus ou moins discrètement, de pratiquer, dans l’exercice de mon métier, des choses que ma conscience réprouve, en distinguant adroitement et malignement mes convictions profondes et mes obligations de citoyen. Ce passage d’Eugénie Grandet nous rappelle surtout le lien étroit entre « l’édifice social » et le spirituel sur lequel il s’adosse. Ce n’est pas pour rien que la Révolution et ses épigones ont voulu se doter des attributs de la sacralité et du divin : la guerre sainte des droits de l’homme, le catéchisme républicain ou positiviste, le divin social, la religion de l’avenir, de la science ou du progrès ! Mais les temps actuels démontrent l’échec radical de ces religions séculières et immanentistes incapables de juguler la montée de l’islam qu’elles ont favorisé, d’entretenir le sens du sacrifice au profit d’un intérêt commun supérieur, aujourd’hui foulé aux pieds. Ajoutons encore que l’analyse de Balzac, pour notre pays, n’évoque…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Joël Hautebert

Ce contenu pourrait vous intéresser

ChroniquesLectures

Autobiographie du pape François : une attente déçue

L'Essentiel de Thibaud Collin | Publiée dans plus de cent pays, l’autobiographie du pontife se révèle assez décevante, malgré son titre, Espère, quand à sa vie même. On y retrouve cependant ses thèmes de prédilection, ses contradictions ainsi que ses jugements peu nuancés sur certains sujets, en particulier celui de la liturgie traditionnelle.

+

pape neuvaine autobiographie
ChroniquesAnnée du Christ-RoiDoctrine sociale

Abbé Barthe : Comment s’est évanoui l’enseignement sur la royauté sociale du Christ 

Enquête Quas Primas 2 | Dans le cadre de l'année du Christ-Roi, nous continuons notre enquête. L'enseignement sur la royauté sociale du Christ, qui consistait à armer les catholiques contre la laïcité, à rappeler que les gouvernants légitimes sont des représentants du Christ-Roi et qu'ils lui doivent un culte public, était trop antimoderne pour être pleinement reçu en son temps en France.

+

royauté sociale du christ
Chroniques

Carte blanche : La tour de Babel

Aujourd’hui, certains s’insurgent contre le mélange des langues parlées et la domination de l’anglais dans les échanges internationaux. C’est vrai, le franglais existe et ce n’est pas une consolation de savoir que ce phénomène prend déjà sa source dans l’histoire lointaine. L'épisode de la tour de Babel nous rappelle que Dieu avait créé l’unité que l’homme brisa par le péché.

+

tour de Babel
ChroniquesLectures

Les prêtres réfractaires

Carte blanche d'Yves Chiron | Xavier Maréchaux est un disciple de l’historien Michel Vovelle qui a scruté l’histoire de la Révolution sous un angle sociologique et à travers l’histoire des mentalités. Son livre sur les prêtres réfractaires embrasse en fait l’histoire de l’Église entre 1789 et 1815. Il tend à montrer que la Révolution fut, pour l’Église, une occasion manquée pour se « moderniser » ; occasion manquée à cause des excès des révolutionnaires et de la rigidité des prêtres réfractaires…

+

prêtres réfractaires
ChroniquesAnnée du Christ-Roi

Mgr Schneider : Sur le règne éternel, universel et social du Christ

Enquête Quas Primas 1 | Dans le cadre de notre enquête sur le Christ-Roi, Mgr Athanasius Schneider nous a fait l’honneur de répondre. Il rappelle que, attestée par le Christ lui-même au prétoire, devant Pilate, sa royauté, enseignée par le catéchisme, confirmée par les papes, a encore été témoignée dans le sang par des martyrs, en particulier par les Cristeros du Mexique et les religieux victimes de la guerre civile espagnole.

+

christ roi Schneider