L’amour virginal peut aimer Dieu sans mesure

Publié le 19 Nov 2018
L’amour virginal peut aimer Dieu sans mesure L'Homme Nouveau

Lors de la dernière audience, le Pape est revenu sur le sixième commandement : « Tu ne commettras pas d’adultère ». Ce commandement ne peut être compris qu’à la lumière du Christ, car le mariage est le signe de l’amour du Christ pour son Église et ce n’est que la fidélité de l’amour du Christ qui permettra aux époux de vivre unis la beauté de l’affectivité et de la sexualité humaines. L’homme et la femme créés à l’image de Dieu ont en eux naturellement cet appel à l’amour véritable qui se manifeste uniquement dans la fidélité. C’est un point capital, hélas trop peu connu et surtout trop peu compris de nos jours : le véritable amour se manifeste à la fois dans la fidélité et dans la miséricorde. C’est dire que le pardon est, lui aussi, une dimension quotidienne de l’amour. Les époux qui ne se pardonnent jamais ne peuvent rester longtemps fidèles.

Parce que le sixième commandement se rapporte explicitement à la fidélité conjugale, le Pape tient à revenir sur l’enseignement de la dernière audience, pour marquer davantage l’aspect sponsal de ce commandement, qu’on doit lire à la lumière du chapitre V de l’épître aux Éphésiens. Saint Paul a vraiment été révolutionnaire pour son temps, mais son anthropologie devait passer les siècles et trouver ces dernières années dans la théologie du corps bien comprise de Jean-Paul II un approfondissement fécond et lumineux. Tout est donc fondé sur l’amour du Christ qui s’est livré pour son Église et l’a purifiée par le baptême d’eau et la parole de vie. Mais le Pape pose alors une très bonne question, hélas pas bien comprise par certains. Cette demande de fidélité conjugale à la lumière du passage de saint Paul s’adresse-t-elle uniquement aux époux ? Il faut tout de suite répondre non, car la dimension sponsale regarde également le célibat sacerdotal et la virginité consacrée. Toute vocation en effet est au plus profond d’elle-même sponsale. Renoncer à la joie d’avoir une épouse et de fonder une famille ne sera jamais pour le prêtre une mutilation. Il en est de même pour les religieux et religieuses consacrés. À l’image de Marie toujours vierge, ils entrent, plus profondément même que les époux, dans la dimension sponsale de l’Église. Voilà pourquoi l’Église a toujours affirmé la supériorité de la virginité consacrée sur le mariage, comme le disait explicitement Jean-Paul II au n. 16 de Familiaris consortio, avant de rappeler dans sa lettre Mulieris dignitatem la grandeur et la fécondité de la paternité et de la maternité spirituelles. Que l’on songe à la sainteté de saint Joseph vrai Père virginal de Jésus, qu’il n’a pas enfanté humainement mais qui est cependant le fruit de son amour virginal pour Marie. Cette supériorité de la virginité consacrée sur le mariage s’explique par le lien plus étroit qu’elle possède avec la paternité divine. L’amour virginal peut aimer Dieu sans mesure puisqu’il n’est pas partagé par d’autres affections, embrassant ainsi toute l’humanité, dans l’attente des noces eschatologiques. Par la virginité consacrée, la paternité et la maternité spirituelles embrassent le monde entier, en anticipant, par la virginité précisément, le monde nouveau où le mariage disparaîtra, comme l’avait affirmé Jésus devant ses détracteurs sadducéens. À l’exemple de Marie, la virginité consacrée devient féconde et exemplaire. Tous nous sommes nés pour aimer. Aucun de nous ne doit jamais commettre d’adultère. Demandons à Marie d’être fidèles à notre propre vocation et de comprendre cette pleine dimension de la fidélité sponsale.

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 31 octobre 2018

Chers frères et sœurs, bonjour!

Je voudrais aujourd’hui compléter la catéchèse sur la sixième parole du Décalogue — «Tu ne commettras pas d’adultère» —, en soulignant que l’amour fidèle du Christ est la lumière pour vivre la beauté de l’affectivité humaine. En effet, notre dimension affective est un appel à l’amour, qui se manifeste dans la fidélité, dans l’accueil et dans la miséricorde. Cela est très important. Comment se manifeste l’amour? Dans la fidélité, dans l’accueil et dans la miséricorde.

Il ne faut cependant pas oublier que ce commandement se réfère explicitement à la fidélité matrimoniale, et il est donc bon de réfléchir plus en profondeur sur sa signification sponsale. Ce passage des Ecritures, ce passage de la lettre de saint Paul, est révolutionnaire! Penser, avec l’anthropologie de cette époque, et dire que le mari doit aimer sa femme comme le Christ aime l’Eglise: mais c’est une révolution! Peut-être, à cette époque, est-ce la chose la plus révolutionnaire qui a été dite sur le mariage. Toujours sur la route de l’amour. Nous pouvons nous demander: ce commandement de fidélité, à qui est-il destiné? Seulement aux époux? En réalité, ce commandement est pour tous, c’est une Parole paternelle de Dieu adressée à chaque homme et à chaque femme.

Rappelons-nous que le chemin de la maturation humaine est le parcours même de l’amour qui va de recevoir des soins à la capacité d’offrir des soins, de recevoir la vie à la capacité de donner la vie. Devenir des hommes et des femmes adultes veut dire arriver à vivre l’attitude sponsale et parentale, qui se manifeste dans les diverses situations de la vie comme la capacité de prendre sur soi le poids de quelqu’un d’autre et de l’aimer sans ambiguïté. C’est donc une attitude globale de la personne qui sait assumer la réalité et qui sait entrer dans une relation profonde avec les autres.

Qui est donc l’adultère, le luxurieux, l’infidèle? C’est une personne immature, qui garde pour elle sa propre vie et qui interprète les situations sur la base de son propre bien-être et de sa propre satisfaction. Pour se marier, il ne suffit donc pas de célébrer le mariage! Il faut faire un chemin du moi au nous, de penser tout seul à penser à deux, de vivre seul à vivre à deux: c’est un beau chemin, c’est un chemin beau. Quand nous arrivons à nous décentrer, alors chaque acte est sponsal: nous travaillons, nous parlons, nous décidons, nous rencontrons les autres avec une attitude accueillante et oblative.

Dans ce sens, chaque vocation chrétienne — à présent nous pouvons élargir un peu la perspective, et dire que chaque vocation chrétienne, dans ce sens, est sponsale. Le sacerdoce l’est parce que c’est l’appel, dans le Christ et dans l’Eglise, à servir la communauté avec toute l’affection, le soin concret et la sagesse que donne le Seigneur. L’Eglise n’a pas besoin d’aspirants au rôle de prêtre — non, elle n’en a pas besoin, il vaut mieux qu’ils restent chez eux —, mais elle a besoin d’hommes à qui l’Esprit Saint touche le cœur par un amour sans réserves pour l’épouse du Christ. Dans le sacerdoce on aime le peuple de Dieu avec toute la paternité, la tendresse et la force d’un époux et d’un père. Il en est de même pour la virginité consacrée dans le Christ, que l’on vit avec fidélité et avec joie comme relation sponsale et féconde de maternité et de paternité. 

Je répète: chaque vocation chrétienne est sponsale, parce qu’elle est le fruit du lien de l’amour dans lequel nous sommes tous régénérés, le lien d’amour avec le Christ, comme nous l’a rappelé le passage de Paul lu au début. A partir de sa fidélité, de sa tendresse, de sa générosité nous considérons avec foi le mariage et chaque vocation, et nous comprenons le sens plénier de la sexualité.

La créature humaine, dans son inséparable unité d’esprit et de corps, et dans sa polarité masculine et féminine, est une très bonne réalité, destinée à aimer et à être aimée. Le corps humain n’est pas un instrument de plaisir, mais le lieu de notre appel à l’amour, et dans l’amour authentique il n’y a pas de place pour la luxure et pour sa superficialité. Les hommes et les femmes méritent plus que cela!

La Parole «Tu ne commettras pas d’adultère», bien que sous une forme négative, nous oriente donc vers notre appel originel, c’est-à-dire l’amour sponsal total et fidèle, que Jésus Christ nous a révélé et donné (cf. Rm 12, 1).

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