Le sultan turc face à l’Europe

Publié le 06 Avr 2017
Le sultan turc face à l’Europe L'Homme Nouveau

Plusieurs meetings politiques turcs interdits en Allemagne et aux Pays-Bas sont la cause de fortes tensions entre ces pays et Ankara. L’Europe paie pour les illusions de ses dirigeants politiques à l’égard d’une Turquie restée majoritairement islamiste. Mais aussi de leurs errements en matière d’immigration.

Nous assistons à une escalade de tensions entre la Turquie et les pays européens, nourrie par Recep Tayyip Erdogan. Le Président turc veut en effet renforcer un peu plus ses pouvoirs, en changeant la constitution par référendum le 16 avril prochain. Pour ce faire, il ne dédaigne pas les voix des importantes communautés de migrants turcs installées en Europe, principalement en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique et en France.

Des émissaires déboutés

Dépêchés dans ces pays pour exhorter leurs compatriotes à voter oui au projet présidentiel, certains membres du gouvernement se sont heurtés à un refus. Dès le début du mois de mars, plusieurs villes allemandes ont interdit les meetings prévus. Le 11 mars, Mevlut Cavusoglu, ministre des Affaires étrangères turc, et Fatma Betül Sayan Kaya, ministre de la Famille, étaient expulsés des Pays-Bas.

La réaction des Néerlandais et de nos cousins Germains est à la hauteur du mécontentement montant contre la Turquie. Aux yeux de nos gouvernements, non seulement elle fricote avec Moscou mais, de plus, elle organise un régime aux airs de parti unique sous coloration islamiste renforcée. Qu’elle embastille du même coup opposants et journalistes, sous prétexte de complots ourdis contre l’État, ne fait qu’amplifier le schisme avec les pays européens.

Dans ces conditions on s’étonne qu’à Metz, le 12 mars, le chef de la diplomatie turque ait pu participer à un rassemblement public avec ses compatriotes. La France, il est vrai, est très engagée en Syrie contre ­Daech. Suscitant l’hostilité d’Erdo?an, elle risquait de perdre un accès essentiel au champ de bataille pour ses services de renseignements. En clair, d’affaiblir ses soldats présents sur le terrain.

L’impossibilité à gérer notre relation avec Ankara est le fruit de notre inconséquence. Avoir fermé les yeux sur les pulsions impérialistes et islamistes de la Turquie, sous couvert de la prétendue laïcité d’une minorité et pour se donner le prétexte de la faire entrer dans l’Europe, relevait de la folie furieuse.

Aujourd’hui, nous payons au prix fort cette aberration qui s’ajoute à une autre, notre politique migratoire. Ligotés par des traités et des directives européennes, nos pays ne peuvent même plus s’opposer efficacement à des vagues migratoires non désirées. Pour ralentir celles venant de Syrie, voire d’Irak et même d’Afghanistan, nous avons fait appel à la Turquie. Du même coup, nous sommes devenus les otages de ce pays.

À cela s’ajoute la présence d’au moins trois millions et demi de Turcs sur le sol européen. Dont 800 000 en France si l’on en croit le journal turc Zaman du 20 janvier 2014 (Le journal Zaman France et son site Internet ont cessé leur parution depuis le 29 août 2016 afin de ne « plus alimenter le prétexte d’une importation en France de la politique turque et de ses règlements de compte » ndlr). Or, cette population apparaît très encadrée par Ankara, autant par le personnel religieux envoyé par le ministère compétent que par les associations nationalistes. On l’a bien vu à Rotterdam où, après l’annulation du meeting en faveur d’Erdo?an, la police a dû intervenir avec des canons à eau pour démanteler une manifestation d’un millier de Turcs en colère.

Quand nous entendons Erdo­?an lancer des insultes contre l’Allemagne et les Pays-Bas, les accusant de se comporter en nazis et d’abriter des terroristes anti-turcs, le pire est à craindre. D’abord en raison de la sensibilité de la fibre nationaliste turque. Ensuite parce que nous pouvons assister à une réédition de la mobilisation islamiste organisée par l’Iran en Europe au début des années quatre-vingt.

Or, en France, nous sommes dans un contexte de forte tension sociale, avec toute une partie de la population musulmane prête à descendre dans la rue pour casser. Nous l’avons vu dans l’affaire du jeune Théo. Erdo?an peut allumer la mèche et, au nom d’un islam sunnite identitaire, mettre en mouvement des milliers d’Africains et de Maghrébins, nous acculant à une véritable guerre civile.

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Ballon espion : la Chine fait des bulles

rier, un ballon est signalé dans le ciel américain. Il est abattu par l’armée le 4 dans les eaux territoriales. Puis le 10 février, des avions de chasse F22 descendent un objet volant près des côtes de l’Alaska. Le 11, le Canada demande aux États-Unis d’intervenir pour faire feu sur un autre engin au-dessus du Yukon. Enfin, le 12, c’est à la verticale du Michigan (États-Unis) qu’un nouvel engin est abattu.

Le 8, Washington accusait la Chine de lancer « une flotte de ballons destinés à des opérations d’espionnage » à travers le monde. Étions-nous à la veille d’un nouveau conflit diplomatique ?

Très vite, Pékin s’avouait le propriétaire du premier ballon et déclarait que ce dernier transportait des équipements pour recueillir « principalement » des données météorologiques. On retiendra que « principalement » ne veut pas dire exclusivement. Même si les Chinois affirment que leur aérostat était sorti involontairement de sa trajectoire, les Américains s’inquiétaient d’autant plus qu’il était passé au-dessus du Montana où sont implantés leurs missiles nucléaires.

La suite nous en dira sans doute plus puisque l’aéronef a été récupéré pour analyse. Néanmoins, on sait déjà que sa charge était plus importante que celle d’un ballon météorologique normal. D’autre part, la nacelle était équipée d’un système de guidage qui rend peu crédible la thèse d’un écart involontaire de trajectoire.

La Chine n’en a pas moins répliqué avec fermeté : en exprimant « son fort mécontentement, elle proteste contre l’utilisation de la force par les États-Unis ».

Cependant, le mystère reste entier pour les trois autres engins volants non identifiés. Pékin n’en reconnaît pas la paternité et Joe Biden lui-même a déclaré : « Ces trois objets sont vraisemblablement liés à des entreprises privées, à des activités de loisirs ou à des institutions de recherche. » Peut-être, mais personne n’a élevé la voix pour se plaindre ou signaler la destruction de son ou de ses équipements. Ensuite, le président des États-Unis a donné un peu vite une explication logique et possible à ce mystère.

Mieux, il cherche à rassurer, disant qu’il n’y a pas une soudaine augmentation d’objets volants dans le ciel américain mais une meilleure capacité à les détecter avec les radars. Au point que l’on se demande s’il ne couvre pas autre chose. Dans son registre, le général Glen VanHerck, patron des forces aérospatiales américaines, en rajoutait. À une question sur un possible envoi d’OVNI par des extraterrestres, il répondait « n’avoir rien écarté à ce stade ». La Maison Blanche s’est vue obligée de démentir cette hypothèse.

La question se pose : l’armée américaine aurait-elle détruit le matériel d’expériences secrètes plutôt que de les révéler au public ? Ce ne serait pas la première fois, en raison du cloisonnement des informations sur de telles opérations. Un autre détail pourrait aller dans ce sens pour les trois autres aéronefs : alors que les restes du premier ont été retrouvés, l’armée américaine a déclaré ses recherches infructueuses pour les trois autres.

Reste à s’interroger sur la légitimité, en termes de droit, du survol d’un territoire par des ballons d’un pays tiers et, non moins important, de leur destruction par le pays survolé. Chaque État jouit de « la souveraineté complète et exclusive sur l’espace aérien au-dessus de son territoire », selon les règles de l’aviation civile. Les appareils civils sont libres de circuler, mais les appareils militaires peuvent être interceptés. Et s’il s’agit d’un appareil espion qui se donne une apparence civile ?

Néanmoins, et c’est un autre problème, selon Pékin, depuis l’année dernière, « des ballons américains ont survolé la Chine à au moins dix reprises ». Le hiatus est sans doute là : Washington n’accepte pas qu’on lui renvoie la politesse.

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