Avec joie et action de grâces, le Pape a reçu le 18 mars tous les membres de la famille camillienne. À l’instar de leur fondateur, le Pape leur a demandé de conserver toujours le sens de l’humour. Napolitain, Camille de Lellis, fils de soldat, d’une vitalité exceptionnelle en raison de sa taille, partit à 20 ans pour aider Venise en lutte contre le Turc. Suite à une mauvaise blessure à la jambe, il n’assista pas à la bataille de Lépante. Il mena alors une vie de bohème qui le conduisit à l’hôpital Saint-Jacques-des-Incurables à Rome, où il trouva dans l’abjection son chemin de Damas, touché qu’il fut jusqu’au fond de lui-même à la vue des misères dans lesquelles croupissaient les malades. Infirmier volontaire à Saint-Jacques, il assista le supérieur. En 1582, il groupa quelques compagnons attirés par le même idéal et fonda les Camilliens. Ordonné prêtre, il célébra sa première messe le 10 juin 1584. En 1586, il fixa son siège près de l’église Sainte-Madeleine, et vécut là jusqu’à sa mort. Sixte-Quint approuva le nouvel ordre religieux consacré au service des malades. Grégoire XIV leur donne la Règle de saint Augustin. Atteint de maux d’estomac et de tête, de calculs, d’ulcères, de furoncles quasi permanents, saint Camille de Lellis passait dans les salles, malade parmi les malades, attentif aux besoins de chacun, acceptant sans se plaindre les rebuffades de ceux qu’il servait : « Je voudrais, disait-il, un cœur grand comme le monde », tant sa charité était insatiable. Il mourut le 14 juillet 1614, laissant quinze maisons, huit hôpitaux et deux cent quarante-deux profès. En 1886, Léon XIII le déclare patron des infirmiers et Pie XI patron des hôpitaux avec saint Jean de Dieu.
Il fallait dire cela sur le fondateur pour comprendre les allusions du Pape : « Vous, vous n’aurez jamais d’ulcère à l’estomac ». Ce qui peut arriver quand même ! En tout cas, quand la maladie nous frappe, on ressent le besoin urgent d’avoir près de soi des personnes entièrement dévouées. La crise des hôpitaux naît en partie du manque de bénévolat en ce domaine. Autrefois, les religieux et religieuses accomplissaient près des malades, gratuitement et pour l’amour de Dieu, un service de compassion, par imitation du Bon Samaritain. Maintenant, il n’en est plus ainsi ! C’est pourquoi le Pape encourage les camilliens à demeurer fidèles à leur propre vocation. En pratiquant la charité et les œuvres de miséricorde, ils annoncent le règne de Dieu près des malades, les préparant souvent à bien mourir et quand ce n’est pas le cas, à bien vivre pour bien mourir. Et l’Église « experte en humanité », a reconnu, par la voix des papes, ce charisme particulier comme un vrai don du Saint Esprit, car dans l’Église tous les vrais charismes proviennent du Saint Esprit. Aussi le Pape encourage-t-il ces religieux à être fidèle au charisme de leur fondateur. À la suite de Jésus, « servir c’est régner ». C’est ce que font les camilliens au bénéfice de l’humanité souffrante à travers le monde. Quand ce charisme est vécu jusqu’à l’héroïsme, il devient source de grande sainteté. On touche là la raison profonde de l’actualité dans l’Église d’un tel charisme qui annonce l’Évangile de la charité. Oui, on ne pourra jamais supprimer ce charisme : annoncer au monde d’aujourd’hui l’amour miséricordieux du Christ envers les malades. Mais pour être efficace, ce charisme doit également être vécu dans la communion et l’unité. Seule une telle communion peut être source de grâce et de fécondité. Que Marie vienne en aide à tous ceux qui se dévouent au service des malades.