Mère Teresa, la sainte de la Miséricorde

Publié le 17 Sep 2016
Mère Teresa, la sainte de la Miséricorde L'Homme Nouveau

La canonisation de Mère Teresa, aux applaudissements du monde entier, restera sans doute un épisode phare de cette Année de la miséricorde. Tout le monde sait combien elle a pratiqué les œuvres de miséricorde à la perfection. Certains s’arrêtent malheureusement aux seules œuvres corporelles ; pourtant, elle demeure aussi pour nous un modèle éminent des œuvres spirituelles, spécialement de la prière et du pardon. Beaucoup connaissent sa vie, du moins dans ses grandes lignes. Aussi nous attacherons-nous de préférence avec le Pape dans son homélie du 4 septembre, à analyser de plus près comment elle a répondu de façon héroïque à la volonté du Seigneur, même si ce fut pendant près de cinquante ans dans la nuit totale de la foi.

Un signe de contradiction

Comme tous les saints, en s’identifiant au Christ, Mère Teresa nous apparaît avant tout comme un signe de contradiction. Le Pape nous le montre en partant de la question posée par le livre de la Sagesse : « Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? » Toute vie est en effet un mystère, du fait même de la liberté qui rend l’homme capable de refuser l’amour de Dieu et de ne pas accueillir sa volonté jugée incomprise. Dans la grande aventure de la Rédemption, il faut toujours se souvenir qu’il y a et qu’il y aura jusqu’à la fin du monde deux protagonistes : Dieu et l’homme. Dieu offre à l’homme son amour et celui-ci doit faire un choix qui engage son salut éternel. Mais pour accueillir l’amour de Dieu, une seule réponse est possible : celle de l’obéissance, à la suite du Christ. Mais comment savoir ce qui plaît véritablement au Seigneur ? L’Écriture, principalement les Prophètes et les Évangiles, nous donnent la réponse à cette question essentielle. Ce qui plaît au Seigneur c’est la pureté du cœur dans lequel Dieu reconnaît l’image de son Fils, Incarnation de la miséricorde. Dieu « nul ne l’a jamais vu, son Fils unique nous l’a fait connaître », écrit saint Jean. Et Jésus demeurera toujours reconnaissable dans les pauvres. Que l’on se souvienne du treizième invité de saint Grégoire qui se révéla, finalement, être le Christ lui-même. C’est ce que, dans le concret du terrible quotidien, Mère Teresa a pratiqué jusqu’à sa mort avec une charité sans faille, expression parfaite de sa foi invincible. C’est parce qu’elle a servi le Christ caché dans le plus pauvre, qu’elle exprima de façon visible au monde la miséricorde Dieu. Le Christ ne demande pas en effet la fidélité d’un jour, mais bien la fidélité de toute une vie. Cela réclame un engagement radical, sérieux et continu et qui passe inexorablement par la Croix. Mais cette fidélité engendre la joie pour soi et pour les autres. Plus le renoncement est vrai et total, plus il est rédempteur et plus il est rédempteur, plus il est source de joie.

Tout cela Mère Teresa l’a parfaitement manifesté au cours de toute sa vie, en étant constamment une dispensatrice généreuse de la miséricorde divine. Son secret : considérer chaque être humain comme une personne créée à l’image de Dieu qui connaît son propre nom. Le Pape insiste heureusement sur le fait que notre sainte s’est dépensée sans cesse pour défendre la vie. On connaît sa réponse fulgurante après la tragédie du Heysel : « Il n’est pas étonnant qu’on en arrive là quand on tue les enfants dans le sein de leur mère ! » Quelques années auparavant, à l’Onu, elle avait combattu avec force l’avortement. L’enfant dans le sein de sa mère est peut-être l’une des périphéries existentielles les plus oubliées de notre époque. Avec Mère Teresa, prions Marie et demandons lui d’avoir toujours le sourire en pratiquant les œuvres de miséricorde.

L’homélie du Pape

« Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? » (Sg 9, 13).

Cette interrogation du livre de la Sagesse, que nous avons écoutée dans la première lecture, nous présente notre vie comme un mystère, dont la clef d’interprétation n’est pas en notre possession. Les protagonistes de l’histoire sont toujours deux : Dieu d’une part et les hommes de l’autre. Nous avons la tâche de percevoir l’appel de Dieu et, ensuite, d’accueillir sa volonté. Mais pour l’accueillir sans hésitation, demandons-nous : quelle est la volonté de Dieu ?

Dans le même passage du livre de la Sagesse, nous trouvons la réponse : « C’est ainsi que les hommes ont appris ce qui te plaît » (v. 18). Pour authentifier l’appel de Dieu, nous devons nous demander et comprendre ce qui lui plaît. Bien souvent, les prophètes annoncent ce qui plaît au Seigneur. Leur message trouve une admirable synthèse dans l’expression : « C’est la miséricorde que je veux et non des sacrifices » (Os 6, 6 ; Mt 9, 13). Toute œuvre de miséricorde plaît à Dieu, parce que dans le frère que nous aidons nous reconnaissons le visage de Dieu que personne ne peut voir (cf. Jn 1, 18). Et chaque fois que nous nous penchons sur les besoins de nos frères, nous donnons à manger et à boire à Jésus ; nous vêtons, nous soutenons et nous visitons le Fils de Dieu (cf. Mt 25, 40). En somme, nous touchons la chair du Christ.

Vocation à la charité

Nous sommes donc appelés à traduire dans le concret ce que nous invoquons dans la prière et professons dans la foi. Il n’y a pas d’alternative à la charité : ceux qui se mettent au service de leurs frères, même sans le savoir, sont ceux qui aiment Dieu (cf. 1 Jn 3, 16-18 ; Jc 2, 14-18). La vie chrétienne, cependant, n’est pas une simple aide qui est fournie dans le temps du besoin. S’il en était ainsi, ce serait certes un beau sentiment de solidarité humaine qui suscite un bénéfice immédiat, mais qui serait stérile, parce que sans racines. L’engagement que le Seigneur demande, au contraire, est l’engagement d’une vocation à la charité par laquelle tout disciple du Christ met sa propre vie à son service, pour grandir chaque jour dans l’amour.

Nous avons écouté dans l’Évangile que « de grandes foules faisaient route avec Jésus » (Lc 14, 25). Aujourd’hui, ces « grandes foules » sont représentées par le vaste monde du volontariat, ici réuni à l’occasion du Jubilé de la Miséricorde. Vous êtes cette foule qui suit le Maître et qui rend visible son amour concret pour chaque personne. Je vous répète les paroles de l’apôtre Paul : « Ta charité m’a déjà apporté de joie et de réconfort, car grâce à toi…, les cœurs des fidèles ont trouvé du repos » (Phm 7). Que de cœurs les volontaires réconfortent ! Que de mains ils soutiennent ! Que de larmes ils essuient ! Que d’amour mis dans le service caché, humble et désintéressé ! Ce service louable manifeste la foi – manifeste la foi – et exprime la miséricorde du Père qui se fait proche de ceux qui sont dans le besoin.

Radicalité et courage

Suivre Jésus est un engagement sérieux et en même temps joyeux ; cela demande radicalité et courage pour reconnaître le divin Maître dans le plus pauvre ainsi que dans le marginalisé de la vie et pour se mettre à son service. C’est pourquoi, les volontaires qui, par amour pour Jésus, servent les derniers et les démunis n’attendent aucune reconnaissance ni aucune gratification, mais renoncent à tout cela parce qu’ils ont découvert l’amour authentique. Et chacun de nous peut dire : « Comme le Seigneur est venu vers moi et s’est penché sur moi en temps de besoin, de la même manière moi aussi je vais vers lui et je me penche sur ceux qui ont perdu la foi ou vivent comme si Dieu n’existait pas, sur les jeunes sans valeurs et sans idéaux, sur les familles en crise, sur les malades et les détenus, sur les réfugiés et les migrants, sur les faibles et sur ceux qui sont sans défense corporellement et spirituellement, sur les mineurs abandonnés à eux-mêmes, ainsi que sur les personnes âgées laissées seules. Partout où il y a une main tendue qui demande une aide pour se remettre debout, doit se percevoir notre présence ainsi que la présence de l’Église qui soutient et donne espérance ». Et cela, il faut le faire avec la mémoire vivante de la main du Seigneur tendue sur moi quand j’étais à terre.

Mère Teresa, tout au long de son existence, a été une généreuse dispensatrice de la miséricorde divine, en se rendant disponible à travers l’accueil et la défense de la vie humaine, la vie dans le sein maternel comme la vie abandonnée et rejetée. Elle s’est dépensée dans la défense de la vie, en proclamant sans relâche que « celui qui n’est pas encore né est le plus faible, le plus petit, le plus misérable ». Elle s’est penchée sur les personnes abattues qu’on laisse mourir au bord des routes, en reconnaissant la dignité que Dieu leur a donnée ; elle a fait entendre sa voix aux puissants de la terre, afin qu’ils reconnaissent leurs fautes face aux crimes – face aux crimes – de la pauvreté qu’ils ont créée eux-mêmes. La miséricorde a été pour elle le « sel » qui donnait de la saveur à chacune de ses œuvres, et la « lumière » qui éclairait les ténèbres de ceux qui n’avaient même plus de larmes pour pleurer leur pauvreté et leur souffrance.

Un sourire

Sa mission dans les périphéries des villes et dans les périphéries existentielles perdure de nos jours comme un témoignage éloquent de la proximité de Dieu aux pauvres parmi les pauvres. Aujourd’hui, je remets cette figure emblématique de femme et de consacrée au monde du volontariat : qu’elle soit votre modèle de sainteté ! Je crois qu’il nous sera un peu difficile de l’appeler sainte Teresa ; sa sainteté nous est si proche, si tendre et si féconde que spontanément nous continuerons de lui dire : « Mère Teresa ». Que cet infatigable artisan de miséricorde nous aide à comprendre toujours mieux que notre unique critère d’action est l’amour gratuit, libre de toute idéologie et de tout lien et offert à tous sans distinction de langue, de culture, de race ou de religion. Mère Teresa aimait dire : « Je ne parle peut-être pas leur langue, mais je peux sourire ». Portons son sourire le dans le cœur et offrons-le à ceux que nous rencontrons sur notre chemin, surtout à ceux qui souffrent. Nous ouvrirons ainsi des horizons de joie et d’espérance à tant de personnes découragées, qui ont besoin aussi bien de compréhension que de tendresse.

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneEgliseSynode sur la synodalité

La synodalité dans la tourmente

Le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Synode des évêques depuis 2019, se confiait le mois dernier sur le synode et les intentions du Pape pour ce dernier. Il s'est notamment exprimé sur les couples homosexuels et le diaconat féminin, rappelant l'attachement du pape François à la théologie du peuple.

+

synod
A la uneEgliseLiturgie

Pour la liberté entière de la liturgie traditionnelle, en vue du redressement de l’Église

Jean-Pierre Maugendre, Directeur général de Renaissance catholique, propose une campagne internationale pour la liberté entière de la liturgie traditionnelle. Malgré la déchristianisation croissante de la société et la crise de l'Église, il rappelle que celle-ci peut renaître par le biais de la liturgie traditionnelle, dont la sûreté doctrinale et la transcendance ont sanctifié ceux qui nous ont précédés pendant des siècles, et contribuent encore à de nombreuses conversions. À condition de lui redonner une liberté pleine et entière, et non pas seulement une tolérance restrictive. 

+

liturgie traditionnelle