Le 11 mai dernier, la France est donc entrée dans sa première phase de « déconfinement ». Alors que le président Macron a affirmé à plusieurs reprises que notre pays était en guerre, la question s’impose presque d’elle-même : le « déconfinement » signifie-t-il la fin des hostilités ou, seulement, un armistice ? Peu à peu, comme après la défaite de 1940, l’activité économique du pays tente de repartir, dans un contexte global inquiétant. Les spécialistes annoncent déjà une récession qui devrait faire grimper le taux de chômage en France et amputer sérieusement le PIB. Si c’est la paix, elle est chèrement payée. Si, au contraire, c’est un armistice, nous savons qu’il faut s’en servir au mieux pour refaire nos forces, réarmer, déployer nos unités, revoir notre système d’alliances. Bref, préparer la Revanche ! À quoi bon un armistice, sinon ? Mais, puisque le président de la République a utilisé lui-même la thématique guerrière, continuons à filer la métaphore. En période de guerre, il faut éviter d’être confronté à un second front. Or celui-ci existe, justement !
Second front
Et ce second front, c’est le gouvernement qui l’a ouvert pendant le confinement quand il a décidé d’autoriser l’allongement du recours à l’avortement médicamenteux, puis celui de l’avortement chirurgical au-delà du délai légal. Puisque, décidément, il faut en revenir à la thématique de la guerre, comment qualifier cette participation à la mort de Français innocents autrement que d’acte de « collaboration » ? Mais, à vrai dire, il ne s’agit ici que d’une première manche. La seconde se joue dans une sorte de « règlement de comptes à OK Corral ». La crise liée au Covid-19 a, en effet, vu resurgir une nouvelle forme de guerre qui, revisitant la lutte des classes chère à Karl Marx, intégrant la lutte féministe (les femmes devant se libérer de la caste dirigeante masculine) et le combat écologique (la sauvegarde de la terre mère contre la domination humaine), oppose les jeunes aux vieux.
D’un côté, les baby boomers, nés entre 1946 et la première moitié des années soixante. De l’autre, ceux que l’on qualifie de « Génération Z », nés entre 1996 et 2005, ayant grandi dans ce que les Américains résument par les « quatre C » : communication, connexion, collaboration, créativité. Autant dire une génération qui n’imagine pas le monde sans Internet, téléphone et ordinateur portables, et qui est mobile par goût et par nécessité mais aussi en quête perpétuelle de sens à donner à sa vie. Pour beaucoup, leur « icône » (pour parler comme eux) s’appelle Greta Thunberg ; pour d’autres, moins nombreux, Marion Maréchal. Ces derniers ont au moins le mérite de vouloir tenir les derniers fils qui relient le monde d’hier à celui d’aujourd’hui. Ce n’est pas vraiment le cas pour les thuriféraires de Greta !
Leur guerre ? Plongés en permanence dans un horizon matérialiste, les jeunes veulent survivre et sont prêts à reprocher aux vieux le poids économique qu’ils représentent. L’allongement de la durée de vie conduit donc à ce paradoxe dramatique : pour sauver leur peau, les plus jeunes sont prêts à sacrifier celle de leurs parents, sachant qu’ils sont eux-mêmes des vivants en sursis. Leur tour est pour demain.
Génération sauvée !
S’il y a du vrai dans cette présentation, la « cinquième colonne » actuellement à l’œuvre accentue les traits d’une jeune génération qui se voit comme une génération perdue tout simplement parce qu’elle ne pourra pas profiter des mêmes avantages matériels que les précédentes.
Il faut pourtant voir au-delà. Ouvrir d’autres yeux ! Les Psichari ou Hélie de Saint Marc d’aujourd’hui refusent le désespoir comme une bêtise absolue. Voyez les volontaires de « SOS-Chrétiens d’Orient » [1] donnant une année de leur existence ou, moins médiatiques, les Routiers et Guides aînées des divers mouvements de scoutisme classique que l’on croise chaque année à la Toussaint à Vézelay, Paray-le-Monial, Cléry ou dans d’autres hauts lieux spirituels de notre pays. Ou les Goums dans les Causses à partir de Pâques. Sans oublier ces jeunes qui, au sein de séminaires classiques ou au fond des monastères, offrent généreusement leur vie à Dieu.
Jeunesse de son temps mais ardente, tranquillement catholique, prête à trouver les solutions pour renouer les fils entre générations plutôt que d’opter pour le champ putride de la mort. On pourra rétorquer qu’il lui manque la formation, l’expérience, la continuité dans l’engagement. Peut-être ! Mais il est faux de croire qu’elle se voit comme une génération perdue. Au contraire, elle est une génération sauvée. Par le sacrifice du Christ !
[1] Voir Quand des jeunes partent au secours des chrétiens d’Orient, hors-série n° 36-37, 132 p., 14 €.