Comme chaque année, le 15 août dernier, nous avons célébré Notre Dame de l’Assomption, événement qui prend un relief particulier dans notre pays puisqu’il s’agit de la fête patronale de la France, notre véritable fête nationale en quelque sorte.
Dans un petit village de l’Ouest de la France, j’assistais ce jour-là à la procession en l’honneur de la Vierge Marie, restaurée cette année, comme cela se passe dans certains villages et villes de notre pays, loin de l’actualité médiatique. En écoutant le célébrant relire le vœu de Louis XIII, je ne pouvais que constater combien nous nous étions éloignés de cette imprégnation totale de la foi qui faisait qu’un souverain se mette à genoux et demande à la Vierge Marie de protéger son royaume.
Pourtant, un peu plus de cent ans après ce vœu, la Révolution de 1789 se déchaînait et semblait emporter avec elle tout l’édifice religieux, politique et social qui avait constitué la France. Mais de ce laps de cent ans allait aussi éclore ce que Daniel-Rops dénommera le « Grand siècle des âmes » avec ces grandes figures religieuses et ces fondateurs d’ordres que furent, par exemple, Bossuet, Jean-Jacques Olier, saint Claude La?Colombière, sainte Marguerite-Marie et tant d’autres. Parmi cette phalange spirituelle, comment oublier saint Louis-Marie Grignon de Montfort qui évangélisera une partie de ce qui deviendra la Vendée militaire, lui permettant ainsi de puiser dans une foi vive la force de résister au grand bouleversement révolutionnaire ?
De la foi à l’idéologie
Si, aujourd’hui, l’acte de foi public posé par Louis XIII nous semble inimaginable, c’est non seulement que notre pays s’est profondément déchristianisé, mais aussi parce que la Révolution nous a finalement fait passer du règne de la foi à celui de l’idéologie. En emportant le vieil édifice institutionnel, la Révolution, comme l’a bien vu Augustin Cochin, a profondément modifié notre vision des choses, perçues désormais à l’aune d’une pensée constructiviste refusant totalement les données du réel et conduisant de manière quasi mécanique à un conformisme social. C’est au nom de celui-ci, mis en action d’abord par ce que nous appelons aujourd’hui des groupes de pression (lobbys) et que Cochin nommait les « sociétés de pensée », que l’on entend faire passer des projets aussi anti-naturels que la PMA.
Regain de la religion populaire
Mais revenons au 15 août ! La presse dans son ensemble a noté le regain d’affluence du sanctuaire de Lourdes, le Figaro en faisant même son gros titre, en Une de son édition du 14 août. Quant au quotidien La Croix, il notait une hausse de la fréquentation du Pèlerinage national, « à hauteur de 15 % ».
Présidant la 146e édition de celui-ci, Mgr Ravel, archevêque de Strasbourg, s’est réjoui à juste titre du retour de « la religion populaire », marquée par des actes forts de piété, incarnés notamment dans les pèlerinages en l’honneur de la Vierge Marie ou des grands saints. Présent à Saint-Anne d’Auray, à l’occasion du Grand Pardon, les 25 et 26 juillet derniers, j’ai pu voir ainsi, malgré une certaine confusion liturgique, une belle expression de cette foi traditionnelle si mise à mal et moquée après le dernier Concile. On la retrouve également à Rocamadour ou à Pontmain, ailleurs aussi bien évidemment. Cette foi populaire a résisté et elle impose aujourd’hui son dynamisme.
Certes, comme le déclare l’archevêque de Strasbourg, « On gagnera beaucoup à revenir non pas à de petits groupes élitistes, mais à des choses qui peuvent être vécues en même temps par tout le monde – pèlerinages, marches, célébrations… » Encore faut-il préciser ce que l’on entend par là. La foi chrétienne n’est pas une gnose réservée à quelques érudits ou à un groupe d’élus qui auraient reçu la véritable Révélation. Pour autant, les questions cruciales de notre époque le démontrent amplement : les catholiques français ont besoin d’une véritable formation, non seulement au niveau du catéchisme élémentaire, mais plus largement au plan social et politique, dans la conformité à la loi naturelle et à l’enseignement traditionnel de l’Église. La ferveur ne saurait suffire face au rouleau compresseur de l’idéologie et du conformisme social qui en découle. Aujourd’hui, l’anti-intellectualisme serait aussi absurde que l’opposition à la religion populaire des années 1970.
C’est ainsi que cet été, avec Adélaïde Pouchol, nous sommes intervenus à Granville, dans le cadre du festival « Mission on the Roc », qui associait conférences et piété populaire. Nous continuerons toute cette année avec L’Homme Nouveau d’apporter à nos lecteurs les éléments de discernement et de formation face aux enjeux cruciaux du moment. Et il n’est pas dit que nous n’élargissions pas notre gamme dans ce domaine. Mais, comme le disait Kipling, pour l’instant, c’est une autre histoire… Bonne rentrée à tous !
Éditorial paru dans notre numéro 1693 en vente dans notre boutique