Notre quinzaine : L’Église de demain et le salut des âmes

Publié le 02 Sep 2022

Étrange ! Il y a quelques mois un bruit médiatique, d’origine italienne, s’était enflé, annonçant la démission du pape François, fin août 2022. La rumeur s’appuyait sur son projet de voyage à L’Aquila, dans les Abruzzes. C’est dans cette ville, victime en 2009 d’un tremblement de terre, que se trouve, en effet, le tombeau du pape Célestin V, le premier à avoir renoncé à sa charge en 1294. De là à voir un signe et un symbole… Certains commentateurs ont voulu croire que leur prédiction se réaliserait.

Le dimanche 28 août, François s’est bien rendu à L’Aquila, mais contrairement à Benoît XVI il n’y a pas déposé son pallium au tombeau de Célestin V, annonce prémonitoire de sa démission en 2013. En revanche, il a créé la veille 21 nouveaux cardinaux, renforçant ainsi le Sacré Collège et marquant de son empreinte décisive l’avenir de l’Église. Parmi eux, un Français, en la personne du cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille.

Malade et handicapé, contraint de se déplacer dans un fauteuil roulant, le Saint-Père n’en affiche pas moins une grande détermination. Il entend transformer l’Église, en poussant à son terme les conceptions nées au moment de Vatican II : une Église pauvre et purifiée des scories du passé, à l’écoute du monde plutôt qu’enseignant du haut de la chaire de Vérité, agissant avec humilité et disponible pour les grandes causes qui touchent l’humanité. Ce programme de transformation n’est pas encore abouti. Il doit d’ailleurs s’appliquer à deux niveaux : en changeant les mentalités des catholiques et en modifiant les structures mêmes de l’Église. François attend bien sûr des nouveaux cardinaux qu’ils entrent dans cette perspective, même si chacun garde sa propre personnalité, façonnée par des itinéraires et des cultures bien différents. N’empêche ! François prépare bien l’Église de demain. Sur les 132 cardinaux actuellement électeurs en cas de conclave, 83 ont été créés par le pape actuel.

Vous avez dit « salut des âmes » ?

Mais l’Église, on le sait, ne se limite ni à la papauté ni au Sacré Collège ni aux structures créées pour soutenir sa mission. Corps mystique du Christ, elle est là, au-delà des membres qui la composent ou des structures qui la soutiennent, pour donner la foi qui elle-même procure la vie éternelle. Toute réforme en son sein, toute action accomplie en son nom, tout projet porté par ses membres, ne devrait finalement exister que dans la perspective du salut des âmes. Dans son austérité même, le Code de droit canonique le souligne, en rappelant que « le salut des âmes doit toujours être dans l’Église la loi suprême ». À l’heure où l’on parle beaucoup du renouveau de l’Église, ce souci semble pourtant avoir (presque) totalement disparu. Il y a là matière à interrogation.

Pour une éducation chrétienne intégrale

Ce n’est d’ailleurs pas la seule. Accueillant aujourd’hui un grand nombre d’enfants de France, parfois très éloignés de l’Église, l’école catholique devrait se placer plus que jamais dans cette perspective. Le fait-elle ? Malgré des exceptions notables, ce n’est majoritairement pas le cas. L’avertissement de Pie XI, en 1929, dans son encyclique sur l’éducation chrétienne de la jeunesse (Divini Illius Magistri) reste à ce sujet d’une brûlante actualité : « au lieu de diriger leurs visées vers Dieu, premier principe et fin dernière de tout l’univers, ils se replient et se reposent sur eux-mêmes, s’attachant exclusivement aux choses terrestres et éphémères. C’est pourquoi leur agitation sera continuelle et sans fin tant qu’ils ne tourneront pas leurs regards et leur activité vers l’unique but de la perfection qui est Dieu ».

Des parents inquiets se sont tournés de ce fait vers les écoles indépendantes (ou hors contrat) d’inspiration catholique, soucieux d’y trouver un enseignement et un climat conformes aux exigences de la foi catholique. Dans ce numéro, Michel Valadier, le nouveau directeur de la Fondation pour l’école, explique largement les raisons et les besoins de ces écoles indépendantes. Il est clair que pour celles d’entre elles qui se réclament de la foi catholique, l’enjeu de la liberté scolaire ne se limite pas à la pédagogie, au choix des programmes et des professeurs, ni même au climat moral. Toutes les écoles catholiques, dépendantes de l’enseignement diocésain ou indépendantes, sont appelées à être missionnaires. C’est-à-dire à œuvrer dans la perspective du salut des âmes. L’enjeu ne touche d’ailleurs pas seulement les individus eux-mêmes et leurs familles. Plus largement, c’est l’avenir de l’Église qui se prépare à travers une éducation intégralement chrétienne.

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneÉditorialDoctrine socialeLettre Reconstruire

Subsidiarité et bien commun

Édito de la Lettre Reconstruire n°35 | Ce nouveau numéro de Reconstruire continue, à travers la rubrique « Questions de principe », à aborder l’enseignement pontifical à propos de la subsidiarité. Formulé scientifiquement par Pie XI, mais déjà présent chez Léon XIII, le principe de subsidiarité n’a cessé de prendre une place grandissante dans le corpus social catholique. Au point, comme nous le soulignons dans ce même numéro, d’être introduit indirectement dans le nouveau Code de droit canonique (1983) et donc dans la vie de l’Église elle-même.

+

subsidiarité bien commun
Éditorial

Notre quinzaine : Quand on n’a que l’amour

Éditorial du Père Danziec | Notre monde est-il plus violent qu’autrefois ? Prenons garde de répondre trop vite par l’affirmative. Le refrain qui consiste à dire, en tout et nécessairement, « c’était mieux avant » mériterait certainement nuance et contextualisation. Face aux déchaînements de violence propres à l’atmosphère postchrétienne, il s’agit – plus que jamais – de devenir lumière dans les ténèbres. Comment cela ? En prenant la résolution vigoureuse d’accueillir en nous l’amour de Dieu.

+

amour
Éditorial

Notre quinzaine : L’espérance peut-elle être politique ?

Le Christ, notre véritable espérance, est ressuscité. Alléluia ! Nous venons à nouveau de proclamer cette bonne nouvelle qui n’est pas seulement celle d’un jour et d’une fête, fût-elle la plus grande du calendrier chrétien, mais celle qui rejaillit et irrigue constamment notre vie. Nous ne pouvons pas perdre de vue la finalité ultime d’un vrai combat politique qui est le règne du Christ sur les personnes, les familles et la société. Ne perdons pas courage ! Le but est lointain mais nous devons œuvrer à son avènement car notre espérance se fonde sur le Christ, mort et ressuscité.

+

espérance
ÉditorialDoctrine socialeLettre Reconstruire

Avortement : il est urgent de remonter à la source

Lettre Reconstruire n°34 – Edito | Le lundi 4 mars, le droit à l’avortement est officiellement entré dans la Constitution de la République française. Votée en 1975 comme une dépénalisation et une exception, la loi libéralisant l’avortement s’est muée au fil du temps en un véritable droit positif dont la remise en cause s’est vue de plus en plus entravée. Sans aucun doute, cette défaite pour la vie et pour le militantisme anti-avortement aura des conséquences dans les mois ou les années à venir. Un examen de conscience et une remise en cause des méthodes employées et de la doctrine sur laquelle se fonde ce combat sont nécessaires.

+

constitutionnalisation avortement
ÉditorialBioéthique

Notre quinzaine : La vérité, à temps et à contretemps

Édito du Père Danziec | Dans sa fameuse lettre Que dire à un jeune de vingt ans, Hélie de Saint Marc suggère à son jeune lecteur de « ne pas s’installer dans sa vérité et de vouloir l’asséner comme une certitude »mais lui conseille plutôt de « savoir l’offrir en tremblant comme un mystère ». Permettez-moi, à l’occasion de cet éditorial, de me plier à une rapide étude de la citation d’Hélie de Saint Marc en tentant de l’appliquer au drame de la constitutionnalisation de l’avortement qui fait la couverture de ce numéro.

+

vérité