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Le 15 juin dernier, Mgr Michel Aupetit a célébré la messe à Notre-Dame de Paris pour la dédicace de la cathédrale. Le fait n’aurait pas été un événement si Notre-Dame n’avait pas été récemment la proie des flammes. Avec force, l’archevêque de Paris a rappelé la destination première de cet édifice dédié d’abord au culte catholique. Très justement, il a souligné qu’« une culture sans culte devient une inculture ». Et, c’est effectivement à ce stade que nous sommes parvenus aujourd’hui.
On se souvient que Christophe Castaner, le ministre de l’Intérieur qui est aussi le ministre des Cultes, avait osé déclarer le 16 avril dernier : « ce que je sais, c’est que Notre-Dame n’est pas une cathédrale, c’est notre commun. » Plus récemment, faisant le point sur « l’année maçonnique », Jean-Philippe Hubsch, Grand Maître du Grand Orient de France (GODF), affirmait tranquillement, selon le quotidien L’Opinion (17 juin 2019) que « Ce monument historique national est un lieu de culture. Nous n’y voyons pas un lieu de culte ». Une fois de plus, les maçons confirmaient combien notre système politique repose sur une conception idéologique de l’existence, allant jusqu’à nier ce que le sens commun perçoit, lui, immédiatement.
On comprend mieux dès lors la volonté de Mgr Aupetit de ne pas se laisser confisquer Notre-Dame de Paris et de réaffirmer clairement la catholicité du lieu. Il y a urgence ! Dans une société sans repères ni racines, l’offensive libérale-libertaire entend profiter de toutes les faiblesses, de tous les moments d’inattention, de la simple bonne volonté, elle-même. On l’a vu avec « l’affaire » Vincent Lambert. Sur un autre plan, on y assiste aussi avec « l’affaire » Notre-Dame de Paris.
La tête de pont du catholicisme en France
La bonne nouvelle – car il y a une bonne nouvelle – vient justement de la capacité de réaction. On le voit avec l’homélie de l’archevêque de Paris lors de cette première messe à Notre-Dame de Paris depuis l’incendie. Plus globalement, on le voit également avec la volonté d’engagement de ce que le sociologue Yann Raison du?Cleuziou appelle dans un livre récent (Une contre-révolution catholique) l’émergence des « catholiques observants », objet du dossier de ce numéro.
On pourra bien évidemment discuter du qualificatif qui fleure bon le communautarisme. On pourra tout autant épiloguer sur le terme de « contre-révolution » qui, non content d’emprunter au vocabulaire politique, risque également de conduire le lecteur vers quelques désappointements. Mais au-delà de ces aspects, le sociologue démontre, à la suite d’une longue enquête, que les forces vives du catholicisme français – en bref, la minorité de la minorité – occupent désormais une place centrale dans l’univers catholique français.
Par le nombre ? Pas d’abord et pas essentiellement ! Par son poids dans la hiérarchie épiscopale ? Pas encore, aurait-on tendance à dire ! Mais c’est une question de temps. Les jeunes prêtres d’aujourd’hui, qui pour beaucoup sont issus des « catholiques observants » ou en sont proches, n’ont pas le profil de leurs aînés, ni leurs œillères idéologiques. Non, c’est surtout pour leur adhésion décomplexée aux exigences de la foi catholique et par le souci de l’engagement pour les traduire dans la société que ces fameux « observants » constituent la tête de pont du catholicisme en France. Hasard ? Ils ont su transmettre la foi et la sociabilité catholique. Qui sont-ils ? Ils ont mille visages et différents lieux de repères. Mais, si l’on se réfère au travail de Yann Raison du Cleuziou, c’est aussi nous et vous. Nous ne le savions pas, mais nous sommes des « catholiques observants ».
Il faudra compter avec nous
Faut-il accepter sans discuter l’étiquette ? Pas si simple, bien sûr. Comme toute étiquette, elle enferme ou ne dit qu’un aspect d’une réalité évidemment plus complexe. Son utilité est qu’elle indique une tendance et un dynamisme. À ce titre, ne la rejetons pas ! À l’avenir, l’Église de France, qui nous boude encore, devra compter sur nous et avec nous. Elle ouvrira peut-être alors les yeux sur le travail qui est mené avec ténacité pour continuer à transmettre le trésor de la foi, de la pensée et de la culture chrétienne, en se confrontant aux problématiques présentes. Comme en témoignent tous les quinze jours chacun de nos numéros, de nos hors-série, de nos livres ou nos émissions vidéos. Un énorme travail effectué pour vous et grâce à vous. Bon été !
Notre dernier numéro dans lequel est paru cet éditorial est disponible ici.
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