Padre Pio et la France : une histoire de foi

Publié le 27 Sep 2018
Padre Pio et la France : une histoire de foi L'Homme Nouveau

[Cet article est extrait de notre Hors Série double réalisé pour le cinquantenaire de la mort de Padre Pio et le centenaire de sa stigmatisation]

Dès les années vingt les capucins français contribuèrent à la renommée de Padre Pio qui opéra plus tard un miracle à Alençon, ville natale de Thérèse de Lisieux qu’il affectionnait. Parmi ses fils spirituels et ses soutiens fidèles figure le Père Derobert pour qui il était le transparent de Dieu. L’Association « Les Amis de Padre Pio », à Nice notamment, œuvre également à la diffusion de son œuvre terrestre et spirituelle.

C’est bien connu, l’on ne prête qu’aux riches. Pourquoi s’étonner, alors, que courent sur Internet et ailleurs tant de prophéties attribuées à Padre Pio et qui n’ont, selon toute vraisemblance, aucun fondement ? 

Des prophéties douteuses

Dans ce fatras circulent en bonne place diverses annonces, reprises sous une forme ou une autre, selon la qualité des traductions, liées à l’histoire du Grand Monarque, l’hypothétique survivance de Louis XVII, un prétendu testament secret de la duchesse d’Angoulême et les origines davidiques des souverains français. Tout cela pour dire que Padre Pio aurait annoncé le retour du Roi perdu, la chute de la République et les nombreux maux que la France infidèle s’est méritée.

Rien de nouveau là-dedans et, surtout, rien qui puisse vraisemblablement être associé au stigmatisé du Gargano qui, à de rares exceptions près, fit toujours en sorte de cacher son don de lecture de l’avenir et se mêla fort peu de politique, que ce soit en Italie, ou, à plus forte raison, à l’étranger.

Ces extrapolations découleraient, pour l’essentiel, de deux mots du Padre, prononcés à une date et dans des circonstances indéfinies : « Pauvre France ! ». Là encore, il n’y a pas motif à s’étonner, pas davantage à chercher à ces paroles le moindre caractère surnaturel. Padre Pio, adversaire de la franc-maçonnerie, ne pouvait éprouver d’attirance pour la IIIe République, ni pour les suivantes, et il ne faisait, en s’exprimant ainsi, que répéter à sa manière les avertissements des papes Pie IX ou Pie X appelant de leurs vœux une restauration monarchique qui « laverait la Fille aînée de l’Église des souillures qui l’ont défigurée ». Ou même le message de La Salette, bien connue, à l’époque, en Italie du Sud, où Mélanie Calvat, la voyante, avait fini sa vie sous la protection de saint Annibal Marie de France, qui œuvra à la sanctification du clergé, conformément aux plaintes de Notre Dame en 1846 concernant chez certains prêtres « un cloaque d’iniquité ».

S’il ne faut pas chercher à décrypter l’avenir de notre pays dans les propos du saint, il est loisible, en s’appuyant sur des faits plus tangibles, de saisir ce que fut sa relation personnelle à la France et aux Français.

Pas de visites matérielles mais… surnaturelles

D’un strict point de vue historique et matériel, Padre Pio, qui n’a jamais quitté son Italie du Sud natale, sinon pour accompagner sa sœur Graziella lors de son entrée chez les Brigittines à Rome, n’a jamais mis les pieds en France.

D’un point de vue surnaturel, c’est une tout autre affaire. L’on sait ce qu’il en est des bilocations de Padre Pio, certainement plus nombreuses que la douzaine toujours citée en exemple en raison de leur aspect spectaculaire. Si, la plupart du temps, Padre Pio se retrouvait envoyé par Dieu au secours d’âmes en détresse, ou, s’il accourait à un pressant appel à l’aide qui lui était adressé, se portait spontanément auprès de gens en danger, il lui est aussi arrivé de se rendre volontairement en des lieux de pèlerinage où il ne pouvait normalement aller. Cela aurait été le cas, et souvent, de Lourdes, cité mariale où il se transportait lorsqu’il souhaitait prier devant la grotte des apparitions. Sa remarquable connaissance des sanctuaires accréditait ces voyages mystiques.

Le miracle d’Alençon

Un autre « séjour » en France est bien attesté par ses bénéficiaires qui le rendirent public en 1958. Le 29 janvier 1957, à Alençon, le petit Daniel Batonnier, un garçonnet de 6 ans, est atteint de méningite cérébro-spinale et son état jugé désespéré. Sur le conseil de voisins, un télégramme est adressé à San Giovanni Rotondo, à l’intention de Padre Pio à qui sont demandées « des prières pour un enfant mourant ». Il est 13 h 30. À 15 h, Daniel, dont la fièvre atteint 41°, agonise. À 16 h, soudain, sans explication médicale, la fièvre tombe, l’enfant est sauvé. Le lendemain, remarquant une vie de Padre Pio que sa mère s’est procurée et qu’elle a posée sur le lit, l’enfant dit en souriant : « Tu sais, Maman, je le connais, ce curé-là. Il est déjà venu me voir deux fois au petit matin, et même qu’il chantonnait doucement pour ne pas me faire peur. Et puis, il est parti par la porte, comme toi. » 

Stupeur de Mme Batonnier qui, non pratiquante, ignore tout de la bilocation et tout de Padre Pio. Le miracle sera révélé par le Père Onfroy, dans le numéro de mars-avril 1958 de sa revue, Notre-Dame des temps nouveaux.

Outre la guérison subite et inexpliquée de l’enfant, qui relève effectivement du miracle et entraînera d’ailleurs le mariage religieux des parents, il faut noter un petit détail, lié à l’une des grandes amitiés françaises du Padre : son miracle s’est produit à Alençon, ville natale de Thérèse de l’Enfant-Jésus, qu’il aime d’une tendresse de prédilection. Plusieurs années avant la béatification de la carmélite, à une visiteuse qui lui demandait de bénir l’une des nombreuses images diffusées par le Carmel de Lisieux, Padre Pio aurait répondu : « Je ne puis la bénir, Madame, parce que l’Église ne s’est pas encore prononcée, mais vous avez raison de prier cette religieuse : c’est une grande sainte. »

D’ailleurs, plusieurs personnes assurèrent sous la foi du serment avoir vu et reconnu Padre Pio place Saint-Pierre en 1925, le jour de la canonisation de sainte Thérèse de Lisieux… Il n’avait pas voulu manquer l’évènement.

La renommée de Padre Pio a tôt gagné la France. Si, obéissant aux ordres de leurs supérieurs, les capucins italiens ont tenté de garder d’abord le silence sur le stigmatisé, leurs confrères français ont signalé son cas dans leurs publications dès le début des années vingt, contribuant puissamment à le faire connaître à l’étranger.

Enfin, parmi les grands soutiens et fils spirituels du Padre, se trouve, à partir des années cinquante, un jeune prêtre français, l’abbé Derobert qui, sans rancune pour la gifle magistrale expédiée par le Padre pour le punir de douter de la présence de son ange gardien, se fera, jusqu’à la fin de ses jours, l’un de ses défenseurs les plus ardents. Son témoignage audiovisuel ou écrit constitue un document de première main sur la spiritualité et la vie du saint.  

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