Rechercher l’œcuménisme en vérité pas un œcuménisme irénique

Publié le 02 Fév 2020
Rechercher l'œcuménisme en vérité pas un œcuménisme irénique L'Homme Nouveau

Avec le deuxième Concile du Vatican, le mouvement œcuménique a pris un nouvel essor surtout au sein de l’Église catholique, jusque là quelque peu réticente même si saint Pie X avait accepté l’octave de prière due à l’initiative du Pasteur Watson. La division des chrétiens s’était avérée un obstacle majeur pour une évangélisation en profondeur des masses païennes, car elle est un scandale pour des non chrétiens. Au début du christianisme, beaucoup se sont convertis devant la charité des chrétiens : « Voyez comme ils s’aiment ! » Et maintenant les païens ont en face d’eux des chrétiens divisés, division qui se situe au sein même des catholiques. À proprement parler, l’œcuménisme, entendu comme recherche d’union entre les chrétiens séparés, n’est pas nouveau. Dès le début de son histoire, l’Église a connu des divisions, qu’elle a immédiatement cherché à réparer. Ainsi, la formule d’union entre saint Cyrille d’Alexandrie et Jean d’Antioche en 433 témoigne de ce souci de l’unité au plan de la foi ; il en va de même du concile de Florence au XVesiècle et de bien d’autres tentatives d’union au plus haut niveau de l’Église. Cependant l’œcuménisme comme tel est né au XIXe siècle avec le mouvement d’Oxford et s’est développé au XXe siècle à partir des conversations de Malines autour du cardinal Mercier et de Lord Halifax. Le mouvement s’est amplifié dans l’Église catholique à partir du dernier Concile. Malheureusement, à côté du vrai dialogue et des directives officielles d’autorité papale, un œcuménisme irénique a vu le jour, faisant des ravages surtout par des tentatives indues de rapprochement avec les protestants. Malgré les mises en garde répétées de Rome, l’intercommunion est souvent devenue une triste constatation. Pourtant, le vrai œcuménisme suppose la vérité autant que la charité. Comme le souligne le Pape, les chrétiens seront toujours nos frères dans le Christ puisqu’ils croient en la divinité du Christ. Mais dans la réalité pratique, il s’avère bien difficile d’accorder l’intégrité de la foi avec la compréhension fraternelle et mutuelle. C’est pourquoi l’œcuménisme qui obtient de vrais succès, est celui d’âmes sacrifiées dans le silence et la mortification; œcuménisme du sang des martyrs, œcuménisme aussi des saints, comme la bienheureuse Gabriella Sagghedu, cistercienne sarde offrant sa vie pour l’unité des chrétiens ou saint Léopold Mandic, offrant les peines martyrisantes endurées au confessionnal pour le retour à l’unité des chrétiens orthodoxes.

L’allocution du Pape est comme un couronnement de sa catéchèse sur les Actes. Profitant du thème de cette année qu’est l’hospitalité, il revient sur le séjour de saint Paul à Malte, où l’Apôtre des gentils a été particulièrement bien accueilli ainsi que ses compagnons naufragés. Il évoque d’abord l’expérience dramatique du naufrage, événement courant pour les missionnaires avant l’avion. En 1920, dans le Golfe de Gascogne périrent Mgr Jalabert préfet apostolique de Dakar ainsi que tous ses missionnaires. On ne peut rien contre une mer déchaînée, tant dans la réalité concrète qu’au plan spirituel. Seule est efficace alors la pratique héroïque des vertus théologales, notamment la foi en une Providence qui n’est qu’amour. Paul se savait dans les mains du Christ ressuscité rencontré sur le chemin de Damas pour lequel il porta l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre. Grâce à lui, tous arrivèrent sains et saufs à Malte où l’hospitalité fut pratiquée, tant chez Paul qui fut témoin de l’amour miséricordieux de Dieu, que chez les Maltais qui accueillirent l’Évangile. Nous voyons là l’importance de l’hospitalité aussi bien pour le vivre en commun que pour l’évangélisation et comme route privilégiée de l’œcuménisme. C’est elle qui nous permettra de recevoir l’Esprit-Saint, qui couvrit Marie de son ombre pour qu’elle enfanta le Verbe Incarné. Soyons dociles à Marie, pour être dociles à l’Esprit-Saint et ainsi être de vrais fils de l’Église en priant pour son unité.

PAPE FRANÇOIS 

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI
Mercredi 22 janvier 2020

Chers frères et sœurs, bonjour!

La catéchèse d’aujourd’hui est liée à la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Le thème de cette année, qui est celui de l’hospitalité, a été développé par les communautés de Malte et Gozo, à partir du passage des Actes des Apôtres qui raconte l’hospitalité réservée par les habitants de Malte à saint Paul et à ses compagnons de voyage, naufragés avec lui. C’est précisément à cet épisode que je faisais référence dans la catéchèse d’il y a deux semaines.

Repartons donc de l’expérience dramatique de ce naufrage. Le navire sur lequel voyage Paul est à la merci des éléments. Ils sont en mer depuis quatorze jours, à la dérive, et étant donné que ni le soleil, ni les étoiles ne sont visibles, les voyageurs se sentent désorientés, perdus. Sous eux, la mer heurte violemment le navire et ils craignent que celui-ci ne se brise sous la force des vagues. D’en-haut, ils sont fouettés par le vent et par la pluie. La force de la mer et de la tempête est terriblement puissante et indifférente au destin des passagers: il y a avait plus de 260 personnes!

Mais Paul, qui sait qu’il n’en est pas ainsi, parle. La foi lui dit que sa vie est entre les mains de Dieu, qui a ressuscité Jésus d’entre les morts, et qui l’a appelé, lui Paul, pour apporter l’Evangile jusqu’aux extrémités de la terre. Sa foi lui dit également que Dieu, selon ce que Jésus lui a révélé, est un Père aimant. C’est pourquoi Paul s’adresse à ses compagnons de voyage et, inspiré par la foi, leur annonce que Dieu ne permettra pas qu’un cheveu de leur tête ne soit perdu.

Cette prophétie se réalise quand le navire échoue sur la côte de Malte et que tous les passagers rejoignent sains et saufs la terre ferme. Et là, ils font l’expérience de quelque chose de nouveau. En contraste avec la violence brutale de la mer en tempête, ils reçoivent le témoignage de la «rare humanité» des habitants de l’île. Ces personnes, des étrangers pour eux, se révèlent attentives à leurs besoins. Elles allument un feu pour qu’ils se réchauffent, elles leur offrent un abri contre la pluie et de la nourriture. Même si elles n’ont pas encore reçu la Bonne Nouvelle du Christ, elles manifestent l’amour de Dieu à travers des actes concrets de gentillesse. En effet, l’hospitalité spontanée et les gestes attentifs communiquent quelque chose de l’amour de Dieu. Et l’hospitalité des habitants de l’île de Malte est récompensée par les miracles de guérison que Dieu opère sur l’île à travers Paul. Donc, si la population de Malte fut un signe de la Providence de Dieu pour l’apôtre, il fut lui aussi un témoin de l’amour miséricordieux de Dieu pour eux.

Très chers amis, l’hospitalité est importante; et c’est également une vertu œcuménique importante. Elle signifie tout d’abord reconnaître que les autres chrétiens sont vraiment nos frères et nos sœurs en Christ. Nous sommes frères. Certains diront: «Mais celui-ci est protestant, celui-là est orthodoxe…». Oui, mais nous sommes frères dans le Christ. Ce n’est pas un acte de générosité à sens unique, car quand nous recevons d’autres chrétiens, nous les accueillons comme un don qui nous est fait. Comme les Maltais — de braves personnes ces Maltais — nous sommes récompensés, parce que nous recevons ce que l’Esprit Saint a semé chez ces frères et sœurs, et cela devient un don également pour nous, parce que l’Esprit Saint sème lui aussi ses grâces partout. Accueillir les chrétiens d’une autre tradition signifie tour d’abord montrer l’amour de Dieu à leur égard, parce que ce sont des enfants de Dieu — nos frères —, et en outre cela signifie accueillir ce que Dieu a accompli dans leur vie. L’hospitalité œcuménique demande la disponibilité à écouter les autres, en prêtant attention à leurs histoires personnelles de foi et à l’histoire de leur communauté, une communauté de foi avec une tradition différente de la nôtre. L’hospitalité œcuménique comporte le désir de connaître l’expérience que d’autres chrétiens font de Dieu et l’attente de recevoir les dons spirituels qui en dérivent. Et cela est une grâce, découvrir cela est une grâce. Je pense aux temps passés, à ma terre par exemple. Quand certains missionnaires évangéliques venaient, un petit groupe de catholiques allait brûler leurs tentes. Il ne faut pas faire cela: ce n’est pas chrétien. Nous sommes frères, nous sommes tous frères et nous devons nous accueillir mutuellement.

Aujourd’hui, la mer sur laquelle Paul et ses compagnons firent naufrage est encore une fois un lieu dangereux pour la vie d’autres personnes qui naviguent. Dans le monde entier, des hommes et des femmes migrants affrontent des voyages risqués pour fuir la violence, pour fuir la guerre, pour fuir la pauvreté. Comme Paul et ses compagnons, ils font l’expérience de l’indifférence, de l’hostilité du désert, des fleuves, des mers… Très souvent, on ne les laisse pas débarquer dans les ports. Mais, hélas, ils rencontrent parfois également l’hostilité bien pire des hommes. Ils sont exploités par des trafiquants criminels: aujourd’hui! Ils sont traités comme des numéros et comme une menace par certains gouvernants: aujourd’hui! Parfois, le manque d’hospitalité les rejette comme une vague vers la pauvreté ou les dangers qu’ils ont fuis.

En tant que chrétiens, nous devons travailler ensemble pour montrer aux migrants l’amour de Dieu révélé par Jésus Christ. Nous pouvons et nous devons témoigner qu’il n’y a pas seulement l’hostilité et l’indifférence, mais que chaque personne est précieuse pour Dieu et aimée par Lui. Les divisions qui existent encore entre nous, nous empêchent d’être pleinement le signe de l’amour de Dieu pour le monde, qui est notre vocation et notre mission. Travailler ensemble pour vivre l’hospitalité œcuménique, en particulier à l’égard de ceux dont la vie est la plus vulnérable, nous rendra tous, nous qui sommes chrétiens — protestants, orthodoxes, catholiques, tous les chrétiens —, des êtres humains meilleurs, des disciples meilleurs et un peuple chrétien plus uni. Cela nous rapprochera davantage de l’unité, qui est la volonté de Dieu pour nous.

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