Le projet Repertorium financé par l’Union européenne permettra de nourrir une IA de musique, à partir de partitions de grégorien.
L’Union européenne s’intéresserait-elle au chant de l’Église ? Depuis le 1er janvier 2023, le programme de recherche et d’innovation « Horizon » finance le projet Repertorium, qui met en place une intelligence artificielle ayant pour base de travail… des partitions grégoriennes. L’intelligence artificielle est très avancée aujourd’hui. Cependant, dans le domaine de la musique, elle est très peu utilisée. L’Union européenne a donc fait un appel à projets pour créer un outil permettant de lire, décomposer, analyser et interpréter des partitions. « Une IA, pour bien fonctionner, a besoin d’être ‘‘nourrie’’. Il faut pouvoir l’entraîner avec une grande quantité de données. Nous avons donc proposé à l’Union européenne d’utiliser pour cela les milliers de manuscrits grégoriens conservés dans les archives de l’abbaye de Solesmes », affirme Dominique Crochu, musicologue, passionné de grégorien et initiateur du projet Repertorium. En 1905, le pape saint Pie X avait demandé de photographier un maximum de manuscrits dans toutes les bibliothèques du monde. Deux moines de l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes s’étaient donc chargés de ce travail. L’ensemble des photographies est aujourd’hui conservé dans les archives de leur abbaye. Dominique Crochu souhaitait les sauvegarder, en les numérisant. Le projet Repertorium a alors été lancé pour répondre à cette double attente : appliquer une intelligence artificielle à la musique et conserver ce patrimoine religieux européen. Une équipe multidisciplinaire est donc chargée par l’Europe d’exploiter les données des 400 000 clichés conservés à l’abbaye de Solesmes. Elle est coordonnée par John Anderson, initiateur du projet « Neumz » (application créée en 2019 et permettant d’avoir accès à des partitions grégoriennes avec leur mélodie). Repertorium s’appuie également sur des informaticiens espagnols, pour travailler sur l’aspect technique. « Une photo numérisée d’un manuscrit pèse 120 mégaoctets. À la fin de notre travail, nous disposerons de 150 téraoctets de stockage. C’est fabuleux ! » s’émerveille Dominique Crochu. Ce projet ambitieux consiste à apprendre à l’IA à lire, décomposer et interpréter des partitions, et à proposer une mélodie : « L’IA fera en une heure ce que nous ferions en trois mois. » Ce projet permettra à terme d’avoir plus rapidement accès à une lourde base de données musicales sur laquelle les musiciens pourront se reposer pour apprendre ces partitions. Cependant,…