Soudan : une guerre civile en gestation

Publié le 26 Avr 2023
Soudan

Le général Abdel Fattah Al-Burhane, commandant l'armée soudanaise, en lutte contre son ancien complice du coup d’État de 2019, le général Hemeti

Le 15 avril, au Soudan, les Forces de soutien rapide (FSR) lançaient une offensive contre l’armée. Les FSR sont une puissante milice commandée par le général Mohamed Hamdan Dagalo dit Hemeti. Le général Abdel Fattah Al-Burhane, avec lequel Hemeti partageait le pouvoir à la tête du pays, est lui le commandant en chef de l’armée officielle du Soudan. Dix jours plus tard, le conflit avait déjà fait au moins 420 morts et 3 500 blessés. Le pays sombrait dans le chaos et les puissances étrangères, à commencer par la France, évacuaient leurs ressortissants. Depuis 2018, un mouvement de contestation se développait. Faisant mine de soutenir ce dernier, le 11 avril 2019, les généraux Burhane et Hemeti destituaient le président Omar Al-Béchir, un militaire lui aussi, qui dirigeait l’État de manière despotique depuis trente ans. Les putschistes s’installèrent au pouvoir, promettant de préparer sa transmission aux civils. Les promesses restèrent lettre morte et, le 3 juin, démantelant des manifestations pacifiques, les FSR et l’armée tuèrent une centaine de personnes. Mais l’association dans le crime ne suffit pas pour souder une coalition. « Il n’y a pas de place pour deux crocodiles dans le même marigot », dit le dicton africain. À la rationalité expérimentale de cette réflexion allaient s’ajouter les ingérences étrangères. Il faut savoir que le Soudan est un pays effroyablement pauvre qui est néanmoins passé depuis 2010 au rang de troisième producteur d’or du continent, avec une centaine de tonnes de métal jaune par an. Il est aussi détenteur d’une énorme réserve de terres cultivables non exploitées. De plus, il dispose d’une position stratégique donnant sur la mer Rouge, avec Port-Soudan, dans une région où les grandes puissances se bousculent, en particulier à Djibouti, ne laissant pas indifférents des États cherchant eux aussi à y prendre pied. La Russie d’abord. Dans un article daté du 21 avril dernier, la publication en ligne Slate décrivait sans ménagement, mais avec exactitude, la pénétration de Moscou au Soudan. Elle remonte déjà à l’époque d’Al-Béchir, le président déchu, comme nous l’avons vu. Dans les années 90, à Khartoum, nous avions croisé des officiers russes venus vendre des armes. Par chance pour eux, les FSR contrôlent la région de l’extraction aurifère. Avec un certain sens politique, elles en ont confié l’exploitation au fameux Groupe Wagner, l’organisation de mercenaires qui sert de fer de lance à l’offensive de Moscou en Afrique. Puis le général Hemeti…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Alain Chevalérias

Ce contenu pourrait vous intéresser

International

La martingale migratoire italienne

Le 29 janvier, la Cour constitutionnelle albanaise approuvait un projet d’ouverture de centres d’accueil pour migrants, gérés sur le territoire de l’Albanie par les autorités italiennes et aux frais de celles-ci. L’accord entre les deux pays avait été bloqué le 14 décembre dernier à la suite d’un recours devant la Cour constitutionnelle de Tirana déposé par l’opposition albanaise. Cette dernière avait affirmé l’accord violant la Constitution et les conventions internationales. Elle était soutenue par les ONG spécialisées dans l’aide aux migrants.

+

italie