Chacun se souvient sans doute de l’adaptation cinématographique de l’œuvre dramatique de Reginald Rose par Sidney Lumet en 1957 avec Henry Fonda en personnage principal. Le cinéma n’est pas le théâtre et dans l’intense huis clos de ces jurés d’assise qui ont le sort de la vie d’un homme entre les mains, la présence vivante d’acteurs enfermant le public avec eux sans écran dans la salle de leur délibération est d’une intensité incomparable et à mon sens beaucoup plus forte que celle apportée par la médiation de l’image cinématographique. Le théâtre est un art vivant.
Sous la conduite de Charles Tordjman en excellent chef d’orchestre, douze jurés doivent décider du sort d’un jeune immigré accusé de parricide. La décision de la peine de mort avec exécution à la chaise électrique est au bout de leur jugement qui doit être rendu à l’unanimité. Tous le croient coupable sauf l’un des jurés qui a des doutes sur la conduite de l’enquête.
L’intérêt de la pièce n’est pas d’abord judiciaire, mais de permettre l’examen des motifs et des mobiles qui poussent chacun de ces hommes à émettre son jugement. Le doute de l’unique juré qui ne se prononce pas sur la culpabilité de l’accusé autorise une catharsis à partir de la mise en lumière de tous les préjugés qui altèrent le jugement des uns et des autres. Il est parfois difficile de dire ne pas savoir quand on ne veut pas se donner la peine d’examiner dans les moindres détails les éléments de la délibération. Entre ceux qui jugent trop vite, ceux qui s’appuient sur le jugement des autres, ceux qui cherchent leur intérêt ou leur faire valoir, il reste parfois bien peu de place à la quête de la vérité.
Dans une unité de lieu et de temps où tout est concentré, la pression qui règne sur scène est sensible et le spectateur est entraîné presque malgré lui dans le combat qui se joue sous ses yeux. Il y a certainement une belle leçon à en tirer lorsque l’on se pose la question de savoir comment s’assurer que la justice rendue soit véritablement juste. Un spectacle fort !
Théâtre Hébertot, 78 bis bd des Batignolles, Paris XVIIe, du mardi au dimanche à 19 h, jusqu’au 7 janvier 2018. Rés. : 01 43 87 23 23.