« Une femme d’exception », c’est le nom du congrès universitaire qui s’est tenu en avril dernier pour les 50 ans de la proclamation du doctorat de sainte Thérèse d’Avila (avec une année de décalage par rapport à la date exacte du cinquantenaire, pour les raisons sanitaires que l’on connait). Le pape s’est exprimé à cette occasion, insistant sur le fait que le caractère exceptionnel de la sainte d’Avila ne tient pas d’abord en ses capacités diverses mais dans sa rencontre en profondeur avec le Christ.
1970 ne fut pas une année comme les autres. Paul VI y proclama pour la première fois le doctorat non seulement pour une, mais pour deux femmes exceptionnelles : sainte Thérèse d’Avila et sainte Catherine de Sienne. Cette nouveauté appréciée pour la plupart fut cependant fortement critiquée par certains. Le pape avait ouvert la voie et Jean-Paul II l’imita en l’honneur de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et Benoît XVI pour sainte Hildegarde. Une brève biographie de la grande Thérèse devrait nous aider à comprendre le texte du Pape qui insiste surtout sur son rôle d’orante.
La castillane Thérèse naquit à Avila en 1515 à une époque de troubles et de changements. D’une intelligence vive, d’un caractère fortement trempé, elle désira dès sa jeunesse évangéliser les Maures et gagner la palme du martyre. Après cette crise de l’adolescence, son père la confia aux Augustines de Notre-Dame-des-Grâces d’Avila. Une première fois convertie, elle sentit l’appel de Dieu et entra, en 1535, malgré l’opposition paternelle, au couvent des carmélites de la même ville, à la vie assez relâchée. Après la ferveur des débuts, elle traversa une longue période de tiédeur et d’acédie. À partir de 1555, définitivement convertie, n’ayant plus d’autre pensée que l’amour de Dieu et récompensée par les plus hautes grâces mystiques, comme la vision de l’enfer ou la transverbération, elle s’adonne de toutes ses forces à son unique but: la réforme de son ordre pour plaire à Dieu et servir l’Église dont elle sera toujours la fille très aimante. Encouragée dans cette voie par saint Pierre d’Alcantara, elle fonde dès 1562 le premier couvent de carmélites déchaussées à Avila. Dès lors plus rien n’arrêtera la Madre. Faisant profiter ses filles par ses livres de ses grâces mystiques, parcourant les routes d’Espagne pour fonder des colombiers de Notre Dame, prêchant l’amour de la souffrance supportée en esprit de réparation rédemptrice, en particulier lors des jugements sévères de l’Inquisition, elle accomplit avec autant de joie créatrice que de courage et d’intuition féminins, cette œuvre grandiose à laquelle Dieu l’appelait. Ne voulant que voir Dieu, elle commença par le chercher, obéissant toujours à sa sainte volonté jusqu’à la nuit la plus longue de l’histoire au cours de laquelle le Seigneur dans sa tendresse et dans sa miséricorde vint la chercher (4-15 octobre 1585). « Thérèse a toujours aimé l’Église et c’est avec raison que Jean-Paul II disait que l’axe de la vie de Thérèse, comme projection de son amour pour le Christ et de son désir du salut des hommes, a été l’Église. Thérèse de Jésus a senti l’Église; elle a vécu la passion pour l’Église, comme membre du Corps Mystique. »
Le Pape commence par se demander pourquoi sainte Thérèse est-elle exceptionnelle. Tout simplement parce qu’elle est sainte et donc qu’elle fut toujours docile au Saint Esprit qui même en temps de troubles continue à changer la face de la terre grâce précisément aux saints. Le Pape rappelle l’importance de l’appel universel à la sainteté enseigné par le Concile. Cet appel prend son origine dans le baptême qui nous stimule. Et c’est précisément le rôle des saints canonisés de nous motiver. Nous ne devons pas les copier mais les imiter. Sainte Thérèse est pour nous un modèle de prière, sans laquelle nous ne pourrons jamais nous unir au Christ. Mais l’union à Dieu, si elle implique bien la prière, implique aussi la charité et donc les œuvres dans une totale fidélité à l’instant présent et au devoir d’état. D’ailleurs, c’est à partir de la prière que Thérèse découvrit l’idéal de fraternité. Ainsi s’est-elle ouverte à l’espérance allumant la flamme de l’éternité. Souvenons de son exemple pour marcher sur ses traces.