À la rentrée 2024, la France fait face à une grave pénurie d’enseignants, avec 3 180 postes vacants. Malgré des mesures d’urgence, la crise met en lumière des problèmes de recrutement et de conditions de travail qui perdurent depuis des décennies.
Pour la rentrée de septembre 2024, la France fait face à une pénurie d’enseignants sans précédent. Le ministère de l’Éducation nationale a révélé en juillet 2024 que près de 3 180 postes d’enseignants demeuraient vacants, notamment dans les académies de Créteil, Versailles et Marseille, où le manque d’effectifs est le plus criant. Cette situation n’est pas nouvelle. Depuis les années 1990, les problèmes de recrutement d’enseignants n’ont cessé de s’aggraver, malgré plusieurs tentatives de réforme et d’amélioration des conditions de travail.
Un problème persistant
Le problème de la pénurie d’enseignants remonte aux années 1990, une période marquée par une baisse progressive du nombre de candidats aux concours de l’enseignement. Selon les données du ministère de l’Éducation nationale, le nombre de candidats au concours de professeur des écoles a diminué de 30 % entre 1995 et 2010. Ce déclin s’est accentué dans les années 2010, avec une baisse de 50 % des inscrits au concours entre 2010 et 2020.
Plusieurs facteurs expliquent cette pénurie persistante. D’abord, les salaires des enseignants en France restent inférieurs à ceux de nombreux pays européens. Selon une étude de l’OCDE publiée en 2023, un enseignant français débutant gagne en moyenne 28 000 euros brut par an, contre 34 000 euros en Allemagne et 32 000 euros au Royaume-Uni. En outre, les conditions de travail se sont détériorées au fil des ans, avec des classes surchargées, une hausse des responsabilités administratives et une augmentation des incivilités et violences en milieu scolaire.
Les politiques successives ont tenté de pallier la pénurie mais souvent sans succès. En 2003, la réforme Fillon de l’éducation a introduit des mesures pour attirer davantage de candidats, notamment en réduisant la durée de formation initiale des enseignants, mais cela n’a pas suffi. En 2013, la refondation de l’École de la République portée par Vincent Peillon a introduit des Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) pour renforcer la formation des enseignants. Cependant, ces réformes ont été critiquées notamment pour leur incapacité à répondre aux défis structurels, comme le faible attrait du métier et le manque de valorisation financière.
Une revalorisation financière nécessaire
En 2021, le gouvernement a proposé une revalorisation salariale pour les jeunes enseignants dans le cadre du Grenelle de l’éducation. Bien que des augmentations aient été appliquées, elles ont été jugées insuffisantes et n’ont pas permis de combler le fossé entre les attentes des enseignants et les réalités budgétaires. De plus, la pandémie de COVID-19 a exacerbé les difficultés, avec une augmentation du nombre de départs en retraite anticipée et de démissions, laissant encore plus de postes vacants.
Pour la rentrée 2024, le ministère a tenté de recruter massivement via des contrats précaires et des appels aux retraités et étudiants, mais ces mesures temporaires n’offrent pas de solution durable. Dans l’académie de Versailles, par exemple, sur les 1 200 postes d’enseignants vacants, près de 300 ont été comblés par des contractuels, souvent sans formation pédagogique adéquate. Selon le Syndicat National des Enseignements de Second Degré (SNES-FSU), ces pratiques « dévalorisent le métier et mettent en péril la qualité de l’enseignement ».
À court terme, le ministère de l’Éducation nationale a annoncé en août 2024 un plan d’urgence avec une revalorisation supplémentaire de 10 % pour les enseignants en début de carrière, effective dès janvier 2025. Toutefois, cette mesure est perçue comme un pansement sur une plaie béante. À plus long terme, la réforme de la formation des enseignants et une refonte des conditions de travail s’imposent pour attirer et retenir des talents dans l’éducation nationale.
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