La logique subversive du mimétisme

Publié le 06 Fév 2013
La logique subversive du mimétisme L'Homme Nouveau

Peut-on sans dommage parler de « couple » homosexuel ? Les mots que nous utilisons pour exprimer notre avis sur tel ou tel sujet véhiculent des implications dont le sens parfois nous échappe. La plupart des protagonistes du débat actuel ont pris l’habitude de parler de « couple de personnes de même sexe ». Une telle expression contribue de facto à légitimer la revendication homosexuelle puisque l’usage des mêmes mots pour désigner le phénomène semble faire consensus.

Choisir le mot « couple » pour nommer la relation amoureuse entre deux hommes ou entre deux femmes crée un parallélisme avec le couple homme/femme. Si on désigne ces deux types de relation par le même mot, ne serait-ce pas le signe qu’ils sont comparables ? Puisque seul ce qui est comparable peut être comparé, on a ainsi effectué une partie du chemin de légitimation. L’égalité consistant à attribuer les mêmes droits à des personnes étant dans des situations semblables, les traiter différemment est perçue comme discriminatoire. Au nom de la lutte contre les discriminations, il s’agit donc d’attribuer rigoureusement les mêmes droits à tous les couples, d’où la formule du « mariage pour tous ». Il convient d’interroger à la racine ce présupposé lexical afin de décrypter la logique subversive qu’il déploie à notre insu. Ce qui se cache dans cette utilisation du mot « couple » est une volonté de mimétisme au service d’une stratégie de reconnaissance sociale.

Le mot « couple », du latin copula signifiant « lien, liaison » désigne « un homme et une femme réunis » ; on trouve aussi un sens mécanique dont l’origine analogique est évidente : « ensemble de deux forces parallèles égales entre elles, de sens contraire ». Le mot couple dit donc complémentarité des différences. Tout cela connote l’idée d’un agencement de parties diverses et formant ainsi un tout spécifique. Ce tout est la réalité conjugale, principe de la famille. L’union de l’homme et de la femme réalise un haut degré d’intégration des différentes dimensions de la personne humaine : corps sexué, affectivité, volonté libre ; ­celle-ci assumant les deux premiers niveaux et s’autodéterminant dans un don total de la personne à l’autre, et réciproquement : telle est la signification profonde de l’union des époux par laquelle ils sont ouverts à la transmission de la vie, c’est-à-dire à la procréation d’une nouvelle personne humaine, leur enfant dont ils vont assumer l’éducation. La famille est ainsi cette articulation des différences (sexuelle et générationnelle) et par là elle a pour finalité d’être communion de personnes. La communion conjugale en est la clef de voûte.

Affiche pro mariage pour tous

La relation affective et sexuelle entre deux hommes ou entre deux femmes est objectivement privée de cette intégration des dimensions personnelles. Il y a, au contraire, déconnexion dont le signe le plus flagrant est la stérilité du rapport corporel. On ne peut nommer celui-ci « union » puisqu’il n’est en rien signe et instrument du don réciproque des personnes. Même si l’intensité du sentiment peut faire croire et espérer à une communion de type conjugal, la fracture est béante. Cependant le désir de communion demeure ; le désir de transmettre la vie aussi. Ces inclinations naturelles sont inscrites dans le cœur de toute personne humaine. Notons qu’on a là une belle confirmation de l’universalité de la loi naturelle puisque ces inclinations continuent à s’exprimer malgré l’impossibilité subjective de les réaliser.

Et c’est ici que le drame se noue et que le mimétisme cherche à le résoudre. En récupérant les mots de la conjugalité et de la filiation, la revendication homosexuelle cherche à obtenir par la société constructiviste ce que la réalité des pratiques ne peut lui donner. Le coup de force consiste donc à faire accepter au plus grand nombre que le vécu homosexuel est similaire au vécu conjugal et qu’à ce titre il doit être accueilli et traité de manière identique.

Le plus grand nombre ayant déjà validé de nombreuses déconnexions mentales (contraception, PMA, union libre, divorce, etc.), il ne perçoit la revendication homosexuelle que comme l’aboutissement d’un long processus d’égalisation entre hommes et femmes d’abord, puis entre « homos » et « hétéros ». Alors le piège peut se refermer : à l’imitation de l’original par la copie peut succéder le refus par la copie de la supériorité de l’original et même la contestation de son statut d’original. Ainsi la différence s’estompe et l’indifférenciation croît. Le couple est devenu une réalité asexuée ; la famille et la filiation aussi. 

Ce billet est extrait du dernier numéro de L’Homme Nouveau que vous pouvez commander à nos bureaux (10 rue Rosenwald, 75015 Paris. Tél. : 01 53 68 99 77, au prix de 4 euros), ou télécharger directement sur ce site en cliquant sur le lien ci-dessous.

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