Au moment où la France a le plus besoin d’unité, dans un climat d’exaspération propice à des divisions funestes, le pouvoir poursuit un combat antireligieux et spécialement anticatholique. Est-ce une diversion pour faire oublier aux Français certains de leurs désagréments ou est-ce au contraire la mise en œuvre d’un plan destiné à nous faire basculer avec d’autres pays d’Europe dans une post-chrétienté définitive, prête à accueillir une nouvelle religion républicaine ?
Le refus du catholicisme
Depuis les dernières élections présidentielles de 2012, nous sommes passés d’une laïcité respectueuse des consciences, fidèle à l’article 1er de la Constitution de 1958, à un laïcisme de combat nous ramenant à 1793, autrement dit à une laïcité de dictature, puisque le gouvernement a pour volonté nette de récuser l’exercice de l’objection de conscience. François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon, à sa façon, l’a bien fait sentir à Vincent Peillon en lui refusant de prendre la parole à quelque tribune que ce soit.
En 2008, alors qu’il publiait La Révolution française n’est pas terminée, ce dernier proclamait :
« On ne pourra jamais construire un pays de liberté avec la religion catholique. (…) il faut inventer une religion républicaine ».
Cela implique bien sûr une morale qui va avec. Nous situerons-nous alors dans la continuité de Jules Ferry ?
Plus loin que Jules Ferry ?
Certainement pas ! Qu’on se reporte aux premières pages du livre de notre ministre de l’Éducation nationale :
« D’où l’importance stratégique de l’école au cœur du régime républicain. C’est à elle qu’il revient de briser ce cercle, de produire cette auto-institution, d’être la matrice qui engendre en permanence des républicains pour faire la République. République préservée, République pure, République hors du temps au sein de la République réelle, l’école doit opérer ce miracle de l’engendrement par lequel l’enfant, dépouillé de toutes ses attaches pré-républicaines, va s’élever jusqu’à devenir citoyen, sujet autonome. C’est bien une nouvelle naissance, une transsubstantiation qui opère dans l’école et par l’école, cette nouvelle Église, avec son nouveau clergé, sa nouvelle liturgie, ses nouvelles tables de la Loi. »
Est-ce que les Français demandent cela à l’école de la République ? Leur souhait est plus simple mais peut être plus difficile et moins « gratifiant » pour certains idéologues. Beaucoup de nos concitoyens attendent de l’école qu’elle apprenne à leurs enfants à lire, à écrire et à compter, qu’elle les civilise aussi dans cet art de vivre français pour lequel nos pères se sont souvent battus.
Un temps d’apostasie
Une des dernières homélies du Pape François, prononcée le 18 novembre dernier, commente un passage du livre des Maccabées, qu’on appelle aujourd’hui le livre des Martyrs d’Israël où les Juifs du IIe siècle avant Jésus-Christ étaient contraints au nom du progrès d’abandonner leurs traditions et leurs coutumes. « Ces gens, donc, négocient avec le roi “la fidélité au Dieu toujours fidèle”. C’est ce qu’on appelle l’apostasie, a poursuivi le Pape. Ce n’est pas qu’ils sont en train de négocier certaines valeurs, non, ils négocient carrément l’essentiel, à savoir la fidélité au Seigneur. » « Aujourd’hui », avertit le Pape, on pense que « nous devons être comme tous les autres, nous devons être plus normaux, comme tout le monde fait, avec ce progressisme adolescent ». Et puis, faisait-il remarquer amèrement :
« on connaît la suite de l’histoire : les condamnations à mort, les sacrifices humains ». « Vous pensez peut-être qu’aujourd’hui on ne les pratique pas les sacrifices humains ? Eh bien tout au contraire, on en pratique tellement, tellement. Et des lois existent même pour les protéger. »
Poursuivre l’œuvre Trotski ?
Quel est le bien-fondé de la politique du gouvernement ? Peut-on mener, avec plus de chances de réussite, une politique socialiste en la dépouillant de ses prétentions religieuses et par conséquent totalitaires ! Le tout étant de savoir si le souhait est de poursuivre l’œuvre de Trotski ou de Léon Blum qui sut, lui, en son temps respecter la doctrine sociale de l’Église, parce qu’il l’avait lue et qu’il n’hésita pas à aider le cardinal Verdier pour les Chantiers du Cardinal.
Méditons ce grand penseur protestant que fut Jacques Ellul quand il écrivait dans Les Chrétiens et l’État :
« Il peut y avoir une mystique de la démocratie, de la gauche, du progrès, etc. Et l’un des aspects de cette religion, c’est le laïcisme lui-même lorsque l’on quitte le terrain de la neutralité pour entrer dans celui du combat contre tout ce qui n’est pas laïc, contre toutes les tendances spirituelles ou religieuses : ce laïcisme est lui-même d’essence mystique. En somme, pour être laïc (ce qui me semble être la volonté de Dieu pour les autorités) de façon permanente, l’État ne doit jamais agir à cause d’une philosophie, d’une idéologie et en provoquant un courant d’adoration ou d’espérance. »
À lire du Père Michel Viot : La Révolution chrétienne, entretiens avec l’abbé Guillaume de Tanoüarn, aux éditions de L’Homme Nouveau.