Dans son dernier ouvrage, Cette Autriche qui a dit non à Hitler. 1930-1945, l’historien et journaliste Jean Sévillia démonte la légende noire de l’Anschluss qui décrit une Autriche totalement consentante à son annexion en 1938. Constamment enseigné, ce mensonge historique repose sur la propagande nazie et sur l’embarras des historiens contemporains face à un régime autoritaire, celui de d’Engelbert Dollfuss, opposé totalitarisme nazi.
Vous remettez en cause la vision admise d’un accueil majoritairement favorable des Autrichiens à l’Anschluss en 1938. Pourquoi ?
Il y a un fait majeur qui relève du scandale historiographique. À partir du 12 mars 1938, date de l’entrée de l’armée allemande en Autriche, tous les journalistes et photographes opposants au national-socialisme sont arrêtés, dont bien sûr les journalistes juifs. Les correspondants de la presse étrangère sont bouclés avant d’être expulsés. Il est donc impossible de publier un article ou une photo qui ne soient pas favorables aux nazis. Si bien que les images encore utilisées aujourd’hui concernant l’Anschluss sont des éléments de la propagande nazie. En revanche nous n’avons aucune photo des 50 000 à 70 000 arrestations qui ont eu lieu entre le 12 et le 20 mars 1938. En général, l’historiographie occulte cette répression des patriotes.
Pourtant lors du vote du 10 avril 1938, 99,73 % des Autrichiens ont approuvé le rattachement à l’Allemagne !
C’est une farce démocratique ! Malgré ce résultat, digne de tous les pays totalitaires, personne ne s’interroge sur la vaste manipulation qui s’est déroulée alors. Comment ne pas prendre en compte l’effet de sidération ressenti par les Autrichiens après l’entrée des Allemands sur leur territoire ? Ils font face à une occupation militaire, laquelle se traduit aussitôt par l’arrestation des opposants et de nombreux actes de violence, qui n’épargnent évidemment pas les Juifs. Enfin, l’Autriche n’est pas la seule à voter. L’ensemble du Reich est convoqué aux urnes puisque depuis le 13 mars 1938 il n’y a plus d’Autriche indépendante, même au point de vue du droit international.
Quelle a été la réaction de l’Église face à l’Anschluss ?
Au tout début des années 1930, l’épiscopat autrichien produit beaucoup de mises en garde contre le national-socialisme. Il soutient également fortement le régime de Dollfuss, qui a donné à l’Église une très grande liberté. Malheureusement, lors de l’Anschluss, le cardinal Innitzer, pourtant judéophile, commet un faux pas en publiant une…