Sarajevo, autrefois Bosnávar, ville relativement récente puisque construite seulement au XIIIe siècle, demeura sous la domination ottomane de 1429, – alors que sainte Jeanne d’Arc délivrait Orléans et sacrait Charles VII à Reims –, à 1878, date à laquelle elle intégra l’Empire austro-hongrois. Théâtre, le 28 juin 1914, de l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand de Habsbourg qui déclencha la Première Guerre mondiale, elle devait intégrer la Yougoslavie à la fin de la guerre. À la suite de la proclamation de son indépendance par la Bosnie-Herzégovine, en avril 1992, Sarajevo, autrefois capitale de la tolérance et symbole d’une exemplaire concorde, devint l’enjeu de conflits sanglants entre les Serbes, les Croates et les Bosniaques. Assiégés par les troupes serbes, les habitants de Sarajevo furent soumis pendant plus de trois ans à une incessante campagne de violences et à des privations d’une rare cruauté. Durant ce temps, pratiquement seule la voix de Jean-Paul II et celle de l’Église se levèrent pour demander aux responsables politiques d’arrêter la guerre et au peuple chrétien de jeûner et de prier pour la paix. Une nouvelle rencontre à Assise fut même organisée dans ce but. En septembre 1994, Jean-Paul II devait visiter la ville en profitant de son voyage en Croatie. Mais il ne put se rendre qu’en cette dernière, ne passant qu’une seule journée à Zagreb. Ce n’est qu’une fois la paix revenue, qu’il se rendit à Sarajevo en avril 1997. À cette ville, « symbole de la souffrance de toute l’Europe », le pape offrit alors un splendide message de paix et surtout de pardon. Il rappela que si le pardon se distinguait de l’oubli, la vengeance devait céder le pas à la force libératrice du pardon. Le pardon, en effet, faisant partie intégrante de la charité, est absolument nécessaire. Nous le demandons constamment en récitant le Notre Père.
La vraie paix
Dix-huit ans après, le second successeur du premier pape slave de l’Histoire se retrouve à Sarajevo pour livrer à nouveau un message de paix, qui n’est autre que celui du Seigneur et dont l’essence se trouve contenue dans les Béatitudes. La vraie paix ne vient que de Dieu. Dans son livre La Grâce de Noël, le futur pape Benoît XVI écrivait : « Le mot biblique Shalom que nous traduisons par paix, signifie bien davantage que l’absence de guerre ; il exprime le juste état des choses humaines, le Salut, un monde où règnent confiance et fraternité, où il n’y a ni peur ni manque, ni duplicité ni mensonge ». En effet, la véritable paix est l’œuvre de la justice, comme l’enseigne le prophète Isaïe. On sait que c’était la devise de Pie XII. Le Pape François la qualifie ici de prophétique. La paix est difficile, affirme-t-il avec force, parce qu’elle met en jeu trois agents principaux : Dieu, d’abord, qui est le seul auteur de la paix ; l’homme ensuite qui ne peut devenir artisan de paix qu’en se convertissant et en devenant un saint, comme l’enjoignait déjà le Lévitique : « Soyez saints, parce que je suis saint » ; le démon enfin, ennemi juré de la vraie paix. Et si la paix est si difficile de nos jours où se déroule « par morceaux une troisième guerre mondiale », c’est précisément parce que nous sommes au cœur du combat apocalyptique entre la lumière et les ténèbres, au cœur du combat décrit par le chapitre XII de L’Apocalypse et qui voit le triomphe de la Femme, Marie, Mère de l’Église qui a promis son triomphe à Fatima. Marie est modèle de paix parce qu’elle est la simplicité même. N’ayant pas connu le péché, tout était en ordre en elle, et l’on sait la définition de la paix selon saint Augustin : la tranquillité de l’ordre.