Conflits interreligieux : le pluralisme est-il la solution ?

Publié le 14 Mar 2024
pluralisme religions

« House of One », un projet berlinois de « maison » pour les trois monothéismes. © CC BY-SA 4.0, Molegreen

Sous prétexte de garantir une paix civile menacée par les différences religieuses, une fausse conception de la croyance s’est imposée. Le philosophe Roger Pouivet démontre dans un essai sur la cohabitation des religions que cette conception du pluralisme, méprisant le désir de vérité inscrit en l’homme, éliminant la possibilité de l’existence de Dieu et réduisant la foi à une réaction psychologique ou sociale, n’a aucune chance de faire s’accorder les religions ni de fonder la paix.
 

Les religions en raison de leur prétention à la vérité ne représentent-elles pas un danger pour la vie sociale ? Ne faudrait-il pas dès lors relativiser cette prétention ? La paix civile ne pourrait être garantie que par une compréhension strictement pratique des croyances religieuses, identifiées à diverses réponses possibles à une même quête de sens humaine. Ainsi la pluralité des religions n’engendrerait-elle plus de conflits si chaque croyant reconnaissait le principe du pluralisme, c’est-à-dire la légitimité intellectuelle des croyances différentes des siennes. Telles sont les thèses que l’on entend souvent. Telles sont les thèses que le philosophe Roger Pouivet s’applique à réfuter dans un remarquable essai paru dernièrement et intitulé La cohabitation des religions. Pourquoi est-elle si difficile ? (1)   

La cohabitation des religions

Son déclencheur est une rencontre organisée par la préfecture de Lorraine après les attentats de 2015, à laquelle il était convié comme philosophe avec d’autres personnalités politiques, athées et religieuses pour échanger sur « la cohabitation des religions ». Dans ce climat post-attentat, l’heure était à l’irénisme et tous les participants affirmaient que les désaccords entre les religions étaient bien moins importants que leurs communes aspiration et contribution au « vivre-ensemble ». Tous, sauf un, à savoir le philosophe. Et lui, spécialiste de l’épistémologie des vertus, de l’éthique intellectuelle et de la croyance (religieuse), d’affirmer au contraire que croire signifiant tenir pour vrai, la croyance religieuse est source de désaccords fondamentaux entre les hommes. Le désaccord entre croyants (et a fortiori incroyants) n’est pas le fruit d’une incompréhension ou de malentendus ; il tient à la nature même de la croyance religieuse. Toutes les tentatives pour assurer la paix civile sur la neutralisation de la question de la vérité de la croyance sont non seulement erronées car elles dénaturent l’acte de croire mais elles sont aussi inefficaces car fondées sur du sable. Il s’agit donc…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Thibaud Collin

Ce contenu pourrait vous intéresser

ChroniquesCulture

L’exposition : Revoir Van Eyck, La Vierge du Chancelier Rolin

La Vierge du Chancelier Rolin de Van Eyck, seul tableau du peintre à être conservé au Louvre, sort tout juste de restauration. Le musée lui consacre jusqu'en juin une exposition exceptionnelle, entouré de six autres œuvres de Van Eyck jamais présentées en France, et pour certaines prêtées pour la première fois. 

+

Revoir Van Eyck, La Vierge du Chancelier Rolin
ChroniquesEgliseSpiritualité

Ayons un abandon confiant et total dans l’unique Bon Pasteur

Commentaire du Pape | Lors de la récitation du Regina caeli du 21 avril dernier, le Pape a commenté l’épisode évangélique bien connu du Bon Pasteur, lu la semaine auparavant dans la forme extraordinaire. Cette image du Bon Pasteur est très biblique. L’Ancien Testament peint, à plusieurs reprises, les traits caractéristiques du bon et du mauvais pasteur.

+

bon berger bon pasteur
A la uneSociétéBioéthiqueDoctrine sociale

La dimension « politique » de la défense de la loi naturelle

L’avalanche de lois « sociétales » en France depuis plus d’un demi-siècle, toutes étant des atteintes directes à la loi naturelle, a provoqué dans une partie du monde catholique une délégitimation diffuse ou expresse des institutions politiques les ayant édictées, cela au sein du déferlement individualiste de l’après-68 et de cette sorte d’explosion en plein vol de l’Église en état de Concile. Le « mariage » homosexuel et la constitutionnalisation de l’avortement ont porté chez ces mêmes catholiques le climat à l’incandescence. D’où la question : que faire ?

+

loi naturelle
SociétéLettre Reconstruire

L’Église face au socialisme (II)

Lettre Reconstruire n°35 (avril 2024) | Dans la série de ses études synthétiques sur les idéologies modernes, Carlos Sacheri aborde le socialisme et le jugement de l’Église sur cette réaction aux injustices sociales nées du libéralisme économique. Il présente ici les points communs à toutes les idéologies socialistes.

+

socialisme