Les grandes manœuvres
Comme chaque année, nous aurions tous aimé que l’actualité prenne cet été des chemins de traverse et qu’enfin elle aborde les questions essentielles afin de nous reposer du matraquage médiatique habituel. Ce ne fut pas exactement le cas. Pour alimenter journaux, radios et télévisions, il y a eu le bras de fer entre la Corée du Nord et les États-Unis, les affrontements mortels de Charlottesville aux États-Unis et l’attentat contre nos militaires à Levallois-Perret et ceux de Barcelone et de Cambrils.
À son tour, la rentrée s’annonce chaude avec la Loi Travail, qui devrait être adoptée définitivement en conseil des ministres, à la fin du mois de septembre, avant d’être soumise à ratification des parlementaires en octobre prochain. En outre, le gouvernement entend également faire adopter la Procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes les femmes. L’heure est donc aux grandes manœuvres, dans une perspective libérale-libertaire qui s’inscrit parfaitement, tout en l’amplifiant, dans la logique du précédent quinquennat.
On pourrait désespérer devant une telle projection. Ce serait l’erreur. Ces projets semblent plutôt être les signes d’une modernité plus agonisante que sûre d’elle-même. Le doute s’est installé, les belles promesses n’ont pas été remplies, le monde meilleur n’est pas advenu, l’inquiétude ronge le plus souvent le cœur et les esprits.
Les attentats islamistes soulignent à leur manière ce retour au réel. À quoi bon vivre confortablement, englué dans le quotidien du matérialisme, si c’est pour risquer de mourir, victime d’une voiture transformée en engin de mort afin d’imposer le règne d’Allah à un Occident perverti ? Matérialisme et relativisme culturel, voire religieux, ne constituent pas une réponse adéquate aux menaces du moment. S’en rendre compte, c’est déjà opérer ce retour au réel si nécessaire.
Euthanasie d’hier et d’aujourd’hui
Il peut être profitable de lire parfois la presse bobo. Dans son numéro du 17 août dernier, L’Obs consacrait tout un dossier aux médecins nazis et à leurs folles expérimentations. Ceux qui ont lu le livre de Götz Aly, Les Anormaux (Flammarion) ou celui de Frédéric Rouvillois, Crime et utopie. Une nouvelle enquête sur le nazisme (Flammarion), deux livres présentés dans nos colonnes, n’ont certes pas appris grand-chose. Götz Aly a détaillé et expliqué le plan d’éradication des « inutiles » lancé par les nazis et leur programme d’euthanasie, plus connu sous son nom de code Aktion T4. Pour sa part, Rouvillois a montré combien le nazisme s’inscrivait dans une certaine modernité, rencontrant un accueil enthousiaste chez une majorité de médecins allemands. Selon Götz Aly, « 45 % des médecins ont même adhéré au parti nazi ».
Au milieu des horreurs rapportées par L’Obs, il y a cette réaction d’une femme dont une grande partie de la famille a été supprimée en raison de malformations génétiques. Elle-même n’a pas voulu avoir d’enfant. Mais quand des médecins lui ont proposé le diagnostic préimplantatoire, qui permet justement de déceler les anomalies génétiques et de supprimer les embryons défectueux conçus après une fécondation in vitro, elle a refusé. « Pas question, explique-t-elle. C’est de l’eugénisme. Et ça montre à quel point nous ne sommes pas si différents des médecins nazis. »
Il faut bien l’admettre, notre société n’est pas si différente que nous voudrions le croire des folies nazies. Certes, les critères raciaux ne sont pas à l’œuvre. Certes, les modes opératoires sont plus raffinés, plus discrets et visent au respect de l’individu et de ses droits plutôt qu’à une politique de régénération de la société. Mais, après ? Notre confort, individuel et collectif, est visé. L’aspect économique n’est pas absent non plus. Les « inutiles » du temps d’Hitler sont devenus les « fardeaux » d’aujourd’hui, dans un monde qui se mire chaque jour dans son propre reflet, cherchant à répercuter les critères de la perfection plastique imposée par l’air du temps.
Face aux urgences
Il y a donc urgence à défendre la vie. Celle de l’embryon comme celle du vieillard. Celle du pauvre, de la veuve et de l’orphelin, qui ne sont pas seulement des échos du passé (le Moyen Âge), mais aussi des réalités d’aujourd’hui, aux visages multiples et différents. Le nombre de pauvres augmente, comme celui des femmes abandonnées sur le chemin de l’existence sans parler des enfants privés de Dieu et de la vérité. Si nous ne pouvons pas à nous seuls transformer le monde qui nous entoure, nous pouvons continuer à proclamer le Christ et les principes de vérité qui permettront de le sauver. En cette rentrée, L’Homme Nouveau entend bien poursuivre cette tâche. À la manière de Péguy s’il le faut : « Qui ne gueule pas la vérité, quand il sait la vérité, se fait le complice des menteurs et des faussaires ! » (Lettre du provincial).