[Cet article a été publié dans notre numéro 1663 du 12 mai 2018 sous le titre « Adèle de Batz bientôt béatifiée », quelques modifications ont été faites en conséquence.]
Le diocèse d’Agen a révêtu ses habits de fête le 10 juin. Une enfant du pays, Adèle de Batz, a été béatifiée ce dimanche. Fondatrice de ce qui deviendra l’Institut des Filles de Marie Immaculée, elle répondit avec générosité à l’appel de Dieu dans les années post-révolutionnaires.
En cette année 1997, la communauté des sœurs marianistes porte dans ses prières l’une des leurs qui est atteinte d’un cancer. Les religieuses implorent sa guérison par l’intercession de leur fondatrice, Adèle de Batz et, lorsque leur sœur se présente à sa première séance de chimiothérapie, les tumeurs ont disparu. Dix-neuf ans plus tard, les médecins du Vatican, en déclarant la guérison « inexpliquée », confirment le miracle : le procès en béatification d’Adèle de Batz peut enfin s’ouvrir.
Une vie toute donnée
Mais tout a commencé en 1789, alors que la Révolution française bat son plein et apporte dans son sillage toutes les persécutions religieuses qu’on lui connaît. Adèle de Batz vient de naître, le 10 juin 1789 très exactement, à Agen, au château de Trenquelléon. Le père d’Adèle commande les Gardes françaises au service du Roi et sa mère est une femme pieuse et généreuse. Mais le coup d’État du 4 septembre 1797 contraint la famille à l’exil, Adèle grandit donc en Espagne puis au Portugal. Après sa première communion en 1801, le jour de l’Épiphanie, la petite fille annonce à ses parents qu’elle veut devenir religieuse. En France, où la famille peut rentrer quelques mois plus tard, les congrégations religieuses ont été interdites. Alors la mère d’Adèle lui promet qu’elle pourra retourner en Espagne, lorsqu’elle sera en âge d’entrer en religion, si le Carmel n’est pas restauré en France. Le pays est dans la tourmente et avive encore le désir que nourrit Adèle d’offrir sa vie à Dieu et de le faire connaître.
Pour se préparer à la vie religieuse, la jeune fille pratique l’oraison quotidienne, assiste à la messe aussi souvent que possible et va même passer quelques semaines auprès d’anciennes carmélites. Elle fonde avec son amie Jeanne Diché la « Petite Société » en 1804, alors qu’elle n’a que 15 ans et demi. Les jeunes filles veulent panser les blessures spirituelles et matérielles engendrées par la Révolution française en annonçant le Christ et en prenant soin des plus nécessiteux. Dans le cœur de ces jeunes filles l’annonce de la foi et l’exercice de la charité ne font qu’un.
La « Petite Société » d’Adèle, quatre ans après sa création, s’affilie à la « Congrégation » de Bordeaux, un groupe de laïcs désireux de « multiplier les chrétiens », qui est le tout début de ce qui deviendra, fondée par le Père Chaminade en 1817, la Société de Marie (marianistes). Il faut quelques années de plus à la jeune femme pour mûrir ce qu’elle appelle son « cher projet » et fonder, en 1816, le couvent des Filles de Marie Immaculée qui deviendra, plus tard, l’Institut des Filles de Marie Immaculée. Adèle de Batz vient de fonder l’une des quatre branches de la Famille marianiste qui compte les fraternités de laïcs (Communautés laïques marianistes), un institut séculier féminin (l’Alliance Mariale), des religieuses (Institut des Filles de Marie) et des religieux, frères et prêtres (Société de Marie). En 1824, Mgr Jacoupy approuve par écrit l’Institut des Filles de Marie qui dispensent le catéchisme, font gratuitement l’école aux enfants pauvres, prêchent des retraites, viennent en aide aux mendiants… La vie d’Adèle est intense mais elle ne sera pas longue, sa santé se détériore brusquement et la religieuse remet son âme à Dieu le 10 janvier 1828 alors qu’elle n’avait pas encore 40 ans.
Un peu plus d’un siècle plus tard, le 5 juin 1986, le pape Jean-Paul II reconnaît les vertus héroïques d’Adèle. Commence alors la longue procédure du procès en béatification. Après la reconnaissance par les médecins du Vatican du miracle attribué à Adèle, le pape François a signé le décret le 4 mai 2017 et la messe de béatification a été célébrée le 10 juin par Mgr Herbreteau à Agen, en présence du cardinal Amato, préfet de la Congrégation pour les causes des saints.