Au quotidien n° 158 : guerre froide sous-marine

Publié le 01 Mar 2021
Au quotidien n° 158 : guerre froide sous-marine L'Homme Nouveau

Chroniqueur de L’Opinion (2 février) et spécialiste des questions de défense, Jean-Dominique Merchet souligne la guerre froide sous-marine que se livrent actuellement les États-Unis et la Chine, avec aussi une présence française, réelle bien que discrète.

Le déploiement de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins chinois menaçant les Etats-Unis est un enjeu caché de la crise de la mer de Chine méridionale. Le SNA français L’Emeraude y était récemment.

Lors de ses vœux aux armées, le 19 janvier, le président Macron a annoncé qu’« en ce moment même, un sous-marin manifeste l’attachement de la France au principe du droit de la mer, loin d’ici, en Asie ». Il s’agissait d’un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) — l’Emeraude. Ce n’est pas la première fois qu’un bateau de la Marine nationale opère dans les eaux internationales de la mer de Chine méridionale, mais l’engagement d’un SNA est un signal plus fort que celui d’une frégate de surveillance.

Entre Pékin et Washington, une grande bataille se déroule en mer de Chine méridionale, mais elle reste invisible et secrète. C’est la guerre froide des sous-marins nucléaires qui parcourent cet espace plus grand que la Méditerranée (3,5 millions de km2) et dont la topographie des reliefs sous-marins constitue un enjeu stratégique. Un géographe français, François-Xavier Bonnet (CNRS), a récemment levé une petite partie du voile dans un article de la revue Hérodote intitulé « Cartographie des voies sous-marines en Asie du Sud-Est », centré autour de la question des îles Spratleys, dont la Chine entend s’assurer l’entier contrôle alors qu’elles sont, pour partie, revendiquées par cinq autres Etats voisins. Se fondant sur la bathymétrie (mesure de la profondeur), le géographe les décrit comme « traversées par de profonds canyons qui sont autant d’autoroutes pour les sous-marins ».

(…) Pour rester discrets, les sous-marins nucléaires préfèrent naviguer dans des secteurs où la mer est profonde, même s’ils ne plongent pas au-delà de 500 mètres environ. « Les sous-marins ne se cachent pas au fond des canyons, comme dans le film Octobre rouge », sourit un spécialiste. Ils recherchent plutôt les eaux situées sur les pentes ou le talus des reliefs abrupts. Là, par exemple, où le plateau continental (200 mètres) ou les îles s’enfoncent vers les grandes profondeurs à plusieurs milliers de mètres. C’est, par exemple, le cas autour de l’île de Malte, en Méditerranée.

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