Dans le dernier numéro de Marianne (17 décembre 2020) Natacha Polony revient sur le projet de referendum sur l’écologie, en pointant quelques paradoxes.
La virtualisation de nos existences a progressé à grands pas, les représentants d’un art de vivre fait de partage et de proximité sont à l’agonie, et le président de la République annonce un référendum pour intégrer le souci environnemental à la Constitution. (…) Dans le même temps, Emmanuel Macron a bien fait comprendre que le Ceta, le traité de libre-échange avec le Canada, qui organise le massacre de l’agriculture paysanne au profit du modèle industriel nord-américain, serait mis en œuvre. (…) Notre époque, qui a su si brillamment remplacer la poésie par les classifications administratives, s’efforce de réduire notre souci de préserver un monde vivable à une démarche comptable. Combien de particules fines en moins ? Combien d’énergie économisée par tel investissement ? Pour quel rendement ? L’écologie sera au cœur de la prochaine campagne présidentielle, parce que les politiques ont renoncé à tout le reste. (…) Paradoxalement, alors même que les problèmes environnementaux sont planétaires, il n’est d’écologie que patriote, en ce sens qu’elle doit consister à préserver un territoire dans son identité, c’est-à-dire ce que font de lui la géologie, l’air, la lumière… Tel est le véritable droit du sol : le fait, pour les hommes, de comprendre le territoire où ils résident et de lui permettre de donner tout ce qu’il peut plutôt que de l’exploiter en le standardisant. Et c’est en produisant au plus près des lieux de consommation, en recréant des bassins de travail, d’échange, de vie, partout, sur chaque territoire, qu’on limite le massacre de la nature et des hommes.