Au quotidien-n°15 (Revue de presse du confinement)

Publié le 08 Avr 2020
Au quotidien-n°15 (Revue de presse du confinement) L'Homme Nouveau

Dans Présent (7 avril) quelques conseils pratiques pour faire face au confinement, et qui se terminent par une ode à la…monarchie.

Plutôt que d’évacuer notre frustration d’être enfermés en dénonçant, fût-ce à juste titre, les fautes de Macron (aurions-nous fait mieux à sa place ?), ou en élaborant des théories complotistes farfelues (l’Amérique lancerait une attaque biologique faisant plus de morts chez elle qu’en Chine ?), soyons modestes, arrêtons de faire les malins, avouons que nous ne savons pas tout et qu’il est des phénomènes naturels qui nous dépassent. Et reconnaissons que c’est d’abord la démesure de notre civilisation, à laquelle nous participons pleinement, qui est à l’origine de ce mal. Est-ce à dire que la politique est impuissante ? Bien sûr que non. Cela signifie que la politique doit, elle aussi, faire preuve d’humilité. Loin d’être un abaissement, l’humilité, du latin humus (la terre), consiste à garder les pieds sur terre et à connaître ses limites. A travers la vertu de prudence, elle est au cœur de la philosophie politique aristotélico-thomiste, et au fondement de l’empirisme organisateur maurrassien : tirer des enseignements du passé plutôt que de spéculer sur des théories abstraites. Or la monarchie, justement, dans la mesure où elle respecte une tradition et apprend sans cesse de ses erreurs, dans la mesure aussi où elle protège les petites patries régionales, favorise les circuits courts et permet une vie à taille humaine, est un régime profondément humble. Ce qu’avait parfaitement compris Pierre Boutang : « Bien loin que ce nationalisme fût une doctrine d’orgueil, il suspendait tous les bonheurs du monde à l’acte d’humilité initial, la reconnaissance d’une finitude originelle : je nais ici, et non ailleurs, fils d’une famille, héritier d’un nom. »

On a beaucoup parlé d’un retour à la littérature à l’occasion du confinement. Un article des Études (avril) pointe les effets de la massification de celle-ci.

La massification met en question la littérature en tant qu’autorité légitime en opérant un net mouvement de déligitimation de sa production, de sa valeur comme des instances du champ littéraire. Paradoxalement, le nombre frappe d’illégitimité toutes ces instances dans le moment même où elle les légitime toutes. Il va de soi que, si tout le monde est écrivain, plus personne ne l’est et que c’est précisément la possibilité de distinguer ces instances selon leur juste valeur qui permet de donner une légitimité véritable. Sans une échelle de valeurs commune, encadrante et structurante, non seulement l’exercice des droits et la reconnaissance des statuts se compliquent mais, sans s’abolir, ils recréent un ordre d’une autre nature, des divisions souterraines, une échelle de valeurs invisible dont les enjeux ne dépendent plus intrinsèquement de la littérature même, mais se régissent en propre par l’économie : si la littérature abandonne toute forme d’évaluation, c’est à ses dépens qu’une évaluation, d’un autre ordre, se crée. Ce n’est pas pour constituer un nouvel ordre moral qu’une classification de valeurs s’impose mais bien pour éviter, au contraire, qu’une classification se crée pernicieusement sur d’autres règles, non éthiques, non égalitaires, susceptibles de ne satisfaire qu’une minorité nantie. Dans l’indifférenciation et la confusion des statuts, la littérature, dédaigneuse des classifications, ne conduit pas à une forme de désordre mais, agissant de la sorte, elle se laisse conduire par un seul ordre – économique, marchand – et il n’est que de constater les classements des best-sellers qui font référence pour tous les acteurs de la chaîne du livre. Le désordre apparent est un ordre d’une autre nature, qui comporte son propre vice et sa propre injustice… (…)La crise de la littérature n’est pas une crise de nature mais également, et tout à la fois, une crise de culture et de structure, elle est une crise de son développement économique affectant les fondations de son idéal démocrate. L’ultralibéralisme qu’elle s’est choisi pour réguler son fonctionnement, qui surproduit et vend sans distinguer clairement, par des appellations ou des labels, les best-sellers internationaux, la littérature commerciale et la littérature exigeante (on parle aujourd’hui de « littérature complexe »), n’est pas sans créer un effet de nivellement général au sein d’une vaste nébuleuse : l’abondance de textes très variés est difficilement estimable dans la mesure où leur enjeu – celui qui permettait de juger de leur littérarité – n’est plus essentiellement poétique mais thématique.

La Revue des Deux Mondes consacre (mars) son dernier numéro à un hommage à Milan Kundera. Pourquoi Kundera ?

« Parce que, enfin, il fut l’un des premiers à dénoncer notre aveuglement face à l’effacement de la culture européenne ». répond Valerie Toronian.

Malheureusement il est d’autres raisons, qui montrent que la conversion intellectuelle, de ceux qui déplorent les maux du temps en se référant à l’écrivain, n’est pas complétement achevée puisque parmi les raisons de le célébrer il y a le fait que Kundera

nous replonge dans ce que « les Lumières avaient de meilleur et que nous avons fini par oublier tant ces dernières ont aussi leurs travers, ou plutôt une descendance fâcheuse  », souligne l’historien (Jacques de Saint-Victor, ndlr). « Kundera répare notre propre expérience de lecteur en rappelant le legs profond du XVIIIe siècle. Il reprend à son compte un héritage d’intelligence corrosive ou tout simplement affûtée. »

Chaque matin, la rédaction de L’Homme Nouveau vous propose une courte revue de presse, principalement axée sur la réflexion (sans dédaigner l’information pure). Nous ne cherchons pas d’abord à faire du clic, pour nourrir des statistiques et l’auto-satisfaction. Notre démarche est plus simple et repose sur une conviction presque simpliste : « demain se prépare aujourd’hui ». Dans ce sens, depuis des années, L’Homme Nouveau propose un regard différent, loin des clivages faciles dans le but d’offrir les outils conceptuels, les habitus de réflexion pour reconstruire une société humaine et chrétienne.

La Revue de presse de L’Homme Nouveau ne se contente pas de proposer des informations éphémères, mais vous offre aussi de découvrir des réflexions. Elle est là pour nous inviter à réfléchir. En ce sens, elle ne perd (presque) rien de son actualité. Elle se lit et se relit.

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