Au quotidien-n°27 (Revue de presse du confinement)

Publié le 25 Avr 2020
Au quotidien-n°27 (Revue de presse du confinement) L'Homme Nouveau

Chaque matin, la rédaction de L’Homme Nouveau vous propose une courte revue de presse, principalement axée sur la réflexion (sans dédaigner l’information pure). Nous ne cherchons pas d’abord à faire du clic, pour nourrir des statistiques et l’auto-satisfaction. Notre démarche est plus simple et repose sur une conviction presque simpliste : « demain se prépare aujourd’hui ». Dans ce sens, depuis des années, L’Homme Nouveau propose un regard différent, loin des clivages faciles dans le but d’offrir les outils conceptuels, les habitus de réflexion pour reconstruire une société humaine et chrétienne.

Le Point (23 avril) a demandé à Jacques Bichot, économiste et récent auteur du livre Le Labyrinthe. Compliquer pour régner (Les Belles Lettres, « Manitoba ») son analyse de la bureaucratie à la française :

Un bureaucrate s’occupe souvent d’un domaine assez limité, dans un système cloisonné. Prenons-en un, par exemple, affecté à la signalisation routière. Comme chacun de nous, il se prend pour « le phénix des hôtes de ces bois », à l’instar du corbeau de La Fontaine. Et il a envie de faire entendre son ramage : de donner moult consignes, de rédiger moult textes, de faire implanter ou modifier moult panneaux routiers, etc. : son « moi » l’exige, sa fonction doit avoir une importance aussi voisine que possible de celle de son ministre. Dans une forte proportion des cas, le ministre des Transports est content de voir son subordonné lui donner l’occasion d’expliquer à ses concitoyens combien il est actif dans ses fonctions et à leur service. Et comme il n’y a pas, ni à l’Élysée ni à Matignon, que des Pompidou, des hommes d’État capables de dire à leurs ministres : « Arrêtez d’emmerder les Français », les bureaucrates sont peu freinés quand ils commettent des abus de pouvoir ou de réglementation. (…) Depuis plus de dix ans, les agences régionales de santé ont poussé à la réduction du nombre de lits dans les hôpitaux. La sortie quelques heures après l’opération devait réduire fortement les dépenses hospitalières en même temps que le nombre de lits. En réalité, un lit inoccupé ne coûte pas grand-chose et un lit occupé par une personne récemment opérée coûte moins que l’intervention à domicile d’un infirmier libéral. Le service rendu est plus coûteux, alors que l’Administration a choisi cette formule pour faire des économies.  Second exemple, l’usine de fabrication de masques de Plaintel, en Bretagne, qui pouvait en produire de grandes quantités. Les autorités dites compétentes ont autorisé son rachat en 2018 par une entreprise de santé américaine, qui a fermé le site, démantelé l’usine et transféré la production dans un pays à main-d’œuvre bon marché. Bravo pour la compétence, pour le sens des intérêts stratégiques de la France !

Justement, la Bretagne s’interroge sur la renaissance possible de l’usine de Plaintel (cf. ci-dessus) comme l’indique Libération (23 avril) :

Il y a plusieurs acteurs locaux qui se sont mobilisés pour ce beau projet, à Plaintel ou dans les environs. Il y a un groupe de travail autour de Jean-Jacques Fuan, l’ancien directeur du site, mais aussi d’autres acteurs, notamment coopératifs. La région a donc missionné l’ancien conseiller régional et ancien secrétaire d’Etat Guy Hascoët, dont on connaît les talents pour coordonner le travail de ces différents porteurs de projets. La maire de Saint-Brieuc et présidente de Saint-Brieuc Agglomération, Marie-Claire Diouron, le président du conseil général des Côtes-d’Armor, Alain Cadec, et moi-même (Loïg Chesnais-Girard, président de la région Bretagne) sommes également disponibles pour accompagner ce projet. Mais il ne s’agit pas de faire inutilement rêver les gens ou de créer des tensions. Il ne verra le jour que s’il a un véritable sens économique. (…) Il faut d’abord un lieu, des bâtiments, des machines, ce pour quoi les collectivités peuvent apporter des garanties. Un tel projet suppose toutefois d’avoir également des clients sur le long terme, un an, deux ans, davantage. Si des entreprises de l’agroalimentaire s’engageaient par exemple sur la fourniture ne serait-ce que de 10% de leurs besoins en masques sur cinq ans, ce serait déjà quelque chose. (…) Je sais que ce projet est empreint d’une forte charge émotionnelle et je ne veux pas donner de faux espoirs. Ceci étant, il est souhaitable que la production de masques ne se limite pas à trois grands industriels français or le projet de Plaintel pourrait être particulièrement pertinent en termes de développement industriel, d’aménagement du territoire et de solidarité nationale.

Dans Le Monde (24 avril), Monique Boutrand (CFDT-cadres) signe une tribune dans laquelle elle appelle à s’interroger sur les politiques de développement des maisons de retraite. Et si on revenait à un vieillissement à la maison ?

Nous ne savons pas encore avec quelle ampleur la pandémie de Covid-19 frappera les personnes âgées vivant en établissement en France, mais l’évolution de la courbe, pour autant que les chiffres soient vérifiés, a de quoi inquiéter. Elle montre que l’on pourrait rapidement déplorer plus de décès dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) que dans tous les hôpitaux réunis. Pourtant, les familles, les personnes âgées elles-mêmes quand elles l’ont choisi, ont opté pour ce mode d’hébergement, afin que ces dernières soient mieux protégées qu’à leur domicile. Ce virus pourrait conduire à interroger ces choix individuels, mais surtout à reconsidérer des politiques publiques anciennes qui ont encouragé le développement massif de maisons de retraite en France, décisions qu’il convient aujourd’hui de questionner. (…)uoi qu’il en soit, l’hécatombe actuelle dans nos Ehpad doit nous faire réfléchir. Des voix s’élèvent pour demander d’urgence une loi sur la dépendance. Encore une ! Si nous changions plutôt complètement de regard sur le vieillissement ? (…) Reconstruire une politique de la longévité peut, et doit, se faire sur trois axes essentiels. Premièrement, un engagement national fort à investir dans de nouvelles politiques de logement et de services pour permettre le maintien à domicile. Ensuite, une reconnaissance des métiers liés à l’accompagnement des personnes âgées, passant en premier lieu par des rémunérations à la hauteur de l’engagement des salariés. Enfin, un soutien aux multiples initiatives locales qui développent déjà des services de proximité, comme l’a fait, dès 1999, le département de la Corrèze, avec un service aux âgés isolés, « Présence 19 », devenu aujourd’hui « Corrèze téléassistance ». Bien des enseignements pourraient être tirés de cette expérience déjà ancienne.

Cette Revue de presse ne se contente pas de proposer des informations éphémères, mais vous offre aussi de découvrir des réflexions. Elle est là pour nous inviter à réfléchir. En ce sens, elle ne perd (presque) rien de son actualité. Elle se lit et se relit.

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