Au quotidien n°278 : overdose de sondages

Publié le 27 Oct 2021
Au quotidien n°278 : overdose de sondages L'Homme Nouveau

Les sondages n’ont-ils pas pris dans la vie politique des Français une place de plus en plus importante, comme instrument d’information mais aussi de contrôle social ? Certains se posent la question. Sans aller jusque là, L’Humanité note une overdose que le quotidien communiste non repenti traduit par une « gueule de bois démocratique ». Mais n’est-ce pas plutôt l’accomplissement de la démocratie ?

C’est une décision éditoriale forte. Ouest-France, journal le plus vendu en France, a fait savoir, le 24 octobre, qu’il ne publierait ni ne commenterait plus aucun sondage d’intentions de vote jusqu’à la fin de la présidentielle de 2022. «  Le temps passé à les commenter détourne les personnalités politiques et les médias de l’essentiel : la rencontre avec les citoyens, l’échange approfondi, le débat d’idées », justifie le rédacteur en chef du quotidien régional, François-Xavier Lefranc.

Cette annonce intervient dans un contexte général d’inflation sondagière. La campagne de 2002 avait fait l’objet de 193 sondages. Il y en a eu 409 en 2012, 563 en 2017. Dans l’optique de l’élection de 2022, la Commission des sondages en dénombre déjà 44 depuis le 1er janvier 2021. Qui les commande ? Des médias ou des formations politiques. Qui les réalise ? Des noms désormais familiers du débat public : Ifop, Ipsos, Elabe, BVA, Harris Interactive… Ces entreprises – bien qu’on les qualifie d’« instituts » de sondage – sont en concurrence sur le marché de l’opinion, même si les sondages politiques ne représentent qu’une part substantielle de leur chiffre d’affaires (c’est moins de 1 % de l’activité d’Harris Interactive, par exemple). L’essentiel de leurs recettes provenant d’enquêtes de lancement de produits ou de satisfaction à destination d’entreprises commerciales.

Toujours est-il qu’on n’a jamais autant sondé les Français sur leurs intentions de vote que maintenant. Or, la période se caractérise par une forte instabilité et fracturation du paysage politique. Le traditionnel clivage gauche de gouvernement/droite de gouvernement s’est effrité, et avec lui une grande partie du vote partisan. L’électorat est plus volatil et indécis qu’il ne l’a jamais été. Un paradoxe qui a fait dire au sondeur et politologue Jérôme Sainte-Marie ­(PollingVox) : « Jamais les sondages n’ont autant d’influence politique qu’au moment où ils ont le moins de réalité. »

Ce contenu pourrait vous intéresser

SociétéLectures

L’inégalité, un outil de civilisation ?

Entretien | Juriste et historien, Jean-Louis Harouel s’attaque dans un livre récemment paru au mythe de l’égalité. Il postule que cette « passion laide » contemporaine, destructrice de la famille, entre autres, ne sert en rien les intérêts d’une population, en montrant que seule l’inégalité, créatrice de richesses, encourage la production et par là-même augmente le niveau de vie et conditionne le progrès moral et scientifique. Entretien avec Jean-Louis Harouel sur son livre Les Mensonges de l’égalité. Ce mal qui ronge la France et l’Occident.

+

égalité mythe
SociétéEglise de France

Pandémie : un avant-goût de la restriction des libertés fondamentales ?

Entretien | Le colloque « Pandémie, Droit et Cultes » s’est tenu à Paris en mars 2022. Ses actes rappellent qu’entre 2020 et 2022, les prérogatives de l’État ont été augmentées de manière extraordinaire au détriment des libertés essentielles, dans un renversement complet de la hiérarchie des biens. Une situation dangereuse qui pourrait bien se reproduire sous des prétextes variés. Entretien avec Guillaume Drago, co-organisateur du colloque et professeur de droit public à l’université de Paris-Panthéon-Assas.

+

pandémie liberté de culte
SociétéBioéthique

Fraternité et euthanasie : un débat sciemment faussé

Faisant droit aux revendications anciennes et répétées de certaines associations, le président Macron vient d’annoncer une loi sur l’euthanasie. Mais en usant d’un registre lexical détourné qui évoque l'« aide à mourir », l’autonomie de l’individu, les « conditions strictes » et la « fraternité »... Toutes expressions trahissent le sophisme, l’influence des officines francs-maçonnes, la solution miraculeuse aux déficits et surtout la crainte d’un vrai débat.

+

fraternité euthanasie
SociétéBioéthique

50 ans de résistance à l’avortement (3/3) : Combat contre l’avortement et transition postdémocratique

Question disputée | Combattre à temps et à contretemps en faveur de la vie humaine, de sa conception à sa mort naturelle, est une urgence née des lois mortifères mises en place par un système politique qui, loin d'être neutre, a rompu dès ses origines avec les exigences de la loi naturelle. Dès lors, n'est-il pas nécessaire de finaliser ce combat particulier en l'insérant dans une perspective plus large ?

+

AdobeStock 417378513 loi sur la fin de vie