Comme Pierre et Paul, confesser Jésus, Seigneur de nos vies

Publié le 09 Juil 2017
Comme Pierre et Paul, confesser Jésus, Seigneur de nos vies L'Homme Nouveau

La tradition chrétienne considère saint Pierre et saint Paul comme inséparables. Ensemble, ils représentent en quelque sorte tout l’Évangile du Christ, Pierre le chef de l’Église, Paul le missionnaire incomparable. Leur lien comme frères martyrs de la foi a acquis un sens particulier à Rome. En effet, la communauté chrétienne de cette Ville les a toujours considérés comme les fondateurs de la Rome chrétienne, les opposant aux mythiques Romulus et Remus fondateurs de la Rome païenne. Depuis Jean-Paul II, le pape remet en ce jour le pallium aux archevêques métropolitains nommés dans l’année. Quelquefois, et c’est le cas cette année, il en profite pour créer de nouveaux cardinaux.

L’homélie du Pape s’axe autour de trois mots. D’abord la confession, mot clé de l’Évangile. Sur le chemin de Césarée de Philipe en effet, Jésus interroge ses disciples en leur posant deux questions, l’une générale, l’autre plus directe. C’est à la seconde qui est une question décisive, que Pierre répond directement et sans ambiguïté au nom des Douze : « Vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Ce ne sont pas de simples paroles de circonstance car elles ne viennent pas de la chair. C’est au contraire une révélation directe que Pierre a eue du Père lui-même. Par contre, tout de suite après, quand Jésus annonce sa passion, Pierre réagit vraiment à partir de la chair et du sang. La confession de Pierre doit devenir la nôtre. Jamais nous ne devons devenir des chrétiens mondains, de salon, qui ne cessent de se lamenter sur l’état de l’Église au lieu d’être des apôtres véritables, c’est-à-dire des témoins véridiques de Jésus. Les mots très forts du Pape à ce sujet me font penser à la réponse de sainte Teresa qui répondit du tac au tac à un journaliste qui lui demandait ce qui n’allait pas dans l’Église : « Vous et moi ». Confesser le Christ, c’est prendre le large et renouveler chaque jour, jusqu’au martyre s’il le fallait, son don de soi dans la logique du baptême.

Nous touchons là le deuxième point : les persécutions. La persécution est née avec l’Église. Le livre des Actes est formel. La lutte contre César quel qu’il soit a toujours existé ; elle durera jusqu’à la fin des temps. Le Cardinal Wyszinski écrit dans ses Notes de prison : « L’Église naquit dans le sang rédempteur du Christ crucifié, comme chaque enfant de Dieu qui vient au monde. Pour que l’enfant soit en bonne santé, il faut que le sang coule. Sa coagulation constitue un danger pour le corps humain ». Et le Pape de rappeler avec force encore une fois à la suite de ses prédécesseurs que sans la Croix non seulement il n’y a pas de Christ, mais il n’y a pas non plus de chrétiens. En lisant ces lignes, je me souviens des mots qu’il adressa aux cardinaux, le lendemain même de son élection : « Celui qui n’évangélise pas le Christ évangélise Satan ». Là encore, aucune mondanité n’est possible pour un chrétien.

Le dernier mot enfin, la prière. La confession de saint Pierre née de la révélation du Père débouche en offrande et en prière. Et il ne peut pas en être autrement. Le Pape rappelle que, comme l’eau, la prière est vitale pour l’homme. Saint Alphonse de Ligori disait : « Celui qui ne prie pas se damne ». Sans prière, il n’y a pas d’amour, car la prière véritable est le fruit de l’Esprit Saint qui est Amour. Que Marie qui priait avec les Apôtres au Cénacle avant la Pentecôte obtienne de chacun de nous un cœur pacifié par les prières. C’est un conseil à donner spécialement aux familles. Saint Jean-Paul II aimait à dire : « Une famille qui prie ensemble, reste ensemble ».

L’homélie du Pape

La liturgie de ce jour nous offre trois mots essentiels pour la vie de l’Apôtre : confession, persécution, prière.

La confession est celle de Pierre dans l’Évangile, quand la question du Seigneur, de générale devient particulière. En effet, Jésus demande d’abord : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? » (Mt 16, 13). Chez la plupart des gens, il émerge de ce « sondage » que le peuple considère Jésus comme un prophète. Alors le Maître pose aux disciples la question vraiment décisive : « Et vous ? Que dites-vous ? Pour vous qui suis-je ? » (v.15). A ce moment seul Pierre répond : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (v. 16). Voilà la confession : reconnaître en Jésus le Messie attendu, le Dieu vivant, le Seigneur de sa propre vie.

Cette question vitale, Jésus l’adresse aujourd’hui à nous, à nous tous, en particulier à nous pasteurs. C’est la question décisive, devant laquelle il n’y a pas de réponses de circonstance, parce que la vie est en jeu : et la question de la vie demande une réponse de vie. Car si l’on ne confesse pas Jésus Seigneur par sa propre vie, connaître les articles de foi sert à peu de choses. Aujourd’hui Il nous regarde dans les yeux et demande : « Qui suis-je pour toi ? » Comme pour dire : « Suis-je encore, moi, le Seigneur de ta vie, la direction de ton cœur, la raison de ton espérance, ta confiance indestructible ? ». Avec saint Pierre, renouvelons aujourd’hui, nous aussi, notre choix de vie comme disciples et apôtres. Passons de nouveau de la première à la seconde question de Jésus, pour être « à lui » non seulement en paroles, mais dans les faits et dans la vie.

Être des apôtres en chemin

Demandons-nous si nous sommes des chrétiens de salon, qui bavardent sur la manière dont vont les choses dans l’Eglise et dans le monde, ou plutôt des apôtres en chemin, qui confessent Jésus par la vie parce qu’ils l’ont dans le cœur. Celui qui confesse Jésus sait qu’il est tenu non seulement de donner son opinion mais de donner la vie ; il sait qu’il ne peut pas croire de manière tiède mais qu’il est appelé à « brûler » d’amour ; il sait que dans la vie il ne peut « se laisser vivre » ou s’installer dans le bien être, mais qu’il doit risquer de prendre le large, renouvelant chaque jour le don de soi. Celui qui confesse Jésus fait comme Pierre et Paul : il le suit jusqu’à la fin ; non jusqu’à un certain point, mais jusqu’à la fin, et il le suit sur son chemin, non pas sur nos chemins. Son chemin est le chemin de la vie nouvelle, de la joie et de la résurrection, le chemin qui passe aussi par la croix et par les persécutions.

Voilà le second mot, persécutions. Ce ne sont pas seulement Pierre et Paul qui ont donné leur sang pour le Christ, mais toute la communauté, au début, a été persécutée, comme le rappelle le Livre des Actes des Apôtres (cf. 12, 1). Aujourd’hui aussi, en diverses parties du monde, parfois dans un climat de silence – un silence souvent complice –, beaucoup de chrétiens sont marginalisés, calomniés, discriminés, font l’objet de violences même mortelles, souvent en l’absence d’engagement de la part de ceux qui pourraient faire respecter leurs droits sacrosaints.

Mais je voudrais surtout souligner ce que l’Apôtre Paul affirme avant d’« être – comme il écrit – offert en sacrifice » (2 Tm 4, 6). Pour lui, vivre c’était le Christ (cf. Ph 1, 21), et le Christ crucifié (cf. 1 Co 2, 2), qui a donné sa vie pour lui (cf. Ga 2, 20). Ainsi, fidèle disciple, Paul a suivi le Maître en offrant lui aussi sa vie. Sans la croix il n’y a pas de Christ, mais sans la croix il n’y a pas non plus de chrétien. En effet, « c’est le propre de la vertu chrétienne, non seulement de faire le bien, mais aussi de savoir supporter les maux » (Augustin, Disc. 46, 13), comme Jésus. Supporter le mal, ce n’est pas seulement avoir de la patience et aller de l’avant avec résignation ; supporter, c’est imiter Jésus : c’est porter le poids, le porter sur ses épaules pour lui et pour les autres. C’est accepter la croix, allant de l’avant avec confiance parce que nous ne sommes pas seuls : le Seigneur crucifié et ressuscité est avec nous. Ainsi, avec Paul nous pouvons dire qu’« en toutes circonstances nous sommes dans la détresse, mais sans être angoissés ; nous sommes déconcertés, mais non désemparés ; nous sommes persécutés, mais non pas abandonnés » (2 Co 4, 8-9).

À la manière de Jésus

Supporter, c’est savoir vaincre avec Jésus à la manière de Jésus, non pas à la manière du monde. Voilà pourquoi Paul – nous l’avons entendu – se considère comme un vainqueur qui va recevoir la couronne (cf. 2Tm 4, 8) et il écrit : « J’ai mené le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi » (v. 7). L’unique conduite de son bon combat a été de vivre pour : non pour lui-même mais pour Jésus et pour les autres. Il a vécu “en courant”, c’est-à-dire sans s’épargner, mais au contraire en se consumant. Il dit avoir gardé une chose : non pas la santé, mais la foi, c’est-à-dire la confession du Christ. Par amour pour lui, il a vécu les épreuves, les humiliations et les souffrances, qu’il ne faut jamais rechercher mais accepter. Et ainsi, dans le mystère de la souffrance offerte par amour, en ce mystère que tant de frères persécutés, pauvres et malades incarnent encore aujourd’hui, resplendit la force salvifique de la croix de Jésus.

Le troisième mot est prière. La vie de l’Apôtre, qui jaillit de la confession et débouche en offrande, se déroule tous les jours dans la prière. La prière est l’eau indispensable qui nourrit l’espérance et fait grandir la confiance. La prière fait que nous nous sentons aimés et nous permet d’aimer. Elle nous fait aller de l’avant dans les moments sombres, car elle allume la lumière de Dieu. Dans l’Église c’est la prière qui nous soutient tous et nous fait surmonter les épreuves. Nous le voyons encore dans la première lecture : « Tandis que Pierre était ainsi détenu dans la prison, l’Église priait Dieu pour lui avec insistance » (Ac 12, 5). Une Église qui prie est gardée par le Seigneur et marche en sa compagnie. Prier c’est lui confier le chemin pour qu’il en prenne soin. La prière est la force qui nous unit et nous soutient, le remède contre l’isolement et l’autosuffisance qui conduisent à la mort spirituelle. Car l’Esprit de vie ne souffle pas si l’on ne prie pas, et sans prière les prisons intérieures qui nous retiennent captifs ne s’ouvrent pas.

Que les saints Apôtres nous obtiennent un cœur comme le leur, fatigué et pacifié par la prière : fatigué parce qu’il demande, frappe et intercède, chargé de beaucoup de personnes et de situations à confier ; mais en même temps pacifié, parce que l’Esprit apporte consolation et force quand on prie. Combien il est urgent dans l’Eglise d’avoir des maîtres de prière, mais avant tout d’être des hommes et des femmes de prière, qui vivent la prière !

Le Seigneur intervient quand nous prions, lui qui est fidèle à l’amour que nous lui avons confessé et qui nous est proche dans les épreuves. Il a accompagné le chemin des Apôtres et il vous accompagnera vous aussi, chers frères Cardinaux, ici réunis dans la charité des Apôtres qui ont confessé la foi par le sang. Il sera aussi proche de vous, chers frères archevêques qui, en recevant le Pallium, serez confirmés à vivre pour le troupeau, en imitant le Bon Pasteur qui vous soutient en vous portant sur ses épaules. Que le Seigneur lui-même, qui désire ardemment voir tout son troupeau réuni, bénisse et garde aussi la Délégation du Patriarche Œcuménique, et le cher frère Bartholomée, qui l’a envoyée en signe de communion apostolique.

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