Âgé de 87 ans, le pape François a probablement peu de temps devant lui pour de nouvelles réformes et la plupart de celles qu’il a entreprises lors de son pontificat ont rencontré des résistances parfois inattendues, tout en décevant les conservateurs comme les progressistes. A-t-il toutefois enclenché une dynamique irréversible ? Analyse par Roberto de Mattei*.
Le pontificat du pape François atteint son chapitre final, mais il est difficile de tenter un bilan avant sa conclusion. La caractéristique de l’époque bergoglienne est en effet l’imprévisibilité, et les rebondissements sont possibles jusqu’au bout. L’imprévisibilité vient avant tout de la personnalité du pape François. Il est difficile de comprendre dans quelle mesure les nombreuses contradictions de son comportement proviennent d’un état psychologique qui modifie les pensées et les sentiments de son esprit ou d’une formation culturelle qui fait de la dialectique l’âme de la réalité. Mais l’imprévisibilité découle également du cours des événements de la dernière décennie, dépourvus de linéarité historique et de plus en plus complexes et confus.
Le soutien des Américains
Jorge Mario Bergoglio, par exemple, n’a pas réussi au conclave de 2005 parce qu’il n’avait pas reçu le soutien du cardinal Carlo Maria Martini, son frère et chef de la « mafia saint-galloise ». En 2013, il a cependant été élu au trône papal grâce au vote décisif des cardinaux américains. Qui aurait pensé que dix ans plus tard, l’opposition la plus décisive au pape François se manifesterait précisément dans l’épiscopat américain ? Les réformes internes de l’Église étaient souhaitées aussi bien par les conservateurs que par les progressistes et le cardinal Bergoglio se présentait comme un candidat « spirituel », capable de mettre en œuvre cette réforme. Qui aurait imaginé que le pape François serait le plus « politique » des papes du siècle dernier ?, et que ses réformes auraient échoué de façon spectaculaire ? La nomination du cardinal australien George Pell comme premier préfet du Secrétariat à l’Économie, le 24 février 2014, a semblé une garantie aux conservateurs, qui se sont toutefois rendu compte que les réformes prenaient du temps et que les malentendus doctrinaux et pastoraux se multipliaient, notamment après l’exhortation apostolique Amoris Lætitia du 19 mars 2016. Quatre cardinaux éminents (Walter Brandmüller, Raymond Leo Burke, Carlo Caffarra, Joachim Meisner) ont présenté cinq dubia à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi le 16 septembre 2016. Il était peut-être prévisible…