Forum « One of us » du 12 mars 2016 : entretien avec Thierry de la Villejégu

Publié le 08 Mar 2016
Forum "One of us" du 12 mars 2016 : entretien avec Thierry de la Villejégu L'Homme Nouveau

Entretien avec Thierry de la Villejégu, directeur général de la Fondation Jérôme Lejeune

Propos recueillis par Adélaïde Pouchol

« One of us », fédération d’associations européennes de défense de la vie, lance son premier forum le 12 mars prochain. En quoi cela consiste-t-il exactement ?

Historiquement, « One of us » est le nom de l’une des premières Initiatives citoyennes européennes, dispositif que l’Union européenne a mis en place pour développer « la démocratie participative en Europe ». En 2015, l’initiative « One of Us » dénonçait le financement de la recherche sur l’embryon humain et des campagnes d’avortement extra-Union, par le budget européen. Et ceci, en contradiction avec les compétences juridiques de l’Union et en compétition avec celles des États membres qui pour certains interdisent ce type de recherche. Plus de deux millions de citoyens européens ont signé la pétition, faisant de « One of us », la première Initiative par le nombre de citoyens mobilisés. Ce très grand succès populaire n’a hélas pas été transformé en succès politique, car malheureusement la Commission de Bruxelles n’a pas joué le jeu. Elle a écarté toute discussion sur ce sujet brûlant, qui aurait pu l’amener à se prononcer sur l’identité humaine de l’enfant à naître.

À la suite de cet échec, les associations qui s’étaient démenées pour relayer l’initiative citoyenne au niveau local ont décidé de s’organiser en fédération pour pérenniser le mouvement et lui donner un cadre politique. La fédération, créée en 2014, rassemble à ce jour une trentaine d’associations à travers l’Europe. Mais pour exister, il faut se faire connaître, c’est pourquoi « One of us » organise son premier forum le 12 mars 2016 à Paris, au cours duquel les associations membres et leurs experts se retrouveront et animeront une journée de réflexion et de mobilisation pour promouvoir une culture de vie en Europe.

Quels sont les objectifs de cette fédération d’associations ?

L’union fait la force. « One of us » veut d’une part rassembler les associations de défense de la vie en aidant les initiatives locales à vocation européenne, et d’autre part agir auprès des institutions européennes, à Strasbourg comme à Bruxelles. L’objectif est de bâtir une Europe respectueuse de l’être humain, sans exception, de sa conception à sa mort naturelle, en participant aux débats, en communiquant sur les enjeux, fournissant analyses et expertises, élaborant des propositions destinées aux politiques.

D’où viennent les différentes associations regroupées par « One of us » ?

Ces associations, issues de près d’une trentaine de pays européens, sont en train d’apprendre à se connaître et à travailler ensemble grâce à l’initiative citoyenne One of us. L’un des grands bénéfices de « One of us », malgré l’échec politique devant la commission de Bruxelles, c’est précisément d’avoir joué un rôle de catalyseur en déclenchant un rapprochement, dans le monde très épars des associations de défense de la vie. Depuis, elles nouent des liens personnels, apprennent à échanger les informations, à conduire des projets communs à échelle européenne. Une révolution ! Elles sont aujourd’hui capables de mettre en commun des ressources humaines, des experts, mais aussi financières avec un budget commun et le financement de certaines actions.

Cette capacité à travailler ensemble a-t-elle déjà fait ses preuves ?

Le nombre impressionnant de signatures rassemblées pour l’initiative citoyenne One of us était déjà une belle preuve de cette capacité à travailler ensemble. Aujourd’hui, la fédération a un plan d’actions. Parmi celles-ci, relevons l’action en justice contre l’Union européenne pour qu’elle reconsidère l’initiative citoyenne, ou la pétition des experts, professionnels de la santé, du droit, ou politiques qui vise à relancer le débat sur l’identité de l’embryon humain.

Après de nombreuses manifestations et pétitions ces dernières années qui ont rarement eu le succès espéré, beaucoup estiment que cette forme d’action est inutile. Qu’en pensez-vous ?

L’efficacité d’une action dépend de notre détermination et nécessite un effort, de la volonté. Nous ne gagnerons que si nous sommes convaincus de l’importance de la cause que nous défendons et déterminés dans la durée. Nous savons bien qu’il y a toute une culture à changer, des consciences à ouvrir… et cela ne se fait pas en trois jours !

« One of us » invite donc les citoyens européens à s’engager pour la défense de la vie, à s’engager de toute leur personne et pas seulement du bout des doigts par quelques clics. Chaque personne peut devenir un ambassadeur de la vie dans son propre cercle. Si chacun est convaincu que le sujet en vaut la peine, qu’il est central pour la construction de notre société, alors il faut y consacrer son temps, et son énergie. À chacun donc de se poser cette question : quelle est l’importance de la défense de la vie humaine pour moi ?

Le forum du 12 mars prochain ne va finalement rassembler que des associations déjà acquises à la cause de la vie. Pourquoi donc organiser un tel événement ?

J’insiste sur le fait qu’apprendre à se connaître et à travailler ensemble est déjà un énorme progrès. Mais, vous l’avez fait remarquer, certaines personnes se lassent d’un combat qui leur semble perdu. Il est donc important d’avoir des temps forts pour nous galvaniser, échanger, nous rappeler qu’en travaillant ensemble, nous sommes plus forts. Ce forum suscite de nombreuses espérances pour certains et de l’hostilité du côté de ceux qui voient d’un mauvais œil le fait que One of us se prépare à rassembler plus de 1200 personnes, venues de toute l’Europe, autour du thème de la défense de la vie. C’est une bonne chose, c’est ainsi que le débat peut naître !

Et après le 12 mars, que se passera-t-il ?

Nous annoncerons officiellement lors du forum le lancement d’une pétition d’experts de la santé, du droit et de la politique, pour s’opposer à la recherche sur l’embryon humain. Une manière de continuer le combat commencé avec l’initiative citoyenne, mais sous un autre angle, probablement plus médiatique. Nous développons un « life book » européen pour faire une photographie de la situation de la défense de la vie en Europe, pays par pays. Il s’agit de situer chaque pays par rapport aux grandes thématiques de la vie, et d’offrir ainsi un support de travail, utile aux politiques et aux journalistes. Nous renforçons également notre travail à Bruxelles et Strasbourg, auprès des institutions européennes, sur les principales transgressions que subit notre société : euthanasie, GPA, PMA, etc… Pour autant, parler de One of us comme d’un lobby serait réducteur car la force de cette fédération, c’est justement d’être d’abord ancrée localement à travers chacune des associations qui la composent, et d’avoir ainsi une connaissance précise et concrète du terrain. C’est celle-ci qui nous donne la solidité, la crédibilité, la représentativité nécessaire pour faire des propositions à l’Union européenne. 

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