Fraternité et euthanasie : un débat sciemment faussé

Publié le 05 Avr 2024
fraternité euthanasie

La fraternité proclamée aux frontons de nos édifices publics implique-t-elle de tuer son semblable ?

Faisant droit aux revendications anciennes et répétées de certaines associations, le président Macron vient d’annoncer une loi sur l’euthanasie. Mais en usant d’un registre lexical détourné qui évoque l’« aide à mourir », l’autonomie de l’individu, les « conditions strictes » et la « fraternité »… Toutes expressions trahissent le sophisme, l’influence des officines francs-maçonnes, la solution miraculeuse aux déficits et surtout la crainte d’un vrai débat.

 
« Nous allons présenter une loi de fraternité qui concilie l’autonomie de l’individu et la solidarité de la Nation. Nous voulons ouvrir la possibilité de demander une aide à mourir dans des conditions strictes. […] Ce sera une vraie révolution d’humanité et de fraternité », déclarait Emmanuel Macron en annonçant la prochaine discussion d’un projet de loi sur « la fin de vie ». Le moins que l’on puisse dire est que ce débat commence fort mal, se plaçant sur le terrain mouvant des mots piégés et des expressions trompeuses qui caractérisent depuis vingt-cinq siècles la rhétorique des sophistes. Le gouvernement est si peu sûr de la valeur morale de son projet qu’il n’ose pas le qualifier avec précision en employant les mots exacts.  

Éliminer les grands malades

Ce que le chef de l’État appelle « accompagner la fin de vie » camoufle en réalité la volonté de légaliser l’euthanasie, c’est-à-dire l’élimination médicale de grands malades, ainsi que le « suicide assisté ». La fin de vie n’a pas attendu, en effet, la présidence d’Emmanuel Macron pour être « accompagnée ». Accompagner ceux qui vont mourir est, en effet, un usage social aussi vieux que le monde, consacré par l’Église qui offre aux agonisants les secours de la religion et la grâce des derniers sacrements. Depuis plusieurs décennies, la médecine se montre, en outre, heureusement, beaucoup plus soucieuse d’écouter et de soulager la souffrance physique des grands malades, usant, pour ce faire, de moyens efficaces, qualifiés de « soins palliatifs », qu’il suffirait de développer en établissant dans chaque département des services dévolus à ces soins. Sophisme supplémentaire, cette loi de légalisation de l’euthanasie est présentée comme une « loi de fraternité », ce qui a fait justement réagir la conférence épiscopale ; Mgr de Moulins-Beaufort soulignant qu’« appeler “loi de fraternité” un texte qui [légalise] le suicide assisté et l’euthanasie est une tromperie ». La fraternité est à l’euthanasie ce que la…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Philippe Pichot Bravard

Ce contenu pourrait vous intéresser

SociétéPhilosophie

L’organicisme, une pensée matérialiste et fataliste

L'Essentiel de Joël Hautebert | Hérité des Lumières et du naturalisme du XIXe siècle, l’organicisme est un concept d’analogie encore utilisé aujourd’hui et qui a inspiré la sociologie. Si l’idée peut paraître juste, elle mène cependant au déterminisme, faisant de l’homme un être purement matériel, somme toute similaire aux végétaux et animaux.

+

organicisme
Société

Mont-Saint-Michel : faire le pont avec l’Archange

Entretien | La première édition du pèlerinage de Saint-Michel aura lieu du 8 au 11 mai 2025. Il commencera à Saint-Malo pour se finir au pied du Mont-Saint-Michel. Entretien avec Brieuc Clerc, président de l’association Pèlerinage de Saint-Michel. 

+

mont-saint-michel
SociétéLettre Reconstruire

Carlos Sacheri : Le travail humain (II)

Lettre Reconstruire n° 45 | Extraits | Dans notre précédent numéro (Reconstruire n°44), nous avons publié l’étude de Carlos Sacheri sur le travail humain. L’auteur présentait succinctement les conceptions libérales et marxistes à ce sujet. Nous continuons ici en abordant le travail selon une conception conforme à la loi naturelle.

+

travail humain carlos sacheri
SociétéLettre Reconstruire

Du pouvoir dans la modernité et la postmodernité

Lettre Reconstruire n° 45 (mars 2025) | La Bibliothèque politique et sociale | L’extension sans fin de l’État moderne que des épisodes récents, comme la gestion de la crise liée au Covid-19 ou actuellement la « guerre » déclarée entre la France et la Russie, mettent en évidence, conduit immanquablement à s’intéresser à la question du « pouvoir ». Javier Barraycoa a consacré un petit essai sur la situation du pouvoir dans nos sociétés postmodernes. Traduit en français, Du pouvoir bénéficie d’une substantielle préface de Thibaud Collin dont le titre indique tout l’intérêt.

+

du pouvoir dans la modernité et postmodernité
SociétéPhilosophie

Le sens des mots et le véritable enjeu du langage

C'est logique ! de François-Marie Portes | En tant que matière vivante, le langage évolue nécessairement et s’enrichit souvent de nouveaux mots pour exprimer au mieux la pensée. Mais certains néologismes sont utilisés pour nourrir des luttes idéologiques et dérivent alors de leur sens littéral. C’est notamment le cas du terme « homophobie » que l’on entend partout. 

+

sens des mots
Société

Intelligence artificielle (5/5) : L’IA à l’épreuve de la trisomie 21

DOSSIER « L’intelligence artificielle : entre innovation et responsabilité » | La trisomie 21 est caractérisée par une déficience intellectuelle mais celle-ci permet de souligner les autres formes d’intelligence – relationnelle, affective, de communication... – que les porteurs de trisomie possèdent souvent à un haut degré, faisant ressortir les pauvretés de l’intelligence artificielle. Démonstration que l’humanité ne se définit pas par des critères de performance mesurables. Entretien avec Grégoire François-Dainville directeur de la Fondation Jérôme Lejeune.

+

Intelligence artificielle IA trisomie 21