Première grande solennité de l’année liturgique, la fête de l’Immaculée Conception touche les cœurs de tous les fidèles, petits et grands, humbles et puissants. Dogme déclaré seulement en 1854, qui furent les apôtres de Marie la très pure ? Retour sur quelques figures majeures de ce mystère marial.
L’Immaculée Conception de Notre-Dame nous invite à approfondir, d’une part, l’attente du Messie qui se manifestera dans la nuit de Noël, d’autre part, un aspect fondamental de l’Incarnation du Verbe. Dieu voulut envoyer son propre fils pour nous sauver, et c’est dans le sanctuaire virginal de Marie qu’il accomplit ce véritable prodige d’amour.
Si la Conception Immaculée de la Sainte Vierge ne fut élevée au nombre des dogmes de foi que le 8 décembre 1854 (constitution apostolique Ineffabilis Deus du bienheureux Pie IX), la tradition constante de l’Église prouve que cette croyance fut communément tenue et acceptée par une grande partie des fidèles depuis l’aurore du christianisme.
Il faut toutefois reconnaître que la maturation d’une telle vérité advint dans un contexte de vive controverse et qu’elle fut ralentie par les réserves notoires que prononcèrent à son encontre d’illustres docteurs tels qu’un saint Bernard ou un saint Thomas d’Aquin. En revanche, quelques figures, parmi les plus humbles de notre histoire, ont contribué à mettre progressivement en lumière la vérité, la beauté et la fécondité de ce grand mystère.
Le bienheureux Duns Scott : rédemption universelle et salut anticipé
Le fameux théologien écossais, Jean Duns Scott (1266-1308), fut le premier grand maître franciscain à défendre l’Immaculée Conception de Notre-Dame dans une perspective, non plus mystique et allégorique, mais proprement dogmatique et systématique. Sa pensée, si complexe qu’elle lui vaudra d’être surnommé le « Docteur Subtile », brille par la clarté jetée sur un pan conséquent de la mariologie, et notamment, par l’intuition prophétique qui justifie l’exemption de Notre-Dame.
Pour définir le dogme de l’Immaculée Conception, le bienheureux Pie IX recourra amplement à ses écrits, lui empruntant son argument charnière : le Christ a sauvé tous les hommes, mais la Vierge Marie a bénéficié d’un salut de privilège en accueillant la grâce préventive de l’exemption.
Pierre d’Ailly : le triomphe des franciscains face aux doctrines « maculistes »
La doctrine du bienheureux Duns Scot n’emporta pas l’adhésion des théologiens dominicains. Ces derniers professaient une défiance à peine voilée, sinon une opposition farouche, vis-à-vis de l’Immaculée Conception de Notre-Dame, suspecte à leurs yeux d’avoir trop souvent légitimé le gnosticisme ou l’encratisme des premiers hérésiarques. La discussion qui opposa les deux ordres mendiants – les franciscains « immaculistes » aux dominicains « maculistes » – devait perdurer au long des siècles et atteindre son paroxysme au milieu du XIV° siècle.
La Sorbonne, premier centre intellectuel de l’Europe chrétienne, semblait comme paralysée par la rivalité incessante des deux partis. En 1388, Pierre d’Ailly, alors aumônier du roi Charles VI, se rendit à Avignon pour défendre devant l’antipape Clément VII l’Immaculée Conception de Marie. Sa plaidoirie, accueillie très favorablement, provoqua l’exclusion immédiate des maîtres dominicains, tant de la cour pontificale que de l’entourage royal ; elle changea durablement l’orientation de la théologie, qui devint généralement favorable à l’idée de la Conception Immaculée de Marie, dès lors distillée dans les livres liturgiques ou les pratiques de piété.
Sainte Catherine Labouré et les premiers pas d’une dévotion maîtresse
Le 27 novembre 1830, la Sainte Vierge apparut à sainte Catherine Labouré dans la chapelle des Filles de la Charité, située rue du Bac, à Paris. Notre-Dame confia à la religieuse une double mission, qui devait conférer une authentique universalité à la dévotion, et hâter les préparatifs des docteurs en vue de la déclaration dogmatique.
La première de ces missions fut la confection et la divulgation d’une médaille – depuis connue sous le nom de « Médaille Miraculeuse » – sur laquelle figurait l’inscription : « O Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous ». La Sainte Vierge demanda en outre la fondation d’une congrégation en l’honneur de son insigne privilège, qui fut érigée en 1837 par les Lazaristes sous le vocable des « Enfants de Marie Immaculée ».
Sainte Bernadette de Lourdes : l’Immaculée Conception comme privilège et comme personne
Le Ciel qui avait anticipé l’effort des théologiens par une abondante pluie de grâces et de bénédictions, ne laissa pas de confirmer l’intuition du bienheureux Pie IX par une nouvelle apparition mariale. Le 25 mars 1858, Notre-Dame apparut à une humble bergère de Lourdes, sur les rives du Gave, et lui dit en gascon : « Je suis l’Immaculée Conception ». Fait anodin, la Vierge Marie exprimait ainsi le désir d’être désignée par un fait, et non plus par un titre, pour indiquer peut-être plus clairement combien ce privilège contenait en germe la totalité de son être, de son existence, de sa mission devant Dieu et devant les hommes.
Saint Maximilien Kolbe : la Vierge Marie au cœur du mystère trinitaire
Les apparitions de Lourdes constitueraient le fondement du discernement vocationnel et de la réflexion spirituelle de saint Maximilien Kolbe, qui replacerait cet auguste mystère au sein même de la vie trinitaire, comme une réalité inhérente à l’action du Saint-Esprit.
C’est ainsi qu’il parviendrait à élucider les paroles adressées par la Vierge Marie à Bernadette Soubirous : « Si chez les créatures l’épouse prend le nom de l’époux parce qu’elle lui appartient, ne fait qu’un avec lui, devient son égale et est avec lui principe créateur de vie, à combien plus forte raison le nom de l’Esprit Saint, Conception Immaculée, est-il le nom de Celle en qui Il vit comme Amour, principe de vie dans tout l’ordre surnaturel de la grâce ».
Voir le Club des Hommes en noir : Immaculée Conception : mythe ou réalité ?