Irlande : Les propositions de modification de la Constitution rejetées

Publié le 21 Mar 2024
Irlande

Discours du Premier Ministre Leo Varadkar aux côtés des leaders de la coalition du gouvernement irlandais. © Houses of the Oireachtas, CC BY 2.0

Le 8 mars 2024, l’Irlande a voté contre la modification de l’article 41 de la Constitution, qui porte sur le rôle de la femme au foyer et du mariage comme base de la famille. Le gouvernement proposait d’élargir la notion de famille et de modifier l’aide de l’état aux mères au foyer.

 

Le 8 mars dernier, alors que la France inscrivait le droit de recours à l’avortement dans sa Constitution, l’Irlande rejetait le referendum visant à modifier la sienne, et particulièrement les passages sur la famille et le rôle domestique de la mère.

L’article 41 établit en effet que la famille, « groupe naturel, primaire et fondamental de la Société » (alinéa 1), se fonde sur « l’institution du mariage » (alinéa 3). L’alinéa 2 du même article reconnaît par ailleurs que « par sa vie au foyer, la femme apporte à l’État un soutien sans lequel le bien commun ne peut être atteint ». Par conséquent, l’État doit s’efforcer de « veiller à ce que les mères ne soient pas obligées par les nécessités économiques à travailler en négligeant les devoirs de leurs foyers ».  

La Constitution de l’Irlande, rédigée en 1937 sous la présidence de l’indépendantiste catholique Éamon De Valera, est encore aujourd’hui à forte connotation catholique. Le projet de modification de la Constitution, porté par le gouvernement de centre droit et son premier ministre Leo Varadkar, proposait d’élargir la notion de famille à toutes les « relations durables », et de remplacer la notion de femme au foyer par tous les « proches aidants » et « membres de la famille ».  

 

Une majorité de « non »

La participation au referendum a été relativement faible, 44 % de votants, mais les résultats étaient sans équivoque. À la première question, portant sur la définition de la famille, le « non » l’a remporté à 67,69 %. Pour ce qui est de la seconde question, sur l’élargissement du rôle domestique à tous les membres de la famille, les Irlandais ont refusé à 74 %. La faible participation est en partie due au fait d’une portée simplement sémantique et symbolique, contrairement au « Mariage pour tous » qui a mobilisé plus de 60 % d’Irlandais en 2015 et à l’avortement, qui en a mobilisé 55 % en 2018.  

Pour le Premier Ministre, la victoire du « non » marque un pas en arrière pour la société irlandaise, régie par une constitution archaïque. Les sondages prévoyaient pourtant un vote positif facile, mais qui s’est peu à peu fissuré à mesure que les propositions de l’Assemblée et du gouvernement se faisaient plus floues sémantiquement et donc aussi juridiquement. La plupart des partis politiques étaient favorables à cette modification, excepté l’Aontu, parti conservateur irlandais. Mais il semblerait que la pédagogie du gouvernement et la campagne pour le Yes n’aient pas été suffisantes, selon l’Irish Times 

 

Des reformulations trop ambiguës

La notion de « relations durables » n’était pas assez claire pour les Irlandais. Certains se demandaient comment cela se traduirait juridiquement et socialement. Dans la situation d’une personne mariée qui entretient une relation durable ailleurs, où est la famille, qui a des droits sur qui ?  

Pour ce qui est de la deuxième question, certains électeurs ont voté « non » bien qu’ils désapprouvent la formulation « archaïque » actuelle. Selon eux, cette dernière permet tout au moins la reconnaissance du travail parfois ingrat de la mère au foyer.  

Les personnes handicapées ou militant pour les droits de ces derniers remettaient aussi en cause la reformulation de la question deux, qui inversait le soutien de l’état. En aidant un proche parent, ce n’était plus l’état qui soutenait les personnes aidantes, mais les personnes aidantes qui rendaient service à l’état. La notion d’obligation de soutien disparaissait totalement. 

La Constitution de l’Irlande ne sera donc pas reformulée avant quelques années et gardera en son sein la notion fondatrice de mariage et l’importance du rôle de la femme au foyer.  

 

>> à lire également : La femme au foyer existe-t-elle encore ?

Mayalen de Vergnette

Mayalen de Vergnette

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneSociétéFin de vie

Euthanasie : une violation des droits des personnes handicapées

La France participe à plusieurs mécanismes internationaux de protection des droits des personnes handicapées. Le Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), aux côtés de 14 000 citoyens, a saisi deux de ces mécanismes, aux Nations unies (Onu). Selon Nicolas Bauer, le débat sur la fin de vie se tient dans l’ignorance des obligations internationales de la France.

+

euthanasie handicap
À la uneSociétéFin de vie

Fin de vie : les paradoxes d’un projet de loi

Entretien | Depuis ce lundi 12 mai, l'hémicycle de l'Assemblée nationale est le théâtre d'une évaluation des deux textes, l'un portant sur la fin de vie et l'autre sur les soins palliatifs. Le 27 mai est la date prévue pour les votes distincts. Entretien avec Joël Hautebert, professeur d’histoire du droit.

+

euthanasie fin de vie
SociétéÉducation

Les Académies Saint-Louis au service de l’éducation intégrale

Initiatives chrétiennes | Le premier internat des Académies Saint-Louis ouvrira ses portes à la rentrée 2025 en Sologne. Porté par une équipe d’éducateurs inspirée par les grands pédagogues chrétiens, ce projet ambitieux veut offrir aux garçons un cadre de vie structurant, fondé sur l’exigence académique, la vie communautaire et l’attention personnalisée.

+

Académie Saint-Louis de Chalès