Comme chaque année depuis 7 ans, L’Homme Nouveau a lancé son concours d’écriture Jeunes Talents 2024 entre avril et juin. Cette année, le thème était : « Après la guérison de son serviteur par Jésus, que devient le Centurion de l’Évangile ? »
Nous publions ici les écrits que nous avons reçus. Les trois lauréats sont aussi publiés dans le numéro d’été (n° 1812), daté du 27 juillet.
Retrouvez toutes les productions dans le dossier thématique Concours Jeunes Talents 2024.
La Vie du Centurion confiant
Un texte de France-Marie de Pompignan
Sur le chemin du retour, le centurion Quintus Tullius Maximus repensa aux paroles de l’homme appelé Jésus. Ses serviteurs lui apportèrent alors la bonne nouvelle.
« Maître, à la septième heure, alors que tout espoir était perdu, Titus s’est réveillé et a demandé qu’on le nourrisse. Vous qui connaissez beaucoup, qu’en dites-vous ?
– À la septième heure, dis-tu ? C’est à cette même heure que Jésus, par une seule parole, l’a guéri ! Que l’on prépare un bon dîner pour fêter sa guérison. »
Les serviteurs aussitôt lui obéirent.
Quintus, quant à lui, rejoignit sa compagne Flavia et son fils dans le jardin. Il les observa attentivement : elle parlait, il écoutait ; elle lui souriait, il lui répondait de même avec un regard plein d’admiration. Soudain, Quintus sentit que sa vie devait changer. Il s’approcha des siens, et Titus accourut vers lui :
« Il me tardait de vous annoncer ma guérison ; nous ne comprenons pas.
– Plus tard, je te le dirai, répondit Quintus calmement. »
Flavia regarda s’éloigner Titus, puis se tourna vers celui qu’elle aimait plus que tout :
« Quintus, que se passe-t-il ? Il me semble que tu as changé.
– Tu as raison, je change. Notre fils est guéri, alors que tout semblait perdu. Je crus en y allant, mais lorsque cet homme a parlé, je sus. Ma foi fut confortée. Il me semble que je ne peux plus vivre de cette façon. Mais allons fêter cela ! Nous parlerons ce soir. »
Il y eut alors un grand festin. Après quelques heures, tous allèrent se reposer et Flavia s’adressa à Quintus :
« Que voulais-tu dire ? Si tu souhaites que Titus et moi-même quittions cette maison, je ferai ce que tu demandes. Pourquoi ne veux-tu plus vivre comme auparavant ?
– J’ignore encore quelle décision prendre, n’ayant pas achevé mon service ici. J’aimerais me mettre au service des autres comme l’on me sert. Il me vient une idée qui ne te plaira pas, je le crains, mais ne sois pas inquiète. Si je veux changer ma façon de vivre, il suffirait que je meure. Flavia eut un mouvement de recul et s’assit.
– Non, je ne souhaite pas me donner la mort, reprit Quintus. Mais je pourrais me faire passer comme tel.
– Aurais-tu perdu l’esprit ? Cet homme que tu as vu, ce Jésus, ne semble pas de bon augure.
– Si tu l’avais vu, tu ne dirais pas cela ; il est un grand homme, fait des merveilles, attire les foules et ses paroles sont bienveillantes. Il est un exemple. Te souviens-tu du cep de vigne que j’ai reçu, le symbole de mon insigne ? Garde cela en mémoire ; cet homme, par ses paroles, a porté, porte et portera beaucoup de fruits, comme un cep de vigne chargé de lourdes grappes.
– Ces hommes qui le suivent pourraient le faire jusqu’à la mort, m’a-t-on dit.
– Ils pourraient le faire, l’aimer et le servir sans condition, car c’est un homme de bien. Et si je le pouvais, je le suivrais. Oui, c’est pourquoi je veux disparaître. Mais je désire aussi être conforme à ce que cet homme prône : une vie morale emplie de charité. Je désire que nous nous mariions légalement et que notre fils devienne légitime aux yeux de cette loi.
– Mais on ne peut changer ; tu serais chassé. Et je comprends que cette solution soit la meilleure, reprit-elle après un instant de silence.
– Ma chère Flavia, dois-je te rappeler mes années de service dans les centuries de César Auguste ? Nous n’avons plus que quelques mois et pourrons vivre selon les préceptes de cet homme, Jésus.
– Si tel est ton souhait, nous te suivrons et te soutiendrons. »
Pendant plusieurs mois, Quintus Tullius Maximus continua de mener une vie de garnison, maniant les armes et les rênes avec dextérité ; il ne cessa jamais de penser au miracle qui l’avait marqué. Chez lui, il enseignait à son fils l’art de la guerre, pour se défendre s’il en était besoin, et à Flavia ce qu’il avait entendu de Jésus. Quelques semaines suffirent pour qu’elle comprenne et devienne bientôt prête à suivre cet homme de bien.
À la mort de Celui que l’on appela plus tard Notre-Seigneur, Quintus comprit que cet homme avait raison et qu’il devait désormais vivre selon Ses préceptes. Il avait répandu la Vérité et avait été assassiné ; oui, Sa mort avait été préméditée.
À la fin de son service, Quintus quitta les armées de César, épousa Flavia et rendit son fils légitime.
Quelques années plus tard, alors qu’il se promenait dans son jardin avec son épouse, un de leurs amis se fit annoncer.
« Mon ami, je suis assez surpris de te voir ici ; je te croyais parti.
– Quintus Tullius, crois bien que je l’aurais préféré ! Mais je dois te prévenir d’un grand danger qui te menace, toi et ta famille !
– Allons, je ne crois pas qu’il puisse nous arriver quoi que ce soit, car on nous apprécie.
– Ce n’est qu’apparence, ils ne sont pas tes amis.
– Que préparent-ils ? s’inquiéta Flavia. Devons-nous partir sur-le-champ ?
– Non, nous devons faire face. Te souviens-tu de ce que cet homme qui nous a menés sur le droit chemin a dit ? Il faut savoir tendre l’autre joue. Et lui-même l’a fait. Comme un agneau qu’on mène à l’abattoir, sans un mot, docilement. Cependant, j’aimerais savoir pourquoi ils veulent notre mort.
– Tu es parvenu à légitimer Flavia et Titus auprès de l’empereur, et tu sais que la jalousie porte à conséquence. Et ils savent que tu ne reconnais pas Auguste comme dieu, et que tu prétends adorer un seul et vrai Dieu. »
Comme il parlait encore, deux serviteurs accoururent, et à peine eurent-ils annoncé que des soldats arrivaient que ceux-ci entrèrent. Après quelques échanges affables, ils furent tous emmenés à la prison de la garnison. Leur ami fut renvoyé sous escorte.
Le chef de garnison, Caïus Octavius Romanus, les fit venir, leur reprochant leurs positions politiques, et les menaça de mort. Quintus répondit alors :
« La jalousie t’égare et la peur de la vérité t’en éloigne. En aucune façon, je n’ai comploté contre l’empereur.
– Tu m’insultes ! En me présentant comme jaloux et craintif ! Je ne le suis pas et te le prouve en te condamnant à mort, ta famille à l’esclavage pour les femmes et les enfants, et aux galères pour les hommes.
– D’où te vient ce droit de mettre à mort sans jugement ? Tu oublies le fonctionnement de nos armées.
– Tu les as quittées et elles ont changé. Mais accepte notre empereur comme ton dieu et renie le tien pour échapper à la mort.
– Jamais je ne renierai mon Dieu ! »
Quintus, prêt à mourir, fut emmené pour être exécuté ; mais voyant les siens, il eut peur. Le regard de Flavia le rassura et lui donna la force de s’abandonner. L’agonie de l’écartèlement fut longue et regardant Caïus Octavius, Flavia et Titus, Quintus Tullius Maximus prononça ses paroles :
« Jamais je ne renierai Dieu Qui m’a tout donné.
Je serais ingrat en agissant ainsi,
Car Lui ne m’a pas renié.
Il a guéri mon fils et mon âme,
Il a transformé ma vie et ma femme.
À jamais je serai reconnaissant
De l’Amour qu’Il a transmis.
Il n’est pas de plus grand Amour
Que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.
Il a donné la Sienne
Et Son Sacrifice sera pour toujours.
Comme un aigle s’élevant vers des Pénates éternelles,
Adieu mon fils, adieu ma belle,
Soyez forts dans l’épreuve et la douleur,
L’Éternité sera notre bonheur ! »
France-Marie de Pompignan
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