Après les premières Vêpres du dimanche de la Divine Miséricorde qui ne peuvent que rappeler le trépas de Jean-Paul II, le Pape François a remis à toute l’Église la bulle d’indiction du Jubilé extraordinaire. Le terme de « bulle » désigne d’abord le sceau de plomb appendu aux actes pontificaux les plus importants.
Léon XIII réserva cet usage uniquement pour les actes solennels du pape, dont l’indiction des conciles ou des années saintes et les définitions dogmatiques. Par extension, la bulle signifie également l’acte pontifical solennel ou le document qui le contient. Il n’y a pas d’acte plus solennel que la bulle dans son sens précis, mais avant Léon XIII beaucoup d’autres documents pontificaux étaient scellés de cette façon et il y a bien des bulles qui ne possèdent certainement pas la valeur doctrinale des grandes encycliques ou exhortations apostoliques des papes modernes. Personne n’osera comparer la bulle Quia major nunc d’Innocent III (1213) aux grandes encycliques comme Pascendi de saint Pie X sur le modernisme, Quas primas de Pie XI sur le Christ-Roi, Humani generis, Mystici Corporis ou Mediator Dei de Pie XII sur les erreurs théologiques modernes particulièrement celles qui concerne le péché originel, l’Église Corps mystique du Christ et enfin la liturgie. Il en va de même des encycliques de Jean XXIII sur l’Église enseignante ou sur la paix dans le monde, de Paul VI sur l’Eucharistie, la procréation, le célibat sacerdotal, etc. Dans le même genre, celles de Jean-Paul II et de Benoît XVI. En effet, même si dans le document d’Innocent III, il y a quelques lignes très fortes contre l’islam, l’ensemble regarde plutôt la croisade et ses aspects particuliers qui ne portent pas à conséquence pour l’enseignement doctrinal et moral du pape qui seul peut toucher l’infaillibilité au sens strict.
Deux remarques
Mais nous devons à ce sujet faire deux remarques. Tout d’abord, ce n’est pas tant la forme des documents que l’intention même du pape qui donne en réalité au document sa valeur doctrinale et sa note d’infaillibilité. D’autre part, il ne faut pas confondre l’infaillibilité qui est le privilège de ne pouvoir se tromper, et la juridiction qui concerne l’autorité. Le pape n’est pas infaillible en tout certes, mais il possède une juridiction pleine et entière et pas seulement d’honneur sur l’ensemble de l’Église, non seulement en matière de foi et de mœurs, mais aussi pour tout ce qui concerne la discipline et le gouvernement de l’Église.
On remarquera l’exorde original mais profond : « François évêque de Rome, serviteur des Serviteurs de Dieu, à ceux qui liront cette lettre, grâce, miséricorde et paix. » En général les papes adressaient leurs lettres soit aux évêques, soit à l’ensemble de l’Église catholique. À partir de Jean XXIII, les papes ajoutaient souvent et « à tous les hommes de bonne volonté ». Le Pape François étend encore son envoi, car de fait c’est le monde entier qui a besoin de miséricorde. En parfaite consonance avec son appel réitéré à sortir vers les « périphéries existentielles », il adresse son appel aux mafieux et aux corrompus, insistant sur l’infinie miséricorde du Seigneur en raison de laquelle il n’existe aucun péché irrémissible de soi.
Envoi en mission
Autre initiative personnelle : l’envoi en mission des missionnaires de la miséricorde, ce qui n’est pas sans évoquer les missionnaires apôtres des temps derniers de saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Grâce à eux et surtout à Marie, une étape décisive dans la nouvelle évangélisation pourrait être franchie. Enfin, comme saint Jean XXIII, le Pape invite à la pratique des quatorze œuvres de miséricorde qu’il rappelle à dessein pour raviver chez tous le souvenir de ce devoir essentiel à tous les disciples du Christ.