La « conversion écologique », une énième tentative de se concilier le monde [fr, eng, it]

Publié le 02 Avr 2020
La « conversion écologique », une énième tentative de se concilier le monde [fr, eng, it] L'Homme Nouveau

Depuis qu’ils sont confrontés au monde né de la Révolution, les catholiques ont souvent mis en œuvre des tentatives dite de « contournement » ou de conciliation, consistant à adopter des thématiques propres à des idéologies laïques et à les « baptiser ». Ceux qui s’y livrent espèrent désarmer en quelque manière l’hostilité du monde et ainsi légitimer vis-à-vis de lui le message propre de l’Église, au risque, souvent assumé, d’affaiblir ce message. Dans l’article « Pour une Église verte », l’abbé Perrot analyse l’une des dernières en date, qui pousse fort loin l’atténuation de la spécificité évangélique. 

Auparavant, Jean-Paul II, comme le rappelle Jean-Marie Perrot, avait tenté de catholiciser les droits de l’homme. Dans une perspective un peu semblable, il avait aussi présenté une défense risquée de l’encyclique Humanæ vitæ, s’inscrivant dans le courant de la pensée personnaliste, en développant une « théologie du corps » (1). 

On pourrait énumérer bien d’autres exemples plus anciens, comme celui de ces prêtres et évêques – pas nécessairement les plus « progressistes » de l’époque (2) – qui en 1848, animés d’une pieuse illusion, bénissaient les arbres de la liberté en expliquant avec une naïveté confondante que la devise républicaine de « liberté, égalité, fraternité » était d’abord chrétienne.

La période contemporaine présente cependant une caractéristique qui aggrave considérablement ce phénomène de conciliation : il est en somme devenu un être nouveau pour le catholicisme. En effet, les textes fondateurs de ce qu’on a appelé « l’esprit du Concile », à savoir la déclaration Dignitatis humanæ sur la liberté religieuse, le décret Unitatis redintegratio sur l’œcuménisme et la déclaration Nostra ætate sur les religions non chrétiennes laissent entendre que les sociétés religieuses autres que l’Église bénéficient d’une certaine existence surnaturelle imparfaite, voire très imparfaite, mais réelle.

Ces conciliations sont mortifères : ce sacrifice au relativisme moderne (qui se voulait cependant « modéré »), s’est accompagné logiquement d’un relativisme interne. Par l’abandon de la « rigidité » des formulations du Credo au profit d’un enseignement pastoral, c’est le mode même de penser la foi qui a été ébranlé dans ses fondations. Et tout naturellement, de la liberté religieuse posée en principe ad extra, on en est venu à la résurgence interne de ce que Léon XIII avait condamné dans la lettre Testem benevolentiae (1899), à savoir l’introduction « d’une certaine liberté dans l’Église » sur le modèle de la « liberté moderne ». Car en acceptant comme légitime le fondement de la société moderne (« Il faut observer la règle générale de la pleine liberté dans la société, selon laquelle on doit reconnaître à l’homme le maximum de liberté et ne restreindre celle-ci que lorsque c’est nécessaire et dans la mesure où c’est nécessaire »Dignitatis humanae n. 7), l’Église ne peut pas le refuser à ses membres. 

De fait, l’indifférence moderne concernant le poids de la vérité a été intériorisé jusqu’à un certain point par le catholicisme. À parler la langue que veulent entendre les hommes, il cesse de parler celle qui pourrait les sauver. Les actes le démontrent : hier, le 27 octobre 1986, la journée d’Assise, où toutes les religions du monde se sont trouvées comme à égalité à prier pour la paix ; aujourd’hui, le 15 octobre 2020, le rassemblement à Rome de tous les participants d’un « pacte éducatif mondial », vague entreprise humaniste, sans référence chrétienne, pour « une éducation plus ouverte et plus inclusive, capable d’une écoute patiente, d’un dialogue constructif et d’une compréhension mutuelle », dans le but de former des personnes « capables de surmonter les morcellements et les oppositions, et recoudre le tissu des relations en vue d’une humanité plus fraternelle ». Humanisme ou néant verbal ?

Car non seulement l’histoire de ces tentatives de « contournement » a été une longue histoire d’échecs, mais elle débouche logiquement dans l’insignifiance, ce dont on pourrait se réjouir si le message de l’Évangile n’en était pas, par le fait, rendu insignifiant.

1. Laurent Jestin, « Tentative de conciliation. Les catéchèses sur la “théologie du corps” » (Tu es Petrus, printemps 2018, n. XVIII, pp. 3-10), lequel, parmi les difficultés soulevées par cette tentative, relève ce sophisme : « l’antériorité instrumentale (l’union charnelle donnant la procréation) est transformée en priorité de valeur, de fin. Là encore, la méthode descriptive montre ses limites. Elle rend plus difficile de définir la hiérarchie des fins du mariage : engendrement et éducation des enfants (fin première), soutien mutuel des époux, et grâce du sacrement qui permet aux époux de vaincre les mouvements désordonnés de la chair dans son exercice (fin seconde). »

2. Le futur cardinal Pie, grand vicaire de Chartres, a appelé à bénir l’arbre de la liberté de cette ville.

The green conversion, the umpteenth tentative to reconcile with the world

Since the time catholics have been confronting to the world born of the Revolution, catholics have often implemented tentatives so called of “circumvention” or conciliation, consisting in adopting thematics belonging to lay ideologies and in “baptizing” them. Those who act in this way hope to disarm, any way they can, the hostility of the world and thus legitimize the message proper to the Church, at the risk of weakening this message. In the article “For a green Church,’, Father Perrot analyses one of the last tentative, pushing very far in the attenuation of the evangelic specificity.

Earlier on, John Paul II, had tried to turn Human Rights into something more Catholic. In a similar perspective, he had also presented a risky defense of the encyclical Humanæ vitæ, in line with Personalism theory, by developing a “theology of the body.”[1]

We could enumerate many more examples, dating back, like the priests and bishops – not necessarily the most progressive of the time[2] – who in 1848, animated by a pious illusion, were blessing trees of liberty, explaining with a confusing naivety that the republican motto “liberty, equality, fraternity” were, first of all, Christian.

The contemporary period though presents a characteristic which worsens considerably this phenomenon of conciliation: which has become a new being for catholicism. In fact, the founding texts of what has been called “the spirit of the Council”, that is to say, the declaration Dignitatis humanæ, on religious liberty, the decree Unitatis redintegratio, on ecumenism, and the declaration Nostra ætate, on non christian religions, let us believe that religious societies, other than the Church, benefit from a certain supernatural existence, eventually very imperfect, but real.

These conciliations are mortifying: this sacrifice to modern relativism (which though presented itself as “moderate”), came along, logically, with an internal relativism. By abandoning the “rigidity” of the formulation of the Creed to benefit the pastoral teaching, it is the same mode of thinking the faith which was shaken in its foundations. And, very naturally, from the religious liberty set as an ad extra principle, we came to the internal resurgence of what Leo XIII had condemned in the letter Testem benevolentiæ (1899), that is to say the introduction “of a certain liberty in the Church” on the model of “modern liberty”. Because by accepting as legitimate the base of modern society (“we ought to observe the general rule of full liberty in society, which recognizes to man the maximum liberty and restrict it only when necessary and when it is necessary,” Dignitatis humanæ n.7), the Church cannot refuse it to its members.

In fact, the modern indifference concerning the weight of truth was interiorized up to a certain point by catholicism. When speaking the language men want to hear, it ceases to speak the one which could save them. Actions are there to prove it: in the past, 27 october 1986, Assisi day, where all the religions of the world met on equal footing for peace; nowadays, 15 October 2020, the gathering in Rome of all the participants of a “world educative pact”, vague humanist enterprise, without reference to christianity, for “an education more open and more inclusive, capable of patiently listening, capable of a constructive dialog and a mutual comprehension,” all in order to form some people able to overcome the divisions and oppositions, and stitch together the fabric of social relation in preparation for a more fraternal humanity.” Humanism or verbal void?

Because, not only the history of these tentatives of “circumvention” has been a long history of failures, but also because it leads logically to banality, which could rejoice us if only the message of the Gospel was not rendered insignificant. 

Father Claude Barthe

[1] Laurent Jestin, “Tentative de conciliation. Les catéchèses sur la “théologie du corps” » (Tu es Petrus, Spring 2018, n. XVIII, pp. 3-10), who, among the difficulties raised by this tentative, note this sophism: “the instrumental anteriority (the carnal union resulting in procreation) is transformed in priority of value, of the end. Here again, the descriptive method shows its limits. It makes more difficult the definition of hierarchy of the end of marriage: engendering and education of the children (first end), mutual support of the spouses, and grace of the sacrament which allows the spouses to be done with the disordered movements of the flesh in its exercise (second end).

[2] The future Cardinal Pie, grand vicar of Chartres, called in to bless the tree of liberty of this city.

« Conversione ecologica »,  l’ennesimo tentativo di accordarsi con il mondo

Da quando hanno cominciato a confrontarsi con il mondo nato dalla Rivoluzione, i cattolici hanno spesso messo in atto dei tentativi di conciliazione, adottando temi propri delle ideologie laiche e  provando a « battezzarle ». Chi si impegna in questi tentativi, spera così di rendere inoffensiva in qualche modo l’ostilità del mondo e allo stesso tempo di legittimare il messaggio della Chiesa nel mondo, con il rischio implicito di indebolirne il messaggio. Nell’articolo « Per una Chiesa verde »

, l’abbé Perrot ne analizza uno dei più recenti, che spinge molto lontano l’attenuazione della specificità del messaggio evangelico.

In precedenza, Giovanni Paolo II, come ci ricorda Jean-Marie Perrot, aveva cercato di cattolicizzare i diritti umani. In una prospettiva abbastanza simile, aveva anche presentato una rischiosa difesa dell’enciclica Humanae vitae, in linea con la corrente del pensiero personalista, sviluppando una « teologia del corpo »[1].

Si potrebbero citare molti altri esempi più indietro nella storia, come quello di quei sacerdoti e vescovi – non necessariamente i più « progressisti » dell’epoca[2] – che nel 1848, animati da una pia illusione, benedissero gli alberi della libertà spiegando con confusa ingenuità che il motto repubblicano di « libertà, uguaglianza, fraternità » era prima di tutto cristiano.

Il periodo più vicino a noi, presenta però una caratteristica che aggrava notevolmente questo fenomeno di conciliazione: è diventato insomma un nuovo modo di essere del cattolicesimo. Infatti, i testi fondanti di quello che è stato chiamato « lo spirito del Concilio », cioè la dichiarazione Dignitatis humanae sulla libertà religiosa, il decreto Unitatis redintegratio sull’ecumenismo e la dichiarazione Nostra aetate sulle religioni non cristiane, suggeriscono che le società religiose diverse dalla Chiesa godono di un’imperfetta, anche molto imperfetta ma reale, esistenza soprannaturale.

Queste conciliazioni sono mortali: questo sacrificio sull’altare del relativismo moderno (che, tuttavia, si riteneva « moderato »), è stato logicamente accompagnato da un relativismo interno. Abbandonando la « rigidità » delle formulazioni del Credo a favore dell’insegnamento pastorale, il modo stesso di pensare la fede è stato scosso nelle sue fondamenta. E, in modo naturale, proprio dalla libertà religiosa, che in linea di principio era stata stabilita ad extra, si è arrivati alla rinascita, all’interno del mondo ecclesiastico, di ciò che Leone XIII aveva condannato nella lettera Testem benevolentiae(1899), cioè l’introduzione di « una certa libertà nella Chiesa » sul modello della « libertà moderna ». Infatti, accettando come legittimo ciò che è il fondamento stesso della società moderna (« Per il resto nella società va rispettata la norma secondo la quale agli esseri umani va riconosciuta la libertà più ampia possibile, e la loro libertà non deve essere limitata, se non quando e in quanto è necessario », Dignitatis humanae n. 7), la Chiesa non può negarla ai suoi membri. 

Di fatto, l’indifferenza moderna per il peso della verità è stata interiorizzata in una certa misura dal cattolicesimo. Parlando la lingua che gli uomini vogliono sentire, smette però di parlare la lingua che potrebbe salvarli. Gli atti lo dimostrano: Ieri, il 27 ottobre 1986, giornata di Assisi, quando tutte le religioni del mondo si sono trovate alla pari a pregare per la pace; oggi, il 15 ottobre 2020, il raduno a Roma di tutti i partecipanti alla ricostruzione di un « patto educativo globale », una vaga impresa umanista, senza riferimenti cristiani, per « un’educazione più aperta e inclusiva, capace di ascolto paziente, dialogo costruttivo e mutua comprensione », con l’obiettivo di formare persone « capaci di superare frammentazioni e contrapposizioni e ricostruire il tessuto di relazioni per un’umanità più fraterna « . Umanesimo o nullità verbale?

In definitiva, la storia di questi tentativi di « aggiramento » non è stata soltanto una lunga storia di fallimenti, ma porta logicamente all’insignificanza, di cui ci si potrebbe anche rallegrare tolto il fatto che in questo modo anche il messaggio del Vangelo viene reso insignificante.

Abbé Claude Barthe

[1]        . Laurent Jestin, « Tentative de conciliation. Les catéchèses sur la “théologie du corps” » – Tentativi di conciliazione. Catechesi sulla teologia del corpo – (Tu es Petrus, primavera  2018, n. XVIII, pp. 3-10), che, tra le difficoltà suscitate da questo tentativo, nota il seguente sofisma: l’anteriorità strumentale (l’unione carnale che dà procreazione) si trasforma in una priorità di valore, di fine. Anche in questo caso il metodo descrittivo mostra i suoi limiti. Rende più difficile definire la gerarchia delle finalità del matrimonio: la nascita e l’educazione dei figli (primo fine), il sostegno reciproco degli sposi, la grazia del sacramento che permette agli sposi di superare i movimenti disordinati della carne nel suo esercizio (secondo fine).

[2]        . Il futuro Cardinale Pie, vicario generale di Chartres, chiamato a benedire l’albero della libertà cittadino.

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